Journée mondiale de la presse à Béjaia,Belhimer et Boumala font un tabac

Journée mondiale de la presse à Béjaia,Belhimer et Boumala font un tabac

Fidèles à leur réputation d’hommes qui ne mâchent pas leurs mots, Belhimer et Boumala se sont succédé à la tribune pour aborder la situation de la presse en Algérie.

La salle de conférences de la maison de la culture de Béjaïa s’est avérée trop exiguë pour contenir une foule nombreuse venue écouter deux grandes vedettes de la presse nationale, en l’occurrence le Dr en droit économique et non moins journaliste et chroniqueur au Soir d’Algérie, Amar Belhimer et le sociologue et journaliste Fodil Boumala, tous deux invités de l’association des journalistes et correspondants de presse de la wilaya de Béjaïa.

Cette association, initiatrice de ce rendez-vous de célébration de la Journée internationale de la liberté de la presse, placé sous le thème «La presse en Algérie, quelle évolution et quelle perspective?», a réussi le pari de réunir une panoplie de personnalités bien connues activant, aussi bien dans le domaine de la politique, que dans le mouvement associatif. Fidèles à leur réputation d’hommes qui ne mâchent pas leurs mots, Belhimer et Boumala se sont succédé à la tribune pour aborder la situation de la presse en Algérie.

Les difficultés du secteur

Si le premier conférencier s’est attardé sur les chiffres, démontrant la situation de la presse de notre pays, le deuxième s’est montré plus offensif à l’égard de tous les obstacles qui freinent l’évolution de la corporation.

Les pouvoirs politiques et financiers ont été clairement ciblés par Fodil Boumala pour situer les difficultés d’une presse à la hauteur des attentes citoyennes. Belhimer s’est longuement étalé sur le cadre juridique régissant la profession en mettant en exergue les points positifs et négatifs. «Nous pouvons dire qu’il y a toujours une faiblesse des médias dans le pays», a fait observer M.Amar Belhimer. «Ma conviction est que nous ne sommes pas encore arrivés à s’inscrire dans une action tel que le pourvoir s’exerce dans la médiation et le dialogue», estime le Pr Belhimer qui détaillera ensuite les mécanismes de régulation, d’évaluation et de notation des médias par des organismes étrangers tels que Reporters sans frontière (RSF) et le Baromètre africain d’évaluation des médias. Il est revenu sur le classement de l’Algérie en matière de liberté de la presse, faisant remarquer qu’elle a reculé de trois points cette année. Il parlera également de la note attribuée à l’Algérie en matière de professionnalisme qui est, dira-t-il, un peu au-dessus de la moyenne.

Se référant à ces organismes d’évaluation, il relèvera que la liberté de la presse en Algérie n’a pas évolué, mais plutôt régressé au regard des contre-coups qu’a subis la presse et les médias en général, en matière de couverture des champs économiques, sociaux et politiques, l’autocensure, le niveau d’expression, la parité femmes et hommes, l’impact de la publicité sur la ligne éditoriale, le monopole de la diffusion et la distribution, la diversité des sources d’information et d’expression, absence d’autorité de régulation, etc. Le professeur Belhimer suggérera la restauration des deux autorités de régulation, à savoir le Conseil supérieur de l’information et le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Fodil Boumala a, quant à lui, estimé que la presse nationale ou la profession doit être repensée sur de nouvelles bases en adéquation avec la réalité actuelle.

La presse aujourd’hui

Très percutant dans ses propos et commentaires, Boumala a brossé un large tableau de la situation du pays et des rapports de force dans la sphère dirigeante pour situer la presse aujourd’hui. Une presse qui tantôt se fait manipulatrice, tantôt objet de manipulation, mais qui, dans les deux cas, joue le jeu des décideurs. Fodil Boumala expliquera par la suite la mainmise du lobby financier sur les journaux dont, pour certains, le seul souci et de remplir les pages publicitaires, ne donnant que peu d’importance à la qualité du travail journalistique. Une pratique qui n’est fort heureusement pas généralisée même si les fonds publicitaires demeurent l’unique voie de salut pour la survie de tous les titres. Les deux conférenciers ont, par la suite, suscité un large débat au sein de l’assistance, composée de personnalités actives sur le terrain. Toutes les interventions ont été d’un niveau assez élevé. Autant les femmes que les hommes, le souci d’une presse libre et responsable est un impératif de l’heure.

La célébration a été marquée par la remise de distinctions symboliques aux familles des journalistes disparus de la région, dont Saïd Mekbel et Omar Ourthilane. Il est utile de préciser que dans la matinée, de nombreux journalistes et invités de l’association se sont recueillis sur la tombe de Saïd Mekbel au cimetière de la ville de Béjaïa. Un moment fort en émotion qui a permis aux présents d’évoquer le parcours de Masmar Djeha et tous les noms disparus de la presse nationale lors de la tragédie nationale. Un rendez-vous réussi pour l’association des journalistes correspondants de Béjaïa.