Journée nationale des handicapés, Le principal handicap, l’oisiveté

Journée nationale des handicapés, Le principal handicap, l’oisiveté
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Combien sont-ils ceux et celles, qui ont des handicaps-moteurs et qui ont réussi à s’insérer pleinement dans la société, par le biais d’un emploi permanent et stable ?

Certainement pas beaucoup si l’on se réfère à leur nombre, qui est estimé à deux millions dans notre pays.



La Journée nationale des Handicapés, qui correspond au 14 mars de chaque année, nous renvoie continuellement à la arginalisation et la souffrance de cette frange de la population.

Car, en dépit des efforts consentis par les pouvoirs publics en direction de ces citoyens, que l’on désigne souvent par le terme «invalides», à l’exemple de l’existence de plusieurs centres régionaux de formation spécialisée pour les handicapés (Alger, Corso, Relizane, Laghouat, Skikda…), dispensant des formations pour permettre à cette catégorie sociale d’accéder à un métier décent et de se prendre en charge, cela demeure encore insuffisant, soit une goutte d’eau dans un océan.

Le handicapé est doublement marginalisé par rapport un quelqu’un de valide, en ce qui concerne l’accès à l’emploi. Même si ce dernier possède de meilleures références du point de vue compétences et savoir-faire ou plus de diplômes, il est toujours évalué selon son handicap-moteur.

Pourtant, le président de la République, l’année dernière, lors de la Journée national des Handicapés, avait exhorté Les employeurs et l’Etat, au premier chef, à faire plus d’efforts en matière de réservation de postes d’emploi.

Depuis plusieurs années, les handicapés avaient droit à une pension de l’ordre de 1.000 DA mensuellement, soit un peu plus de 33 DA par jour, à peine le prix d’un sachet de lait et d’une baguette de pain. Depuis, ce montant a été revalorisé pour atteindre la somme de 3.000 DA.

D’ailleurs, cette pension ne touche pas seulement les handicapés puisqu’elle concerne trois catégories de citoyens, à savoir les personnes âgées, qui n’ont pas de revenu, les invalides avec un handicap inférieur à 100 %, en plus des veuves, qui ont des enfants à charge et qui sont sans ressources.

Cependant, en l’absence de débouchés au niveau du marché du travail, un bon nombre d’entres eux ne sont pas restés les bras croisés et pris leur destin en main, du moins pour tenter d’assurer leur subsistance. Mais, c’est surtout pour tenter de se débarrasser de ce sentiment de culpabilité, qu’ils ressentent vis-à-vis de leurs familles, en tant que fardeau.

Pour la plupart des handicapés-moteurs, notamment pour ceux dont les membres supérieurs sont valides, c’est le commerce informel, qui vient en tête. C’est le cas de H. Aïssa, 34 ans, qui se déplace en chaise roulante et qui tient, depuis près de six années de suite, une table pour cigarettes, près d’une cafétéria en Ville nouvelle.

Il nous dira à ce propos : «Je suis l’aîné de la famille, qui compte six enfants, trois frères et deux sœurs. Mon père ne peut subvenir à toutes les dépenses de la maison et je l’aide en vendant des cigarettes, briquets, bonbons, piles et toutes sortes de petits bibelots pour fumeurs. Je ne suis pas riche mais cela me permet de me faire un peu d’argent et, surtout, de ne pas mourir d’ennui.»

Tout pour ne pas voir le temps passer

D’autres ont choisi le sport pour occuper leur journée. A. Sid-Ahmed, 41 ans, fait partie d’une équipe de basket-ball sur fauteuils roulants depuis presque une décennie. Il est devenu un spécialiste de cette discipline et a même joué avec la sélection nationale.

Il préside une association sportive pour garçons alors que son camarade B. Abdellali, un malvoyant, préside, lui, une équipe de filles, qui s’est spécialisée dans le goal-ball, un jeu pour malvoyants, qui consiste à se lancer un ballon (à clochette pour le bruit) entre deux équipes opposées avec des buts. «C’est grâce à une amie que j’ai pu intégrer cette association et ainsi participer à des matches interclubs à Oran.

Sinon, je m’ennuyais à la maison», dira H. Samia, 25 ans, non-voyante, qui dit être très contente de faire du sport, qui lui a permis de se sortir et de se faire beaucoup d’amies. Elle enchaînera : «Malheureusement, nous les filles, on ne trouve aucun emploi contrairement aux garçons, qui arrivent à se débrouiller tant bien que mal.

Une de mes copines, à force de vivre dans la précarité, n’a pas hésité à faire la manche et, croyez-moi, elle s’en sort plutôt bien. Mais, les femmes handicapées, et notamment les aveugles, sont-elles condamnées à seulement tendre la main pour mendier ? Ne peut-on pas nous apprendre un métier, dans l’artisanat par exemple par lequel on pourrait vivre ?»

Même les plus nantis financièrement rencontrent, cependant, des difficultés dans leur quotidien. L’exemple de B. Tadj, 46 ans, commerçant, est assez fréquent. Comme lui, plusieurs handicapés, qui ont des véhicules adaptés, ne trouvent pas de places réservées pour garer leurs véhicules.

Dans les administrations, banques, centres commerciaux, etc., il n’existe pratiquement pas de passages aménagés au niveau des entrées de ces structures. Et les exemples sont nombreux.

Le mal-vivre, qui touche la jeunesse algérienne et qui se traduit, chaque année, par le nombre surprenant de candidats à la «harga», nous renvoie à ce jeune handicapé, qui avait été intercepté parmi les «harraga», l’année passée.

Ce geste symbolise toute la détresse de cette frange de la population, que sont les handicapés. Et, aucune date, fût-elle le 14 mars, ne peut, à elle seule, suffire à changer le cours des choses.

SA Tidjani