Karakou : Forbes met le vêtement algérien à l’honneur

Karakou : Forbes met le vêtement algérien à l’honneur

De nombreuses maisons de luxe ont été influencées par le Karakou, un costume de soirée algérien, et l’ont intégré dans leurs collections. Cet engouement pour le Karakou a été initié par Yves Saint Laurent, natif d’Oran, qui a régulièrement rendu hommage à cet habit traditionnel dans ses créations de haute couture.

Bien que le Karakou soit un élément important du patrimoine algérien, l’utilisation de cet élément par des créateurs de mode étrangers soulève des questions sur l’appropriation culturelle. Pour approfondir le sujet, Forbes a interviewé le designer Eddine Belmahdi, un styliste franco-algérien reconnu dans le monde de haute couture.

D’après Eddine Belmahdi, l’origine du Karakou remonte au 14ème siècle en Algérie. Considéré comme l’ancêtre du soutien-gorge par certains, ce gilet a subi plusieurs évolutions au fil du temps. Alger a toujours été une ville de mode et de faste, où l’art de la broderie est travaillé depuis des siècles. Les influences berbère, andalouse, ottomane et française ont toutes contribué à modifier le style de ce vêtement dans cette ville-carrefour.

En outre, la jupe qui compose le Karakou, appelée ‘sarouel cherka’, est associée à la princesse Zaphira d’Alger, qui la portait fendue sur les côtés et fermée à l’entre-jambe au 16ème siècle, avant d’être tuée par le corsaire Barberousse. Cette icône de la mode a contribué à populariser le Karakouauprès des Algériennes et a ainsi contribué à le faire entrer dans leur garde-robe.

Le Karakou : inspiration des grandes marques de luxe

Forbes a donc posé une question à Eddine Belmahdi, concernant l’inspiration que le karakou, un costume traditionnel algérien, a suscitée chez de nombreux designers tels qu’Yves Saint Laurent, Elie Saab, Christian Lacroix, Elsa Schiaparelli, etc.

Selon Belmahdi, l’esthétique du karakou en fait une pièce avec laquelle les designers peuvent s’amuser et être créatifs. Les maisons de luxe ont ainsi été attirées par les codes raffinés et luxueux de cette tenue de fête algéroise.

Cependant, en tant que styliste, Belmahdi regrette le manque d’informations et de contextualisation autour de cette tenue iconique lorsqu’elle est présentée dans les collections. Il estime qu’il est crucial de mettre en lumière les repères historiques et culturels qui entourent cette tenue, surtout dans un contexte où les débats sur l’appropriation culturelle sont de plus en plus présents.

Dans ses propos, Eddine Belmahdi met en évidence la relation particulière entre Monsieur Saint Laurent et l’Algérie, pays qui a été une grande source d’inspiration pour le célèbre créateur de mode.

Ayant grandi en Algérie, ce pays a façonné une partie de son identité et de sa créativité. Malgré un climat parfois hostile envers l’Algérie d’après-guerre en France, Monsieur Saint Laurent a su faire abstraction de cette animosité pour exprimer son amour pour sa terre natale. En effet, il a projeté une partie de sa vie, notamment son enfance, sur certaines de ses créations, en y incorporant subtilement des références à l’Algérie.

Belmahdi : « l’Algérie n’est pas l’Orient, c’est le Maghreb »

Belmahdi a également souligné l’exemple inspirant de la maison Hermès et son travail de mise en lumière exemplaire dans son défilé indien. La marque française a en effet fait appel à des artisans locaux pour co-créer la collection, lesquels ont touché des royalties sur les ventes. Pour Belmahdi, c’est ainsi que les griffes devraient fonctionner lorsqu’elles s’inspirent de l’héritage vestimentaire d’autres cultures.

Cependant, il a également tenu à préciser que l’Algérie n’était pas l’Orient mais le Maghreb avant tout. Les tenues traditionnelles algériennes ne sont donc pas considérées comme des tenues orientales, mais ont leur propre histoire, leurs propres noms et sont rattachées à des villes ayant une forte identité patrimoniale. Ces précisions sont importantes dans un contexte où l’appropriation culturelle est de plus en plus critiquée et où la sensibilisation à la diversité culturelle est essentielle.

Enfin, le designer décrit le Karakou comme étant en harmonie avec la ville qui l’a vu naître, présentant des caractéristiques mystérieuses et vibrantes qui évoluent avec elle. Le vêtement est véritablement « s’adapte facilement à la personnalité de chaque femme qui le porte », ce qui fait de lui, un intemporel.