Journée internationale de Lutte contre le sida – Temoignage d’un sideen : «J’appréhende le regard des autres»

Journée internationale de Lutte contre le sida – Temoignage d’un sideen : «J’appréhende le regard des autres»

Ses yeux fuient tous les regards. Ses frêles épaules n’arrivent plus à supporter son poids déjà rongé par la maladie. Lui c’est A. Amar, environ la quarantaine, malade du Sida depuis 6 années. Il vient régulièrement de l’intérieur du pays faire son contrôle médical.

Aujourd’hui, malheureusement, le professeur chez qui il est suivi est en séminaire, mais le personnel soignant est sur place pour la prise en charge. Il ne sait pas comment il a contracté cette maladie. Son état s’est empiré depuis 2004. Il raconte qu’il a fait beaucoup de fièvre et à chaque fois le médecin de l’Etablissement hospitalier de proximité (EHP) de sa ville lui prescrivait de l’aspirine et des antalgiques.

Son épouse, voyant son état se détériorer, lui a suggéré d’aller voir carrément un CHU d’Alger où il y a beaucoup de spécialistes. Amar se fait accompagner par un cousin. «Le trajet a été si long que j’ai failli perdre connaissance en cours de route», a-t-il raconté. Arrivé à l’hôpital Mustapha, muni d’une lettre de recommandation, des examens complémentaires lui ont été demandés. Mais les résultats ne révèlent rien d’anormal alors que la fièvre oscillait entre 39 et 40 degrés.

Un médecin urgentiste l’oriente vers l’Etablissement hospitalier spécialisé (EHS) d’El-Kettar. Arrivé sur place, plusieurs prélèvements de sang lui ont été effectués. Quelques jours après, les résultats sont tombés tel un couperet. Amar a le Sida. «Au début, je ne comprenais pas ce que c’était», a-t-il indiqué. C’est grâce aux associations qui viennent à l’hôpital et qui parlent de ce phénomène que j’ai compris que cette maladie peut mener à la mort et peut faire des ravages aussi bien au sein de la famille que les autres personnes. «J’ai honte», dit-il. « Je n’ose pas parler autour de moi de peur des ragots et de la rumeur qui s’avèrent plus néfaste que la maladie elle-même. « Je suis analphabète et mon épouse aussi ». Mes enfants, je veux les protéger car là où j’habite c’est un petit village et le moindre événement est relayé de bouche à oreille comme l’éclair. Lorsque je descends sur Alger pour le contrôle et ramener les médicaments, je dis à ma famille que c’est pour le commerce.

Lorsqu’il a été hospitalisé, il y a 6 ans, son épouse, qui ne sait rien du Sida et son mode de transmission, a raconté à la famille qu’il s’est fait opérer de l’hernie. Sa maladie est tenue secrète et personne au sein de sa famille n’est au courant. «Mis à part les professionnels de la santé, personne ne parle franchement de cette maladie honteuse», a-t-il souligné.

Depuis 6 ans, Amar, à l’instar des autres malades hospitalisés ou non est pris en charge dans le service du PR Amara de l’EHS El Hadi Flici. Il vient régulièrement faire ses contrôles médicaux et prendre les médicaments, les anti-retroviraux. «Le trajet est éprouvant», a-t-il indiqué. Pour preuve, le mauvais temps a contraint le chauffeur du bus à ralentir. Conséquence, Amar est arrivé tard dans la nuit d’avant-hier. N’ayant pu récupérer, il ne voulait pas rater son contrôle régulier. Les traits tirés, les cernes violacés, il doit attendre son tour pour être examiné. Le soir même, il reprendra, peut-être le même bus pour regagner son village. Amar, comme les autres malades suit la trithérapie, une médication fiable en attendant le vaccin salvateur.