Des académiciens ont relevé l’absence d’un cadre légal régissant le secteur de la publicité et esquissé quelques pistes de rechange pour la recherche d’autres moyens de financement, notamment la publicité électronique, comme c’est le cas ailleurs dans le monde.
Nombre d’éditeurs de presse, d’académiciens et de journalistes tirent la sonnette d’alarme : le marché de la publicité étouffe sous l’effet des diverses pressions. Au monopole étatique instauré depuis 1993, pour trois mois seulement et qui s’éternise, de nouvelles formes de pression sont venues s’exercer sur les annonceurs privés afin de mettre au pas la presse indépendante.
Pris sous l’angle de la relation avec la liberté de la presse, les intervenants au Forum d’El Khabar ont relevé, d’emblée, que l’État utilise la manne publicitaire comme moyen de pression sur des journaux, selon le degré d’allégeance à l’égard du pouvoir, comme s’est employé à le démontrer le directeur de la publication d’El- Khabar, Chérif Rezki. Lui succédant, le sociologue Nacer Djabi, qui a, pour sa part, débuté par une note d’espoir, en mettant en exergue l’expérience pionnière de la presse indépendante algérienne, a estimé que “la question de la liberté d’expression est foncièrement politique et est liée au système politique complètement fermé, et qui plus est, est entré dans une crise, dont les conséquences ont déteint sur la presse”. Le chercheur ajoutera que “le pouvoir ne veut pas que la presse se développe parce qu’il repose sur l’hégémonie et la répression, non pas sur la persuasion” d’où, a-t-il souligné, “l’impression qu’il donne de vouloir se passer de la presse”.
Dans cette optique, le directeur d’El Watan, Omar Belhouchet, rappellera que si l’une des premières mesures du gouvernement Hamrouche, en octobre 1988, était la suppression du monopole de l’État sur la publicité, à partir de 1990, avec l’arrêt du processus électoral, il y a eu une autre orientation stratégique. “En 1993, Belaïd Abdeslam a rétabli le monopole sur la publicité pour 3 ans, mais cela dure jusqu’à aujourd’hui”, s’est-il insurgé, rappelant le projet de Rahabi devant mettre en place un cadre légal.
Mais “ce texte qui, bien qu’ayant été adopté par l’APN, a été refusé par le Sénat avec la venue de Bouteflika”. L’éditeur a, en outre, fait état d’une politique conçue au plus haut niveau de l’État, qui consiste en des pressions qu’exercerait le ministre de tutelle sur les annonceurs privés. Résultat : “Entre mai et décembre 2014, nous avons perdu 50% de nos recettes publicitaires, suivant lesquelles, nous avons été obligés de faire des coupes et de retarder nos projets d’investissement”, dira Belhouchet.
Le directeur de Liberté, Abrous Outoudert, a rappelé, lui, les pressions qu’a connues la publication, notamment durant la campagne pour la dernière élection présidentielle, lorsqu’un directeur de campagne a appelé les entreprises à ne pas accorder de publicité au journal. À chaque échéance électorale, ils nous trouvaient des moyens de pression : fisc, Sécurité sociale et paiement des dettes d’imprimerie, a-t-il indiqué. Et d’autres moyens de pression, dont l’instrumentalisation de la justice et l’emprisonnement des journalistes, sur lesquels s’est attardé, d’ailleurs, le juriste Khaled Bourayou.
Des académiciens ont, pour leur part, relevé l’absence d’un cadre légal régissant le secteur de la publicité et esquissé quelques pistes de rechange pour la recherche d’autres moyens de financement, notamment la publicité électronique, comme c’est le cas ailleurs dans le monde.
Enfin, les présents ont conclu à la nécessité d’engager une réflexion sur les moyens de porter la question du monopole d’État sur la publicité devant les instances judiciaires nationales ou internationales.
A. R.