S’il a essayé de véhiculer à l’extérieur l’image d’un parti fort, le président du MSP, M. Bouguerra Soltani, a caché mal l’état piteux dans lequel se trouve la «confrérie» depuis son éviction du gouvernement.
Lors de son point de presse animé juste après l’annonce des taux de participation arrêtés à midi, ses traits dégageaient plutôt la panique qui, pour la contenir en montant à l’estrade, M. Bouguerra a lâché des mots qui disent long sur son état d’esprit : «Hamas el kaouiya (la forte Hamas ! ndlr)». La «confrérie» dispose d’un électorat discipliné et l’abstention l’arrange mieux que n’importe quel parti, même si elle est affaiblie du fait des dissidences qui se sont multipliées ces dernières années.
Les va-et-vient habituels au siège national du parti dans pareilles occasions ont cessé par cette journée glaciale du scrutin et Bouguerra Soltani ou Aboudjerra comme il aime être désigné, s’est retrouvé seul, ou presque. A l’exception de Farouk Tifour, actuel chargé de communication du ministère du Commerce et Sid- Ahmed Boulil, ministre des Transports du gouvernement de Smaïl Hamdani qui supervisaient les fonctionnaires du parti chargés du suivi de l’opération électorale, aucun nom marqué du Mouvement des frères musulmans n’était là ce jeudi 29 novembre. Et avant l’arrivée de Bouguerra vers les coups de midi, le siège national du parti ne donnait même pas l’impression que le parti a présenté des candidats dans 700 communes. Bref, le taux de participation avait quadruplé en deux heures.
De près de 4% à 10 h, il a grimpé à un peu plus de 14% vers 12 h. «Nous espérons que le taux de participation ne soit pas dopé d’ici la fermeture des bureaux, parce que les citoyens n’iront pas voter», a-t-il dit d’emblée. Et d’expliquer cette hausse : «C’est un véritable débarquement des forces armées qui a eu lieu ce matin ! Les militaires ont été envoyés par bus entiers aux bureaux de vote à Biskra, à Tindouf, à Laghouat, à Béchar, et à Jijel…». Mais, répliquet-on, nous n’avons pas l’armée de la Chine populaire M. Bouguerra, et le vote des corps constitués n’influera pas vraiment sur le cours des élections ? «Si !», a insisté le président du MSP. «Les Algériens ne croient plus en l’acte de voter et les élections se réduisent en un face-à-face entre les voix militantes et les voix des corps constitués. Et, aussi peu qu’elles soient, les voix des militaires pèsent dans la balance», a-t-il établi.
«Nous avons revu nos ambitions à la baisse pour exprimer notre bonne foi aux décideurs !»
En criant à la fraude, Aboudjerra a anticipé sur une éventuelle débâcle : «Le dopage du taux de participation suscite notre suspicion. » Et de jouer le réconciliateur pour solliciter un quota : «D’habitude, nous nous présentons dans au moins 1 200 communes. On nous a dit, vous, les islamistes, vous nous faites peur. Nous avons ainsi revu nos ambitions à la baisse en n’entrant en lice que dans 700 communes et ce, pour leur exprimer notre bonne foi…».
«Qui vous a dit cela M. Bouguerra et à qui vous avez exprimé votre bonne foi ?!» «Les décideurs ! Ceux qui font la pluie et le beau temps, ceux qui agréent les journaux et leur retirent les agréments, ceux qui distribuent de la publicité…», a-t-il répondu. «Qui ? Le DRS ?», se demande-t-on. «Je ne connais pas leurs noms moi, je ne les connais pas ! Je ne vois que leur ombre s’exprimer… partout !», a-t-il répliqué. En guise de conclusion, le président du MSP, «devenu cohérent après le départ des prétentieux», a estimé que cette joute électorale doit être évaluée à l’aune des réformes engagées par Bouteflika : «C’est un échec !» «Les treize lois promulguées depuis le discours du 15 avril 2011 au titre des réformes promises n’ont pas réussi à redonner confiance aux citoyens. Au contraire de l’abstention des votants, on parle désormais de l’abstention des militants à se porter candidats aux élections. Tellement les prérogatives des élus ont été réduites à rien», a-t-il tranché.
L. H.