Islamisme en Algérie “Une rupture associée à une modernité déformée

Islamisme en Algérie “Une rupture associée à une modernité déformée

C’est ainsi que le phénomène est défini par Fethi Gherras, porte-parole du MDS, lors d’une conférence.

Cette question était au centre du débat organisé, hier, par le Rassemblement de gauche, à Alger, au siège du Mouvement démocratique et social (MDS). Pour Fethi Gherras, porte-parole de cette formation et animateur de la rencontre, l’islamisme est “dans la logique de l’extrême droite européenne”, ayant ses “influences” et même ses “références”. “Le nationalisme et l’islamisme ont presque une même matrice, aujourd’hui”, a-t-il déclaré. Ce qui expliquerait “le compromis” entre ces deux tendances.

L’intervenant a, en outre, révélé que l’islamisme n’est pas un nouveau phénomène, rappelant que celui-ci figurait dans les plans des Britanniques, déjà au début des années 1910, comme “un moyen pour l’émiettement du Moyen-Orient”. Pourtant, a-t-il poursuivi, “l’islam politique est le symptôme d’un phénomène qui n’a pas abouti, un phénomène qui a pour noms la modernité et la citoyenneté”. Plus, Gherras a observé que l’islamisme s’est répandu dans les villes, “là où il y a rupture avec le monde ancien”, en notant dans le même temps qu’il s’agit d’une “rupture qui reste dans un nouveau inabouti car elle n’a pas apporté la modernité”, sinon qu’elle s’est associée à “une modernité déformée”.

Dans son analyse sur l’islam politique en Algérie, il signalera l’existence de différents salafismes : le “salafisme réformiste” représenté par les héritiers de l’Association des oulémas, le “salafisme wahhabite” incarné par l’ex-FIS, l’islamisme “au sens des Frères musulmans” symbolisé par le parti Hamas, puis le MSP et par le courant représenté par Abdellah Djaballah et, enfin, la tendance El-Djaza’ra menée, notamment, par Rabah Kébir et Abdelkader Hachani.

Plus loin, l’orateur a annoncé que le wahhabisme, ancien “mouvement purement religieux”, et le salafisme, ex-“mouvement réformiste”, ont tous deux été politisés. “Aujourd’hui, le rapport entre l’islamisme et le pouvoir a connu une mutation”, a énoncé le conférencier, avant de repasser en revue “les 4 phases” par lesquelles est passé l’islamisme en Algérie. Selon lui, la première phase, ayant commencé à l’Indépendance du pays, se distingue par “l’affrontement entre le pouvoir et les islamistes”. La période suivante s’est différenciée, quant à elle, à travers “une lune de miel” entre les deux parties. La phase allant de la fin des années 1980 au début des années 1990 a vu “une confrontation entre le pouvoir et le FIS, accompagnée par la recherche d’un compromis avec le courant des Frères musulmans, incarné par Hamas de Mahfoud Nahnah”. “Actuellement, nous sommes dans la phase du compromis pouvoir-islamistes et de l’émiettement du mouvement islamiste”, a souligné Gherras.

Comment ce dernier perçoit-il alors l’avenir immédiat ? Loin de surprendre l’assistance, sa réponse suscitera d’autres développements. En effet, le porte-parole du MDS a dressé 3 scénarios : l’un se rapprochant du cas tunisien (chute du pouvoir algérien et retour en force d’un islamisme forcé de tenir compte des rapports de forces internationaux), l’autre désignant l’émergence d’une “troisième force menée par des forces démocratiques et progressiste” (rupture d’avec le pouvoir et les islamistes) et le dernier cas de figure se rapportant à la situation actuelle où “le pouvoir cherche à phagocyter l’islamisme, voire à l’atomiser, avec l’objectif de l’inscrire dans son agenda réformiste”. Lors du débat, le conférencier a précisé que l’islamisme, en Algérie, est porté par “les forces représentant l’import-import et la rente”.

De leur côté, les organisateurs ont insisté sur le fait que le phénomène islamiste est “une question importante”. “Tant que la société n’aura pas tranché cette question, il nous faut poursuivre la réflexion pour voir comment nous en sortir”, a déclaré l’un d’eux.

Ce dernier a aussi tenu à faire remarquer que l’islamisme est “un problème de société et non pas de pouvoir”, tout en appelant à ne pas confondre ce phénomène avec l’islam.

H A