Une atmosphère de chaos et de confusion règne en Libye où Maâmar Kaddafi reste introuvable mais affirme qu’il y est.
Alors qu’une guerre psychologique semble gagner de plus en plus de terrain quant aux informations données et par le CNT libyen et par le régime de Kaddafi sur le contrôle de Tripoli, d’une part, et concernant l’arrestation, pourtant confirmée par la CPI, de Seif El Islam, d’autre part, une atmosphère de chaos et de confusion s’est emparée du climat en Libye où Maâmar Kaddafi reste introuvable mais affirme qu’il y est.
Une situation qui vient, malgré le succès militaire, souligner la faiblesse et la dissension qui règnent au sein du mouvement rebelle libyen. Le président russe de la Fédération internationale des échecs (Fide), Kirsan Ilioumjinov, a déclaré hier que le dirigeant libyen Maâmmar Kaddafi lui avait dit qu’il se trouvait à Tripoli et n’avait pas l’intention de quitter la Libye. Ainsi, selon Kirsan Ilioumjinov, cité par l’agence Interfax, Kaddafi lui aurait déclaré par téléphone que «je suis vivant et en bonne santé. Je me trouve à Tripoli et je n’ai pas l’intention de quitter la Libye». Voici là une déclaration qui vient confortée celle faite quelques heures plus tôt par Seif El Islam Kaddafi qui avait soutenu que son père est toujours à Tripoli. Ce qui fera sans doute, si ces informations s’avéraient justes, à faire cesser les nombreuses spéculations et rumeurs qui vont bon train sur la question de savoir si oui ou non il a quitté la Libye. A ce sujet, l’Otan dit ignorer le lieu où se trouverait le colonel Kaddafi et affirme qu’il «n’est pas une cible de l’Otan». Néanmoins, l’Alliance reste persuadée que «la fin est proche pour le régime de Kaddafi, il s’agit du dernier chapitre».
Arrestation des fils Kaddafi, la gêne du CNT
Aussi, Seif El Islam Kaddafi annoncé avant-hier par le CNT libyen et confirmé par la Cour pénale internationale (CPI) comme arrêté et bientôt traduit devant la Cour pénale internationale, le fils du Guide libyen est réapparu libre devant les caméras de la presse étrangère essentiellement dans la soirée. «Je suis là pour balayer les rumeurs», leur a-t-il déclaré. En outre, il affirmera que Tripoli est «sous le contrôle» du régime, «que tout le monde soit rassuré. Tout va bien à Tripoli». Ce à quoi les principaux responsables politiques de la rébellion libyenne à Benghazi se refusent toujours à tout commentaire ni sur la liberté de Seif El Islam, encore moins sur l’évasion de Mohamed Kaddafi, le deuxième fils de Kaddadi annoncé avant-hier comme capturé par les rebelles. Pour sa part, la Cour pénale internationale (CPI), en réaction à cette guerre médiatique orchestrée par l’Occident en complicité avec certains médias arabes du Golfe, expliquera
qu’«après l’annonce de l’arrestation de Seif El-Islam, le fils de Maâmmar Kadhafi, nous avons été en contact avec le Conseil national de transition pour avoir la confirmation de l’arrestation, mais nous n’avons jamais eu de confirmation de la part du CNT», a déclaré Fadi El-Abdallah, le porte-parole de la CPI.
Ainsi, depuis son institution, il y a cinq mois, le CNT s’est présenté comme une institution capable d’apporter la démocratie, la concorde et la prospérité à la totalité du territoire libyen. Or voilà que la désinformation vient à son tour appuyer une division certaine des rebelles libyens. Concernant précisément le jugement de Kaddafi et de ses fils, les rebelles de Tripoli veulent que ces derniers soient jugés en Libye contrairement à leurs collègues de Benghazi qui eux ont donné leur feu vert pour que Kaddafi et ses fils soient jugés par la Cour pénale internationale de La Haye.
Ce qui dénote des problèmes de gouvernance quotidienne au sein de cette instance loin d’être unie et forte.
En outre, l’assassinat encore non élucidé du général Younès, début août, et pour lequel Moustapha Abdeldjalil n’a pu jusqu’ici donner aucune explication au cours de ses multiples conférences de presse, a été le coup de massue à la crédibilité de l’instance rebelle.
D’autres éléments viennent également démonter la profondeur de la faille dans les rangs du CNT libyen, en l’occurrence la discorde entre rebelles de l’Est et de l’Ouest, entre laïcs et islamistes.
Les combats font rage à Bab Al Aziziya
A Tripoli, les rebelles libyens ont pu pénétrer dans le QG de Maâmmar Kaddafi, selon Reuters, après deux jours de combats féroces contre les pro- Kaddafi. Les insurgés ont d’abord forcé la première entrée de l’enceinte du quartier général de Kaddafi après avoir intensifié un peu plus tôt leur attaque contre le complexe fortifié de Bab Al Aziziya, dans le centre-sud de Tripoli, qui abrite une caserne, la résidence privée du colonel Kaddafi et d’autres installations. Par ailleurs, les insurgés libyens ont affronté une colonne de l’armée régulière venant de Syrte, ville natale du colonel libyen, a rapporté hier la chaîne de télévision Al Arabia.
En outre, la chaîne annoncera que les rebelles ont tué des dizaines de soldats fidèles au colonel Kaddafi, sans pour autant préciser où l’affrontement a eu lieu. Sur un autre front, les insurgés ont pris le contrôle d’Ageila, dans l’est du pays, ainsi que du grand port pétrolier de Ras Lanouf, dans le golfe de Syrte, a rapporté la chaîne de télévision Al Jazeera. Précisant que les insurgés ont refoulé les troupes loyalistes dans les environs de la ville de Bin Djaouad, à une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de Ras Lanouf, et que les troupes kaddafistes battent en retraite vers Syrte, à l’ouest de Bin Djaouad.
L’Otan a confirmé hier avoir déployé des avions dans le ciel de Tripoli dans la nuit de lundi à mardi mais n’a pas précisé si ses frappes ont atteint le complexe où réside le Guide libyen. Aussi, la porte-parole de l’Otan indiquera que «nous ne pouvons baisser notre garde» face aux forces loyalistes au colonel Kaddafi qui continuent à représenter une menace pour la population civile. Ajoutant que «cette mission n’est pas terminée, le mandat (de l’ONU) demeure et l’Otan reste vigilante». En outre, selon l’Otan, les forces loyales à Kaddafi ont tiré avant-hier trois missiles Scud depuis les environs de Syrte, en direction de Misrata contrôlée par les rebelles.
Une réunion du Groupe de contact demain à Istanbul
Des diplomates de haut rang des pays membres du Groupe de contact sur la Libye se réuniront jeudi à Istanbul pour «coordonner les prochaines étapes», alors que Tripoli est en train de chuter, ont annoncé lundi les États-Unis. La réunion, décidée lundi matin lors d’une réunion téléphonique entre la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton et plusieurs de ses homologues, se tiendra au niveau des directeurs politiques, a indiqué Victoria Nuland, la porte-parole du département d’État. Par ailleurs, il est à noter que le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu est arrivé hier à Benghazi pour rencontrer le chef du Conseil national de transition libyen (CNT), Moustapha Abdeljalil
Les Etats-Unis inquiets pour les réserves militaires libyennes
Les Etats-Unis qui se sont félicités de la chute annoncée de Maâmmar Kaddafi, se disent inquiets du sort des stocks d’armes du régime en cas de vacance du pouvoir. A ce sujet, Mike Rogers, président républicain de la commission américaine du Renseignement à la Chambre des représentants déclarera que «nous devons particulièrement nous assurer que les réserves d’armes sophistiquées de Kaddafi, d’armes chimiques et d’explosifs ne tombent pas entre de mauvaises mains».
Juppé veut «rester vigilant»
Revenant sur la télévision française TF1 avant-hier soir sur les événements à Tripoli, Alain Juppé, ministre français des Affaires étrangères, a insisté pour dire que tout n’était pas fini, et qu’il fallait «rester vigilant». Il est également revenu sur l’implication de la France dans le conflit libyen, sans qui dira-t-il «rien n’aurait été possible», soulignant que les soldats français avaient pris «des risques mesurés». Estimant que les dépenses françaises impliquées dans ce conflits étaient nécessaires «lorsque nos valeurs, nos grands principes sont en jeu», a-t-il jugé.
La Chine : L’Occident doit «nettoyer»
Il est de la responsabilité de l’Occident de «nettoyer le désordre qu’il a mis» en Libye, où la rébellion a proclamé révolu le régime de Maâmmar Kaddafi après sa prise de contrôle de la majeure partie de Tripoli, a estimé hier la presse d’Etat chinoise. «Renverser le régime de Kaddafi représente un spectacle pour les médias, discuter de la reconstruction ne l’est pas», a souligné dans un éditorial le quotidien «Global Times». Le quotidien «China Daily» a, quant à lui, répété en écho les appels du gouvernement chinois à un retour à la «stabilité» en Libye, en insistant sur la nécessité de «restaurer la paix aussi vite que possible».
L’Iran «félicite» le peuple libyen
L’Iran a «félicité» hier le «peuple musulman libyen» après l’entrée des rebelles à Tripoli, bastion du régime de Maâmmar Kaddafi, en soulignant la nécessité de respecter les aspirations des peuples.
Madrid veut une résolution de l’ONU
L’Espagne demande «l’adoption le plus rapidement possible d’une nouvelle résolution» à l’ONU qui entérine «l’ère post-Kaddafi», ont annoncé avant-hier les ministres des Affaires étrangères Trinidad Jimenez et de la Défense Carme Chacon. Madrid «appuie une réunion du groupe de contact sur la Libye avec la participation des nouvelles autorités libyennes pour connaître leurs priorités et leur projets immédiats», ont ajouté les deux ministres dans un communiqué.
Le Maroc et la Grèce reconnaissent le CNT
Le Maroc a reconnu le Conseil national de transition (CNT) comme représentant légitime de la Libye et le ministre des Affaires étrangères du royaume, Taieb Fassi Fihri, va se rendre à Benghazi, pour remettre un message de soutien au peuple libyen de la part du roi Mohammed VI. Pour sa part, la Grèce a reconnu, elle aussi, le Conseil national de transition comme gouvernement légitime de la Libye et appelé le régime de Kaddafi à reconnaître sa défaite.
Par Lynda N. Bourebrab