Karim Djoudi : « l’Etat peut intervenir pour soutenir le financement de l’investissement dans les entreprises »

Karim Djoudi : « l’Etat peut intervenir pour soutenir le financement de l’investissement dans les entreprises »

Les indicateurs macro-économiques de l’Algérie sont au beau fixe selon le FMI. L’institution dirigée par Dominique Strauss Kahn prévoit une amélioration sensible des indicateurs macro-économiques pour les prochaines années avec une croissance du PIB de 3,6% en 2011 et de 3,2% en 2012.

En 2010 la croissance a été de 3,2%. La balance des comptes courants devrait quant à elle représenter 17,8% du PIB en 2011, puis 17,4% en 2012 contre 9,4% seulement en 2010. Le FMI indique que ce taux dépasse la moyenne de celui des pays exportateurs de pétrole de la région MENA (Moyen-Orient, Afrique du Nord).

C’est dans un tel contexte que Karim Djoudi, ministre algérien des Finances a, dans une interview accordée à Algérie presse service (APS), passé en revue quelques aspects de la politique économique et financière des autorités algériennes.

Le ministre des Finances est revenu sur la décision d’émission d’un nouveau billet de banque en expliquant qu’elle «n’influe nullement sur le niveau de la masse monétaire, mais uniquement sur la composition de la monnaie fiduciaire.»

L’objectif de cette décision est d’«orienter les besoins de thésaurisation vers les billets de 2 000 dinars algériens» afin de délaisser les «coupures inférieures aux besoins de circulation monétaire.»

Pour le ministre, le risque inflationniste proviendrait des augmentations de salaires consenties ces derniers mois au titre des régimes indemnitaires et des statuts particuliers avec rappel sur les trois dernières années (2008, 2009 et 2010).

Pour contrer cette tendance haussière des prix évaluée à 4% pour 2011, les autorités comptent sur les opportunités d’épargne offertes par l’Etat ainsi que sur l’investissement productif.

Promouvoir les moyens de paiement scripturaux

Afin de remettre en cause la domination quasi exclusive de la monnaie fiduciaire, le ministre compte sur la modernisation du système de paiement (banques, poste) et sur l’assainissement du commerce.

Concernant le premier point, le ministre rappelle que le système de paiement «traite déjà les chèques, les virements, les effets de commerce, les cartes bancaires selon une moyenne de 55 000 opérations électroniques par jour.»

Karim Djoudi indique par ailleurs qu’une opération pilote, en cours à Alger, a vocation à se généraliser progressivement. Elle concerne le lancement de 6 millions de cartes à puce de paiement et de retrait interbancaire – la carte CIB.

Le ministre admet en même temps le caractère insuffisant du paiement par carte d’où, parallèlement à l’augmentation du nombre de porteurs de carte CIB, «la nécessité d’un déploiement plus intense des Terminaux de paiement électronique (TPE) auprès des commerçants».

Le ministre rappelle que les chambres de compensation manuelle aux virements de salaire ont été fermées le 1er janvier 2010 et que la télé compensation s’opère désormais de manière électronique grâce aux entreprises qui utilisent désormais le dispositif d’Echange de données informatisées (EDI) installé par les banques.

D’autres actions sont en cours à l’image du lancement du commerce électronique visant à développer l’usage de la carte monétique pour régler les factures d’électricité et de gaz, d’eau, de téléphone… pour payer les achats de carburant ou les titres de transport (SNTF, Air Algérie…). L’objectif consistant à réduire autant que faire se peut, le recours à la monnaie fiduciaire.

A ce propos, Karim Djoudi ne rate pas l’occasion de rappeler que l’obligation, repoussée suite à l’explosion sociale de janvier 2011 consécutive à l’augmentation des prix des de l’huile et du sucre, de paiement à travers les circuits bancaires et financiers, vise à développer la bancarisation de l’économie.

L’objectif suivant consistera à développer le e-paiement, la carte prépayée, le m-paiement (par téléphone mobile) et le e-banking.

Des mesures de soutien au pouvoir d’achat des citoyens

On apprend par la voix du ministre des finances que le soutien par l’Etat des prix du blé dur et tendre et de la poudre de lait sera renforcé en 2011 pour atteindre les 270 mrds de dinars algériens (2,6 mrds€).

Ce soutien s’est élargi depuis peu au sucre et à l’huile alimentaire ce qui occasionnera une dépense supplémentaire de 5 mrds de dinars algériens (48M€) avec, de surcroît, une perte du fait de la suspension des droits de douanes et de TVA concernant ces deux derniers produits.

Cette politique vise, selon le ministre, à lutter contre la spéculation et à faire face à l’augmentation des prix sur le marché mondial.

Le soutien au pouvoir d’achat des citoyens est également passé, selon le ministre, «par la mise en œuvre des différents statuts professionnels des secteurs» qui s’est traduite par le versement de rappels sur les trois dernières années.

Favoriser la création d’emplois

Karim Djoudi commence d’abord par préciser que l’Etat a décidé, au-delà des mesures conjoncturelles, de remettre l’activité productrice au cœur de sa stratégie car seules les entreprises sont «porteuses de croissance, d’emploi et de revenus durables.»

Parmi les récentes décisions prises par le Conseil des ministres, le ministre cite la mise en place d’une ligne de crédit à long terme renouvelable de 100 mrds de dinars algériens (960 M€) au profit des banques afin de soutenir leurs opérations de financements. Il rappelle la création, par les banques publiques, de trois filiales de leasing en vue de soutenir l’investissement des entreprises.

Dans l’agriculture, il évoque la création d’un fonds de 20 mrds de dinars algériens (192M€) visant à garantir les crédits accordés aux agriculteurs.

Les pouvoirs publics ont également décidé d’accroître les ressources des différents dispositifs d’aide à la création d’entreprises (ANSEJ, ANGEM, CNAC) et à l’emploi.

Enfin, le ministre souligne la décision de mise de nouveaux espaces industriels sous forme de concession à la disposition des entreprises qui investissent.

Investissements et LFC 2011

A une question portant sur les raisons de la «très forte baisse des investissements nationaux et étrangers», au cours des années 2009 et 2010, le ministre rétorque que les crédits distribués par les banques à leurs entreprises clientes ont progressé, en 2010, de 16% pour les entreprises privées et de 18% pour les entreprises publiques.

Quant aux investissements étrangers directs nets, il nie la baisse en expliquant que le compte capital de 2010 affiche un montant de 3,49 mrds $ en 2010 contre 3,45 mrds $ en 2009, 2,33 mrds $en 2008 et 1,37 mrds $ en 2007.

Le ministre rappelle que le gouvernement a baissé la pression fiscale et parafiscale, simplifié les procédures de taxation, investi dans le développement des infrastructures et rééquilibré les territoires.

Karim Djoudi explique que le contexte de cette loi est marqué par la forte inflation touchant plusieurs produits alimentaires de large consommation importés, ce qui a poussé le gouvernement à accroître son soutien à leur prix.

Le conteste est également marqué par les récentes mesures de versement de rappels suite à l’adoption de nouveaux statuts ainsi que par la mise en place de nouveaux dispositifs de soutien à la création d’emplois.

Tout cela doit être pris en charge par la LFC 2011.