Kirghizstan : Bakaiev resserre l’étau

Kirghizstan : Bakaiev resserre l’étau

Arrivé au pouvoir à la faveur de la « révolution des Tulipes » en 2005, Kourmanbek Bakiev devait être, sans surprise, confirmé dans ses fonctions, à l’occasion de l’élection présidentielle du jeudi 23 juillet au Kirghizstan.

Quatre ans après son accession au sommet de l’Etat, accueilli favorablement par les chancelleries occidentales (notamment par Washington), M. Bakiev aura finalement renoué avec les méthodes autoritaires qui caractérisaient son prédécesseur, Askar Akaïev.

L’élection de Kourmanbek Bakiev avait pourtant suscité certains espoirs.

Originaire du Sud dans un pays jusqu’ici dominé par les réseaux claniques des grandes familles du Nord, il incarnait la fin possible d’un clientélisme devenu endémique ; et sa démission, en 2002, alors qu’il était premier ministre, pour protester contre la mort de manifestants causée par des policiers, lui donnait une certaine respectabilité.

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Mais le système s’est rapidement crispé. Dès l’automne 2006, l’opposition descendait dans la rue pour exiger l’adoption de réformes constitutionnelles accordant davantage de pouvoirs au Parlement, conformément aux engagements de M. Bakiev.

En mars 2007, une nouvelle série de manifestations éclatait à Bichkek : l’opposition exigeait cette fois-ci la démission du président.

Pour les élections législatives de l’automne 2007, un parti pro-présidentiel, créé pour l’occasion, allait arracher 71 des 90 sièges en jeu, lors d’un scrutin jugé inéquitable par les observateurs internationaux, notamment l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Depuis, l’opposition accuse le régime Bakiev de renouer avec le clientélisme.

Les regards se tournent vers le fils du président, Maksim, dont l’influence est croissante, tandis que les réformes adoptées par le pouvoir kirghize ne tendent pas vers une libéralisation.

La création de nouveaux partis politiques est rendue plus difficile ; une nouvelle loi sur les médias restreint la liberté de la presse.

Les mouvements de défense des droits de l’homme s’inquiètent d’ailleurs du sort des médias kirghizes ; pas moins de six journalistes ont été attaqués en 2009.

Dernier cas en date, début juillet : un journaliste indépendant était battu à mort par un policier.

Soupçons de fraude

A l’occasion de l’élection de jeudi, l’opposition, morcelée, dénonçait par avance un bourrage des urnes et un taux de participation manipulé à la hausse.

« S’ils trichent lors de cette élection, tout peut arriver », menaçait récemment l’un des cinq candidats d’opposition en lice, Almazbek Atambaïev, qui se garde cependant d’appeler les Kirghizes à descendre dans la rue.

Deux membres du Mouvement populaire uni, qui le soutient, ont été arrêtés il y a quelques jours à Bichkek.

Malgré l’absence de réformes réelles, M. Bakiev a su s’attirer les soutiens internationaux en raison de la position stratégique du pays.

Le président kirghize a su jouer des antagonismes entre Washington et Moscou, qui disposent sur place d’installations militaires, pour se rendre indispensable.

Cet hiver, sous pression de Moscou qui faisait miroiter un prêt de 2 milliards de dollars, Bichkek menaçait de fermer la base militaire américaine de Manas, essentielle pour les opérations afghanes.

En juillet, le président Bakiev a finalement décidé de renouveler, à la hausse, le bail américain, tout en acceptant l’ouverture d’une nouvelle base… pour les Russes.