ORAN- Rompre l’Iftar au bord de la mer est devenu une tendance qui s’est installée et généralisée ces dernières années à Oran. Nombreuses sont les familles et les groupes d’amis à préférer rompre le jeûne au bord de la mer. Le cas de la plage Corales, sur la corniche oranaise, est révélateur de l’importance que prend cette tendance.
Corales-plage ne se désemplit jamais. Durant le mois sacré du ramadhan, elle connaît la même affluence, surtout à l’approche de l’Iftar.
Il est 18h00. De nombreuses familles sont déjà là depuis un moment. Les enfants jouent. Bruyants et ostentatoires. Deux gamins se « bombardent » à boules de sable, riant aux éclats à chaque fois que l’un d’eux est touché. Une petite fille découvre les joies de la baignade, un peu hésitante, elle est poussée par les encouragements de sa maman.
En dépit des cris de joie et des rires des enfants, les adultes restent calmes. La dureté des dernières heures de jeûne se lit sur les visages, blafards, qui peinent même à afficher une quelconque expression.
Trois femmes d’âge mûr, assises l’une à côté de l’autre, contemplent la mer, silencieuses, presque absentes. Pas loin d’elles, leur accompagnateur, vêtu d’une légère Abaya et d’une toque blanche, est plongé dans la lecture du Saint Coran, en se berçant légèrement. Complètement absorbé, rien ne semble pouvoir le déconcentrer.
Aux environs de 19h30, un silence presque lourd s’abat sur la plage. Jamais Coralès n’a jamais été aussi calme.
A mesure que le soleil tombait, les gens quittent la rive pour se préparer à rompre le jeûne, tout en contemplant la beauté du crépuscule offrant sa plus belle palette de couleur. Les petits nuages, enlaçant le disque couchant, se sont embrasés de mille feux.
A l’approche de l’heure de l’Adhan, tout le monde s’active pour installer « la table ». Une table et quelques chaises en plastique pour les mieux équipés, et un grand tapis pour ceux qui veulent le moins s’encombrer. On s’installe sur le trottoir, près des véhicules dont les phares sont allumés pour éclairer
les alentours. Cocottes-minutes contenant l’incontournable H’rira, glacières, plats et salades variées et riches en composantes, paniers en osiers, assiettes, cuillères, fourchettes et gobelets jetables, boissons et fruits frais garnissent ces tables de fortune.
On prépare même un petit feu pour les besoins de brochettes et autres grillades qui apporteront une saveur particulière à ce f’tour en bord de mer. La promesse d’une paisible soirée à la belle étoile se devine.
Chez Kacem
Sur la terrasse du restaurant « Chez Kacem », trois tables sont dressées. Naima, l’épouse de Kacem et gérante du restaurant, a pris l’habitude, depuis plus de quinze ans, de travailler au cours du mois du Ramadhan. Mais elle n’accepte qu’un nombre réduit de personnes. « Au maximum cinq familles qui doivent réserver à l’avance », explique-t-elle.
Les familles attablées ont les yeux rivés sur l’horizon, regardant une dernière fois le soleil qui se couche. Après l’appel à la prière d’El Maghreb, on entend plus que les tintements des cuillères. Tout le monde est concentré sur les plats servis et amoureusement préparés.
Sonia, une maman de trois enfants, rencontrée sur place, a confié qu’elle vient chez Kacem avec sa petite famille, une fois par semaine, le week-end en général, pour « casser la routine ».
« Je suis une femme active. J’ai trois enfants en bas âge. C’est pénible pour moi de cuisiner tous les jours », a-t-elle précisé, notant que ce restaurant, pratiquement le seul à ouvrir en ce mois, est une aubaine, car cette journée par semaine lui permet de souffler.
Sonia reconnaît même avoir emmené ses invités du Ramadhan chez Kacem. Le rapport qualité-prix est apparemment intéressant dans ce petit restaurant.
Un menu-type ramadhan, soit une h’rira, des bouraks, une salade et un plat pour 4 personnes reviendrait aux alentours de 3.500 DA. « C’est parfois moins que ce qu’on dépense dans un menu préparé à la maison », s’est-elle exclamée.
Ryad, l’époux de Sonia, trouve que c’est très reposant de diner au bord de la mer. « C’est aussi une bonne occasion de profiter de la plage dans le calme, ce qui n’est pas possible en temps normal », a-t-il dit.
Une fois El iftar terminé, les rares occupants de la plage commencent à partir. Certains ne résistent pas à l’appel de la mer pour piquer une tête dans l’eau tiède. D’autres baigneurs, beaucoup plus nombreux, qui ont diné chez eux, ne tardent pas à les remplacer et à créer, eux aussi, une ambiance particulière qui se prolongera jusqu’à l’aube.