Kashgar, pôle stratégique du Xinjiang : entre modernité, essor économique et héritage millénaire

Kashgar, pôle stratégique du Xinjiang : entre modernité, essor économique et héritage millénaire
La ville du Kashgar (Xinjiang, Chine).

Entre modernité industrielle, valorisation patrimoniale et développement rural, la région de Kashgar s’affirme comme un moteur dynamique de l’ouest chinois. Au sud du Xinjiang, Kashgar ne cesse de redessiner son avenir. En quelques années, cette région longtemps perçue comme périphérique s’est hissée au rang de pôle économique stratégique, grâce à une série de projets ambitieux à la croisière du commerce international, de la revitalisation urbaine et de l’agriculture moderne.

Créée en septembre 2014 et mise en service en avril 2015, la zone franche intégrée de Kashgar s’étend sur plus de 3,5 km². Unique en son genre dans le sud du Xinjiang, elle regroupe cinq pôles fonctionnels : transformation, logistique, entrepôts, fret aérien et opérations portuaires.

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Conçue comme une plateforme logistique tournée vers l’Asie centrale et du sud, elle déploie des services de douane, de transformation, d’exposition, de e-commerce mais aussi de transport aérien. Son modèle de gestion innovant repose sur un partenariat à cinq entités, dont des structures nationales majeures comme China Merchants Group ou le port de Yantian.

Début 2023, 2,23 km² avaient déjà été aménagés avec une surface bâtie de 237 400 m². En effet, les chiffres sont éloquents : en 2022, la zone a généré 1,29 milliard de yuans en e-commerce transfrontalier (+291 %) et 28,28 milliards de yuans en import-export (+662 %). L’année suivante, elle atteint 3,2 milliards de yuans en e-commerce et 50,4 milliards en commerce extérieur, doublant ainsi ses performances. Des résultats qui l’ont hissée en tête des zones franches du Xinjiang et parmi les plus performantes du pays.

Carte géographique situant Kashgar au sud du Xinjiang en Chine.

La vieille ville de Kashgar, joyau vivant de la Route de la Soie

Considérée comme un véritable livre d’histoire à ciel ouvert, la vieille ville millénaire de Kashgar incarne l’âme du Xinjiang. Ses ruelles, ses maisons en pisé, son atmosphère médiévale font de ce lieu un patrimoine architectural et culturel unique. Ainsi, elle est surnommée la « Perle Étincelante » et « fossile vivant de l’histoire de l’Asie centrale ».

Lancé en 2008 et expérimenté dès 2009, le vaste projet de réhabilitation et de préservation de la vieille ville de Kashgar a été officiellement validé en août 2010 par huit ministères nationaux. Ce chantier d’envergure couvre 28 quartiers et concerne plus de 49 000 logements vétustes, soit plus de 5 millions de m² à réhabiliter.

D’ailleurs, l’investissement total atteint 7,049 milliards de yuans, financé par l’État central (2 milliards), les aides au logement social (226 millions), la région autonome du Xinjiang (1 milliard) et les contributions locales (collectivités, entreprises et habitants) pour un montant de 3,822 milliards.

Une réhabilitation ambitieuse au service du patrimoine et de la population

Fidèle au principe « un design par foyer », le programme conjugue démolition-reconstruction et rénovation partielle ou complète, selon les cas. Il assure une meilleure sécurité sismique tout en préservant l’architecture ethnique. Le résultat, salué unanimement, donne naissance à une vieille ville qui, bien qu’entièrement restaurée, conserve le charme de l’authenticité. « Ce n’est plus l’ancienne ville, mais elle est encore mieux qu’avant », affirment les habitants.

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Guidée par la vision « Créer un site, embellir une ville, civiliser un territoire, enrichir un peuple », cette transformation a donné un nouvel élan à la cité historique. Le 20 juillet 2015, Kashgar obtient la prestigieuse classification touristique 5A, stimulant à la fois le tourisme, l’économie locale ainsi que l’emploi.

Installé dans la partie ouest, le mémorial de la rénovation retrace toutes les étapes de cette métamorphose. Kashgar, seule ville du Xinjiang classée patrimoine historique et culturel national depuis 1986, a également reçu les éloges de l’UNESCO, qui voit dans cette initiative une mesure exemplaire. L’organisation a salué une démarche « rare et admirable » face aux risques sismiques, soulignant sa capacité à préserver le patrimoine bâti tout en maintenant les traditions vivantes.

Cité millénaire vivante, Kashgar offre une immersion dans l’atmosphère médiévale de la Route de la Soie.

La mosquée Id Kah, véritable bijou architectural de Kashgar

Fondée en 1442, la mosquée Id Kah reste l’un des lieux emblématiques de Kashgar. Elle accueille fidèles et visiteurs sur plus de 1,6 hectare. Classée monument protégé au niveau régional depuis 1962, puis au niveau national en 2001, elle a bénéficié de restaurations successives financées par l’État, qui ont permis de conserver son écriture architecturale, ses couleurs, ses motifs originels et son authenticité.

Aujourd’hui, la mosquée Id Kah dispose d’équipements modernes (chauffage, toilettes, bibliothèques, dispositifs de sécurité), offrant par conséquent un espace de prière digne de son statut historique et culturel.

La mosquée Id Kah centre religieux de la vie ouïgoure.

Kashgar mise sur l’agriculture intelligente pour dynamiser le développement rural

Au-delà de son patrimoine historique, Kashgar investit massivement dans l’agro-industrie pour renforcer son économie locale et valoriser les ressources agricoles du sud du Xinjiang. L’entreprise Jiang Guoguo Agricultural Technology, fondée en novembre 2015 dans le comté de Shufu, incarne cette ambition. Forte d’un capital de 52,13 millions de yuans, cette société de référence dans la filière agroalimentaire se spécialise dans la commercialisation de produits régionaux : fruits secs, snacks, boissons et fruits frais.

Son modèle économique repose sur une synergie efficace entre entreprises, coopératives et agriculteurs. En rachetant et en réhabilitant plus de 4 500 mu de vergers (environ 300 hectares), Jiang Guoguo a soutenu près de 50 000 foyers agricoles, formé 50 000 personnes à travers plus de 800 sessions, et collaboré avec 76 coopératives, générant 3 500 emplois. Grâce à cinq entrepôts logistiques implantés à Kashgar, Xi’an, Guangzhou, Shenzhen et Shanghai, ses produits circulent aujourd’hui sur 480 plateformes de vente à travers toute la Chine.

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À Shule, un parc agricole moderne, fruit d’un investissement de 1,06 milliard de yuans, s’étend sur 4 711 mu, soit environ 314 hectares. Ce projet structurant, porté par le groupe Shandong Water Development, combine culture intelligente, transformation, logistique, commerce et formation agricole.

Divisé en deux grandes zones, il comprend à l’ouest une serre néerlandaise de 70 000 m², un centre de semis et plus de 1 000 serres solaires, tandis que la zone de l’est regroupe un centre de services agricoles, des espaces de transformation et de logistique frigorifique, ainsi que des salles de formation et d’exposition commerciale. Plus de 680 travailleurs y sont employés, avec un salaire mensuel supérieur à 2 000 yuans. Le site pilote également un programme d’agriculture intelligente sur plus de 30 000 mu de cultures maraîchères (près de 2 000 hectares).

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Toujours dans le comté de Jiashi, le parc industriel du prunier de Yuejia, situé à Yingmaili, illustre une autre réussite agro-industrielle. S’étendant sur 364 mu (environ 24 hectares) et totalisant 100 000 m² de surface bâtie, il regroupe recherche, démonstration, logistique et transformation au sein de quatre zones fonctionnelles. Chaque année, il offre plus de 5 000 emplois saisonniers, renforçant l’emploi local et la transformation des produits agricoles.

Par ailleurs, l’essor économique de Kashgar passe également par des projets d’infrastructure essentiels. En effet, le comté de Jiashi a lancé en 2019 le « grand projet d’eau potable », un programme stratégique pour améliorer la qualité de vie des populations rurales. Mobilisant 1,749 milliard de yuans, ce chantier a permis l’installation de 1 827 km de canalisations à travers 13 cantons, incluant 112 km de conduites principales et 1 548 km de réseaux rénovés. Achevé en mai 2020, il a permis à 460 000 habitants d’accéder à une eau potable saine, mettant fin à des siècles de consommation d’eau saumâtre ou salée, un tournant historique pour la région.