Italie, La chute d’El Cavaliere

Italie, La chute d’El Cavaliere

Berlusconi livre-t-il sa dernière bataille ? Poussé dans ses derniers retranchements, El Cavaliere a été complètement désarçonné par le « oui » massif (235 sur 307 présents) du Parlement qui a osé dire « non » au pouvoir tissé tout au long des 20 années de pratique politique de Silvio Berlusconi, convaincu, encore une fois, que « je ne meurs pas, même s’ils me tuent ».

La messe est dite. Le ralliement in extremis de Berlusconi au camp du « oui » vaut tout un programme. « Tout un monde s’écroule », affirmait sentencieusement La Repubblica.

Car, par delà l’arbitrage en faveur de la reconduction de la coalition gauche-droite, conduite par le président du Conseil, Enrico Letta, le système Berlusconi a perdu la centralité du « point d’équilibre » dont il se prévaut. Qui plus est, lâché par ses fidèles lieutenants, il a été fragilisé et emporté par la vague montante de la rébellion menée par son bras droit, le ministre de l’Intérieur, Angelino Alfano, et soutenu par le sénateur, Carlo Giovanardi.

Le verdict final a conforté la descente aux enfers de l’ancien président du Conseil italien, en rupture de ban avec sa propre formation. « C’est Spartacus et la révolte des esclaves », tonne Il Fatto Quotidiano (gauche) pour signifier le large mouvement de défection des Berlusconnistes. Plus de 70 bons et loyaux « fidèles » au Parlement (1/4 au parti). Ce qui a fait dire au journaliste, Gianni Riotta, de La Stampa, que « Rome assiste à l’acte final de l’histoire politique de Silvio Berlusconi ».

L’ère d’être « Berlusconien autrement » a sonné l’heure de la révolution dans le Parti du peuple et de la liberté (PDL) qui passe le témoin aux frondeurs. Face à la thèse du chaos d’El Cavaliere, la plaidoirie de Letta, qui a osé lui dire « non », a séduit. Dans son réquisitoire, mettant en garde contre le risque fatal d’effondrement, le chef du gouvernement italien a joué sur le registre du fonctionnement démocratique de l’Etat et de la stabilité érigée en « valeur absolue » dans un pays qui a consommé 14 gouvernements lorsque l’Allemagne a connu, pendant la même période, seulement 3 chanceliers.

Le coup de grâce a été porté contre la violation systématique du principe de séparation des pouvoirs qui appellent, désormais, au respect et à l’application des décisions de justice dissociées de la politique, dans une allusion claire aux démêlés judicaires d’El Cavaliere. Condamné à un an de prison pour fraude fiscale, Berlusconi, qui redoute de perdre, à la mi-octobre, son siège de sénateur qui lui garantit l’immunité parlementaire, passera-t-il, cette fois-ci, à la trappe judiciaire ? La voie de la gouvernance, avec « une majorité différente », est toute tracée pour concrétiser les « objectifs fixés » en matière de relance de la croissance économique, d’investissements, de la réforme électorale et de la réduction de la fiscalité sur le travail.

Dans ce climat de « regain de confiance pour l’Italie et l’ensemble de la zone euro », vantée par Christian Schulz, de la banque Berenberg, les priorités de la présidence de l’Union européenne, que l’Italie assurera, à compter du deuxième semestre 2014, seront centrées sur « la croissance et l’emploi après une décennie d’austérité ». Fini le cauchemar italien ? « La crise est derrière nous », a martelé le chef de la coalition gouvernementale qui a dressé un bilan plutôt satisfaisant et promis de rajouter, en 2014, un point supplémentaire au rythme de croissance.

Larbi Chaabouni