Profondément divisé et discrédité par ses valses-hésitations de la semaine dernière, le Parti Démocrate (gauche), arrivé en tête aux élections de février, devrait proposer le nom d’un chef de gouvernement au président.
Le président Giorgio Napolitano, 87 ans, a rempilé hier à la tête de l’Italie, avec la tâche de rebâtir la confiance sur les ruines d’une classe politique en miettes, incapable de s’entendre pour sortir la troisième économie de la zone euro de la crise. «Un gouvernement politique avec de fortes composantes techniques à mettre en place le plus rapidement possible»: c’est la solution pragmatique à laquelle, selon le quotidien La Stampa, travaille le vieux chef de l’Etat, en qui les partis politiques à la débandade ont mis toute leur confiance.
La prestation de serment et le discours d’investiture de M.Napolitano (dans l’après-midi d’hier) devant les chambres réunies devait se dérouler dans la plus grande sobriété, sans les coups de canon d’usage. Profondément divisé et discrédité par ses valses hésitations de la semaine dernière, le Parti Démocrate (PD, gauche), arrivé en tête aux élections de février, devrait proposer le nom d’un chef de gouvernement potentiel au président. Le nom le plus cité est celui de l’ancien président du Conseil Giuliano Amato, un démocrate de centre-gauche très modéré, surnommé «docteur subtil». Homme respecté dans le pays, même s’il a une image un peu terne, il figure parmi les favoris, selon le principal quotidien Corriere della Sera. Giuliano Amato, 74 ans, avait déjà dirigé l’Italie à une autre époque délicate, celle de l’enquête «Mains propres» en 1992/93, qui avait balayé l’ancienne classe politique accusée de corruption. Puis il avait de nouveau dirigé l’Italie en 2000/2001. Un autre nom cité est celui d’un des vice-secrétaires du PD, Enrico Letta. Le Peuple de la liberté (PDL), le centre droit de Silvio Berlusconi et «Cinque Stelle», le mouvement anti-partis de l’ancien comédien Beppe Grillo, dont les scores ont talonné ceux du PD, ne rendent pas la tâche de formation d’un gouvernement facile, pour des raisons diamétralement opposées. Pour le premier, tout candidat trop marqué à gauche et hostile aux intérêts du Cavaliere, serait à abattre; pour le second, aucun candidat représentatif de la vieille classe politique n’est recevable. Le quotidien économique Il Sole 24 Ore faisait hier trois recommandations au futur gouvernement, sur lesquelles dit-il, il y a une «ample convergence» et sur lesquelles M.Napolitano devrait mettre l’accent: le paiement des dettes des administrations publiques aux entreprises, l’emploi et la fiscalité. La bourse de Milan a réagi positivement à la réélection de Giorgio Napolitano, ouvrant la semaine par une hausse marquée de 1,73%, tandis que le «spread», qui marque la différence entre les taux d’emprunt italiens et allemands, s’établissait à un taux rassurant de 288 points. Mais le malaise social persiste dans un pays enfoncé dans la récession: selon l’institut national de statistiques Istat, 955 000 familles italiennes sont sans revenus, avec tous leurs membres en âge d’exercer une profession à la recherche d’un emploi. Et la désillusion politique reste forte, comme en témoigne la mobilisation des partisans de Beppe Grillo. Ce dernier a qualifié dimanche à Rome la réélection du président Napolitano de «petit coup institutionnel rusé» des partis traditionnels, après avoir parlé la veille d’ «un coup d’Etat». «Le Parlement est une coquille vide», et le gouvernement qui sera bientôt formé «ne va pas durer plus d’un an, peut-être huit mois», a prédit l’ancien comique. Pour le Corriere della Sera, «les vacances de la réalité sont finies. Le nouveau gouvernement, qui que soit celui qui le guidera, devra donner une réponse rapide et concrète aux problèmes du pays, ou alors Grillo le submergera».