Par
On continue de construire dans ces régions avec des parpaings auxquels on fait traverser l’Algérie afin de bâtir des horreurs qui ne respectent pas l’architecture locale et qui sont, par-dessus le marché, des plus énergivores.
Il y a de cela plus de 20 ans, Ksar Tafilelt avait jailli du sable de Béni-Isguen!
«Une utopie devenue réalité», comme le définissait en avril dernier le très sérieux magazine français Le point. Et pour cause, lors de la Cop 22 tenue il y a de cela exactement deux ans à Marrakech au Maroc, cette cité a été distinguée par le premier Prix de la ville durable. «Le ksar de Tafilelt, qui a été considéré comme une expérience humaine très particulière dans le Sahara et une écoville du désert, a obtenu plus de 600 voix des professionnels du monde, pour avoir allié l’architecture, le développement durable, la préservation de l’environnement et le cadre de vie», a-t-on expliqué à l’époque. «Le ksar de Tafilelt a également été classé deuxième pour le Grand Prix de la cité durable exemplaire par un jury thématique international qui l’a considéré comme un exemple à suivre et à répliquer en Algérie», a-t-on ajouté.

Une véritable fierté, surtout que cette ville avant-gardiste ne fait que s’inspirer de l’héritage de nos ancêtres qui a été repris et modernisé par la jeune élite locale, à leur tête Ahmed Nouh. Le fondateur de la cité, qui est docteur en pharmacie, s’est entouré des intellectuels de la région pour moderniser les «ksour» de ses aïeux. Ainsi, on y retrouve des petites maisons construites avec des pierres, de la chaux et du plâtre. Des systèmes de récupération des eaux et des déchets, eux aussi inspirés de ce qu’avait fait l’homme il y a des siècles pour s’adapter à l’extrême dureté de son environnement. Mais voilà que deux ans après, cette distinction n’a pas fait d’émules. Pourquoi? On s’attendait à voir Ksar Tafilelt avoir des enfants à travers le territoire national, particulièrement dans le sud du pays! Mais rien ne fut, on continue de construire dans ces régions avec des parpaings auxquels on fait traverser l’Algérie afin de bâtir des horreurs qui ne respectent pas l’architecture locale et qui sont par-dessus le marché des plus énergivores.
Un véritable gaspillage de temps, d’argent et d’énergie fossile qui débute à la construction et qui continue au fil des années. Alors que Dame nature offre diverses possibilités pour des villes écocitoyennes et durables. À qui la faute? Pourtant, le chef de l’État Abdelaziz Bouteflika avait porté à bras-le-corps ce projet en procédant lui-même à son inauguration en 2006. Qui est donc responsable? Les responsables de l’environnement et du développement durable qui n’ont pas assez fait pour promouvoir cet exemple? Un manque de communication sur ce paradis au milieu du désert? Une difficulté à appliquer à une plus grande échelle les «percepts» de Ahmed Nouh et ses amis? Pourtant, si un petit groupe a réussi à le faire avec peu de moyens, cela devrait être possible pour un Etat. En fait, cette question résume à elle seule le peu d’importance qui est donnée à l’écologie. On peut citer entre autres les énergies renouvelables qui continuent d’être considérées comme secondaires. À l’exemple, du projet des 4000 MW en énergie renouvelable, qui n’arrive pas à décoller.
Pourtant, avec Ksar Tafilelt ou encore le concours du village les plus propre de Kabylie, on a vu qu’«impossible» n’était pas algérien. Il suffit juste d’impliquer les citoyens et mettre entre leurs mains les moyens nécessaires. À méditer!