Italie : L’enquête sur le meurtre du juge Borsellino relancée

Italie : L’enquête sur le meurtre du juge Borsellino relancée

De nouvelles déclarations sont venues semer le trouble sur l’un des meurtres les plus emblématiques de la mafia sicilienne.

Salvatore Candura, condamné pour le vol de la voiture ayant servi à assassiner en 1992 le juge antimafia Paolo Borsellino, a accusé mercredi les policiers de l’avoir « poussé à faire de fausses déclarations ».

Des propos pris très au sérieux par la justice italienne, car ce sont essentiellement les déclarations de Candura qui ont permis – un an après l’attentat – de faire tomber l’ex-boss de la mafia sicilienne Toto Riina pour le meurtre de Borsellino.

Ces déclarations tombent aussi à pic, puisqu’un autre membre de Cosa Nostra, Gaspare Spatuzza, s’est accusé lui-même du vol de cette voiture.

Un aveu apparemment crédible, puisque étayé de nombreux détails précis sur le mode opératoire.

Ce fut d’ailleurs l’élément principal qui permit la réouverture de l’enquête sur l’assassinat du magistrat il y a plusieurs mois.

La thèse d’une intervention de l’État italien dans le meurtre de Paolo Borsellino a donc émergé ces dernières semaines.

Une thèse défendue par Toto Riina. L’ex-parrain, qui avait jusqu’ici toujours refusé de parler aux enquêteurs, a décidé de rompre son silence, à la surprise générale.

« Ce sont eux qui l’ont tué, je suis fatigué de servir de bouc émissaire », a lâché Toto Riina par l’intermédiaire de son avocat.

Selon lui, des tractations auraient eu lieu entre l’État et la mafia à la fin des années 1980 pour faire cesser la vague d’attentats sanglants de Cosa Nostra en échange d’un assouplissement du régime carcéral réservé aux mafiosi.

L’une des hypothèses avancées est que Borsellino s’opposait à ces négociations et aurait donc été assassiné.

Jusqu’ici aucun élément concret de l’enquête n’abondait dans ce sens.

De nombreuses interrogations

Alors qui croire ? « Les noms de deux ou trois policiers qui faisaient partie du groupe d’enquêteurs sur les assassinats Borsellino-Falcone ont déjà été inscrits sur le registre des personnes placées sous enquête », confirme mercredi le Corriere della Sera.

Les magistrats leur reprocheraient d’avoir manipulé l’enquête sur les assassinats…

Mais face à cette thèse « grave et inquiétante », le journal appelle à la prudence.

« L’autre hypothèse reste ouverte », explique le quotidien italien.

« Candura s’accuse peut-être pour détourner l’attention » et éviter que la justice n’enquête sur des « mafiosi d’un tout autre profil ».

En tout état de cause, le plus grand flou règne toujours sur l’assassinat de Borsellino advenu le 19 juillet 1992, moins de deux mois après le meurtre d’un autre juge antimafia emblématique, Giovanni Falcone.

Les deux magistrats payaient ainsi de leur vie leur lutte acharnée contre la criminalité organisée.

Tous deux avaient notamment instruit le spectaculaire « maxi-procès » de la fin des années 1980 contre des dirigeants de Cosa Nostra.

En résumé, explique le Corriere della Sera , « il y a donc l’enquête sur le meurtre de Borsellino, et l’enquête sur l’enquête du meurtre de Borsellino ». Et toujours beaucoup de questions.