Jadis blanche et joyeuse, aujourd’hui grise et morose ,Alger : il faut la réinventer

Jadis blanche et joyeuse, aujourd’hui grise et morose ,Alger : il faut la réinventer
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La capitale a perdu son lustre d’antan et se vautre aujourd’hui dans le statut d’une ville complètement dégradée. Insalubrité, manque d’infrastructures et de lieux de détente pour familles, pollution, etc. sont les maux dont elle souffre. Un jour peut-être…

Dans le désert du centre-ville de la capitale ne s’observent plus que les barrages de police qui contrôlent les automobilistes. La terreur des années noires, des voitures piégées dans la rue, des bombes aux entrées de cinéma est loin derrière. L’espace de loisir se confond peu à peu avec l’espace domestique. Aux balcons, les paraboles ont fleuri.



Certes, les gargotes continuent d’animer les quartiers du centre, de Bab el-Oued, de Belcourt. Mais à mesure que la nuit tombe, ne restent ouverts que les grands hôtels et les clubs sélects des quartiers chic.

A Sidi Yahia, en contrebas de la commune d’Hydra, s’égrènent, le long de la rue, les magasins de grandes enseignes et les auvents de cafés en vogue où garçons et filles peuvent se retrouver — les terrasses du centre-ville et des quartiers populaire sont, elles, presque exclusivement masculines. L’initiative privée a métamorphosé ce fond d’oued qui, il y a peu, n’accueillait que quelques maisons. Sidi Yahia est ainsi devenu l’un des lieux de rendez-vous favoris de la jeunesse dorée. Les quartiers populaires, eux, sont laissés à l’abandon.

Inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco en 1992, la Casbah, le cœur historique d’Alger, tombe en ruine. Les immeubles disparaissent, remplacés par des tas de gravats. Des échafaudages, des poutres métalliques, des armatures en bois soutiennent les murs fissurés.

Alors que tout avait été pensé pour soustraire au regard des voisins et passants le cheminement intime des journées en famille, les murs éventrés de certaines maisons constituent une percée obscène. Faïences brisées, boiseries arrachées : le délabrement des patios laisse entrevoir l’ampleur du désastre. Nul ne s’aventure dans ce labyrinthe d’escaliers et de ruelles. Pour beaucoup d’Algérois, la Casbah est une terra incognita. La Casbah est devenue un sas où l’on vit quelque temps avant de trouver autre chose ailleurs. Une partie des nouveaux habitants saccagent leurs domiciles pour bénéficier de procédures de relogement. Le dégât des eaux est une technique couramment utilisée.

D’après certains membres de la Fondation Casbah, une association qui tente de restaurer le patrimoine de ce quartier, «trois cent cinquante maisons auraient ainsi été détruites. Hormis la réhabilitation de quelques bâtiments comme le palais de Mustapha Pacha, les autorités laissent faire».

Pour les habitants comme pour les gens de passage, Alger, pourtant, c’est ici, place des Martyrs, dans la Basse Casbah. Comment expliquer qu’aucun ne lui accorde aucune valeur ? La Casbah qui a trouvé sa place dans le champ de l’histoire nationale, se voit oubliée.

Rabah Khazini