On mange à peine et on dort très peu
Cette ambiance est insensée et le comportement de presque toute la société est irresponsable.
Une ambiance funèbre est imposée par les jeûneurs. Tout est calme, rien ne bouge à part quelques très rares commerces qui activent, quelques véhicules qui circulent, c’est à se demander si la ville n’a pas été dépeuplée par un phénomène surnaturel.
On s’enferme chez soi à cause de la chaleur, pourtant, il y a ceux qui se lèvent tôt et vont au travail pour accomplir leurs devoirs. Ceux-là aussi jeûnent pourtant. Le climat est lourd et invivable au cinquième jour du Ramadhan et ça influe directement sur le moral. Du coup on est découragé. Cette ambiance est insensée et le comportement de presque toute la société est irresponsable.
Certes, cette année, le Ramadhan se déroule en plein été. Les journées sont longues et les nuits trop courtes. On mange à peine, on dort très peu, mais cela n’a nullement empêché les plus loyaux à accomplir leur rôle. On n’est pas meilleur que ces milliers de soldats qui veillent à la sécurité de l’Etat, matin et soir, que ce pompier mobilisé 24h/24, que ce policier dans la rue sous un soleil de plomb et cet agent à rester debout pendant des heures pour sécuriser la route aux automobilistes et aux piétons au passage du tramway, exposé à une chaleur qui dépasse souvent les 35 degrés.
On n’est pas meilleur que ce médecin de garde ou ces ouvriers dans les chantiers. «A quoi me servirait de jeûner si je suis dans le lit toute la journée, ça n’a aucun sens de pratiquer le jeûne à ce rythme», pense ce jeune de 29 ans. Un autre aborde le même sujet: «Je me lève tous les jours à 6 heures 30, je vais au travail comme à mon habitude et je dois m’estimer heureux de travailler dans une administration, loin de la chaleur, contrairement à ces policiers, ces gendarmes et ces militaires ou encore ces pompiers appelés parfois à intervenir pour éteindre le feu.»
Un taxieur questionné à ce même sujet dira: «Je n’ai rien changé dans mes habitudes, je commence à travailler tôt. Je rentre à la maison dans l’après-midi, sans le travail, je ne pourrai pas sentir le plaisir du Ramadhan, c’est une chance pour se remettre en cause, se rattraper et pour moi, bien accomplir son devoir.» Mais beaucoup n’aiment pas cette façon de voir les choses.
Un de ceux-là souligne: «Non je n’aime pas travailler durant le mois de Ramadhan, pourtant je le dois. Je deviens insupportable, ou peut-être que c’est moi qui ne supporte pas les autres. En tout cas, je suis de mauvaise humeur.» Ce qui est remarquable surtout, c’est cette baisse dans la circulation, mais aussi ces commerces fermés.
C’est cette ambiance qui règne à Constantine depuis le premier jour du mois de Ramadhan. Les gens sont sans ambition, ils se cachent en attendant le ftour! C’est la complaisance spontanée des plus faibles.