Bien que porté plus rarement par les mariées de nos jours, khiterrouh, bijou traditionnel porté par les Algéroises sur le front lors des fêtes et cérémonies, était par le passé incontournable.
Les femmes, en portant la tenue traditionnelle algéroise -caraco et meharmetleftoul- portaient khiterrouh sur le front, mettant ainsi en valeur la beauté du regard, délicatement souligné de khôl. Mais lorsqu’il accessoirisait d’autres tenues traditionnelles, il était porté autour du cou. Khiterrouh (fil de l’âme), également appelé « zerouf » dans la région tlemcenienne, a au fil du temps été adopté par les femmes d’autres régions d’Algérie.
Constitué de petites boules serties de pierres, khiterrouh est réalisé en or jaune ou en or blanc, avec des pierres semi précieuses. Cependant, les familles fortunées n’hésitaient pas à le commander auprès d’artisans-bijoutiers, incrusté de pierres précieuses, comme le diamant. Il était même assorti à des boucles d’oreilles, bracelet et bague, constituant ainsi une parure de grande valeur. Il arrivait, lorsque les parents ne pouvaient pas offrir à leur fille ce beau bijou, de l’exiger au prétendant en guise de dot. Il traversait ainsi les générations, se transmettant de mère en fille.
Une histoire lointaine…
Influencées par les différentes cultures importées par les différentes civilisations qui se sont succédées sur les terres algériennes, notamment romaines, byzantines ou encore ottomanes, les musulmanes d’Alger ont, à chaque époque, adapté leurs tenues vestimentaires puisant le meilleur de ce qu’elles voyaient chez les autres.
S’habillant avec raffinement, se fardant comme des princesses et se parant de bijoux qui rehaussaient, dans leur scintillement, leur grande beauté, les riches algéroises n’hésitaient pourtant pas au fil des époques à apporter des transformations à leurs tenues vestimentaires.
C’est ainsi que la ‘assaba en soie était remplacée par un bijou plus fastueux : un diadème formé de sept plaques ajourées, incrustées de pierreries et soulignées de pendeloques.Mais au lendemain de l’occupation française, et en raison du départ massif de l’élite algéroise et de la destruction de quartiers entiers de la ville, le costume algérois se transforme irrémédiablement. Outre l’habit en lui-même, la parure connaît également un appauvrissement, cela a notamment cours à partir de 1870, lorsque le nouvel occupant s’installe plus durablement. Les marchés sont, dès lors, envahis par les textiles de fabrication industrielle et les bijoux d’importation, ce qui entraîne la disparition des ateliers de tissage, de broderie ou d’orfèvrerie.
Contrairement aux autres régions d’Algérie, la tenue algéroise perd de sa magnificence et de son éclat. Au début du XXe siècle, l’influence des modèles français est apparente car, désormais, la moitié de la population de la ville est européenne.
Seules les mariées tentent de maintenir la tradition en portant la fouta de leurs aïeules sur le seroual nuptial. Malheureusement, les babouches disparaissent au profit de chaussures fermées à talons, tandis que la maherma se porte avec un diadème formé de plaques ajourées appelé « ‘assaba », agrémenté de quelques épingles désignées par le nom arabe de ouardat ou ra’achat et d’un second diadème plus fin, appelé « khiterrouh ».
D’ailleurs, au XXe siècle, il devient l’unique bijou frontal porté par les femmes, notamment les mariées. Il était assorti de boucles d’oreilles incrustées de petites pierres et de quelques rangs de perles baroques qui débordaient de l’encolure du caraco.
Le port du khiterrouh s’étend, dès le milieu du XXe siècle, à d’autres villes et régions du pays, comme les Aurès.
Kamir B