La fuite des terroristes de Daech de la Syrie suscite les craintes des pays du Maghreb. Les frappes aériennes des Etats-Unis risquent de pousser les terroristes ciblés à se trouver refuge en Algérie, en Tunisie et en Egypte. Les trois pays ont renforcé le contrôle militaire de leurs frontières. Une réunion est prévue entre eux prochainement pour décider de la marche à suivre face à cette menace.
« L’Etat Islamique a perdu 40% des terres qu’il contrôlait en Irak. Les Etats-Unis poursuivront partout dans le monde les terroristes de l’Etat Islamique et les frappes aériennes menées la semaine passée en Libye en sont une preuve » c’est ce qu’a déclaré hier le président américain, Barack Obama, lors d’une conférence de presse à Washington. Le président américain est en train de justifier l’intervention militaire décidée par son pays pour contrer le terrorisme là où il se trouve dans le monde. Une déclaration qui confirme la grande pression que l’organisation terroriste internationale Daech subiet actuellement en Moyen-Orient et qui, par conséquent, va pousser ses éléments à « déménager » d’Irak et aller vers d’autres terres plus sûres, notamment la Libye.
C’est dans ce pays maghrébin que le grand enjeu est en train de se dérouler. Ici, les récentes frappes aériennes menées par l’armée de l’air américaine confirment que le prochain combat contre Daech, va se dérouler en Libye. Qui dit Libye dit le Grand Maghreb. Du coup, les pays de la région se sentent menacés par cette prochaine « guerre ». L’Algérie, comme la Tunisie et l’Egypte, ont fait des déclarations suite à l’intervention étrangère en Libye. Bien entendu, les pays cités sont hostiles aux frappes aériennes chirurgicales qui, selon les pays du Maghreb, ne mènent à rien sauf à de nouveaux désastres pour la région. Des massacres de civils, l’exode en masse de la population, la baisse des économies des pays de la région et surtout de l’émergence du terrorisme qui va se propager, telles sont les conséquences qui vont résulter si les bombardements continuent en Libye. Pour les Etats-Unis tout comme leurs alliés européens, ces frappes vont amoindrir la capacité de nuisance de l’Etat Islamique qui est présente dans les deux villes libyennes, Derna et Syrte. Toutefois, cette hypothèse paraît fausse dans la mesure où les exemples en Irak, au Yémen et en Syrie ont démontré l’autre triste réalité. Ici, les capacités des groupes terroristes se sont agrandies suite à des frappes aériennes des forces de la coalition. Ainsi, sentant le danger arriver à grands pas, l’Algérie et la Tunisie ont décidé de se réunir en mars prochain pour débattre la situation « urgente » et menaçante venant de la Libye. L’Egypte est également concernée par d’autres réunions prévues entre les trois pays, du moment qu’ils ont tous des frontières avec la Libye. Les frontières représentent la voie de repli qu’emprunteront les groupes terroristes affiliés à l’organisation de l’État islamique en cas d’intervention militaire étrangère en Libye. Les ministres des Affaires étrangères de Tunisie, Khemaies Jhinaoui, et d’Algérie, Ramtane Lamamra, se sont une nouvelle fois rencontrés lundi dernier à Alger, et ont mis en garde les Occidentaux sur le chaos inévitable que susciterait cette intervention militaire, estimant que cette solution n’est pas la meilleure pour stopper une guerre civile dévastatrice depuis 2011 et le renversement de Mouammar Kadhafi.
3 000 terroristes de Daech ont fui la Syrie pour la Libye
Les frappes aériennes menées par la Russie et la Coalition contre les organisations terroristes en Syrie, dont Daech, ont provoqué la fuite de milliers de terroristes vers des pays de la région, dont la Jordanie et la Turquie. Le but de ces terroristes qui fuient les raids américains et russes n’étant pas de s’installer en Jordanie ou en Turquie, mais de rejoindre les territoires occupés par Daech, ailleurs.
La Libye est l’un des pays où Daech et Al Qaida occupent des territoires. Des observateurs avertis de la scène sécuritaire n’écartent pas l’éventualité que ces terroristes qui fuient en masse la Syrie se dirigent vers la Libye. Cette hypothèse est réaliste quand on sait que des milliers parmi les terroristes en Syrie et en Irak sont originaires de la Libye et de la Tunisie. « Ces terroristes qui fuient la Syrie pourraient être tentés de revenir dans la région et renforcer les effectifs de Daech et d’Al Qaida en Libye et dans la région », expliquent des sources sécuritaires. Quelque 3 000 éléments terroriste, faisant partie des groupes Daech, le Front Al-Nosra (affilié à Al Qaida) et d’autres organisations terroristes, ont quitté la Syrie pour rejoindre la Libye suite à la progression de l’armée syrienne appuyée par l’aviation militaire russe, ont rapporté des medias. Moussa Abdellat, expert juridique jordanien, révèle la présence de 4 000 Jordaniens au sein des organisations terroristes. « Le courant salafiste de la Jordanie compte parmi les sponsors les plus importants des groupes extrémistes à l’issue de l’invasion de l’Irak par les Etats-Unis en 2003 », avait déclaré l’expert jordanien cité par des medias.
En Libye, Daech et Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI) ont déjà un grand effectif de Djihadistes, en plus ils souhaitent cette arrivée de « renforts » pour renforcer leurs effectifs et conforter l’occupation de territoires entiers. Il est à noter qu’au moins 3 000 terroristes tunisiens, des milliers d’autres libyens et d’autres marocains sont partis en Syrie et en Irak pour renforcer les effectifs de Daech et d’Al Qaida. Ils pourraient être tentés de revenir vers cette région pour fuir les frappes russes en Syrie. Le démantèlement de plusieurs réseaux de Daech dans la région, notamment en Algérie, conforte l’hypothèse selon laquelle les terroristes originaires de la région tenteraient de fuir la Syrie pour se diriger vers la Libye où des territoires sont actuellement sous l’emprise de Daech et d’AQMI qui possèdent même des camps d’entraînement dans ce pays.
Le mystère des Toyota Hilux
En Libye, en Irak ou en Syrie, les terroristes de l’Etat Islamique (Daech) se déplacent à bord de milliers de véhicules tout terrain, dont des Toyota Hilux, modifiés de manière à être équipés de mitrailleuses. Les terroristes semblent ne jamais être à court de ce type de véhicules. Où se procurent-ils ces tout terrain ? Le département du Trésor américain a ouvert une enquête afin de comprendre pourquoi les membres de l’État islamique roulent tous en véhicules tout terrain Toyota, selon la chaîne américaine ABC News et rapportée par Le Point. L’interrogation des autorités américaines est née des images de propagande marquantes de Daech, où l’on voit de longues files de véhicules Toyota Hilux ou Land Cruiser, relativement neufs et généralement couverts de sable, roulant l’un derrière l’autre, est-il ajouté. Le constructeur japonais a immédiatement réagi à l’annonce en indiquant ne pas avoir connaissance d’une quelconque infraction de son règlement de la part de ses distributeurs. Un règlement qui stipule que les distributeurs doivent s’assurer, entre autres, que le véhicule ne sera pas utilisé comme engin de guerre. L’organisation terroriste Daech continue à utiliser des milliers de véhicules tout terrain de marque Toyota dans plusieurs pays, dont la Libye, l’Irak, le nord du Mali et la Syrie. L’utilisation de ces tout terrain permet une grande mobilité aux terroristes de Daech et rend leur élimination difficile. Des camionnettes Toyota, sur les plateformes desquelles sont montées des mitrailleuses, permettent aux terroristes de Daech de se déplacer à grande vitesse, évitant les frappes aériennes. En Algérie, des tout terrais, dont des Toyota Station, sont utilisés par des narcotrafiquants dans le transport de drogue. En 2010, le ministère du Commerce, a, pour des raisons sécuritaires, à cause de l’utilisation de ce type de véhicule par les groupes de contrebande et de terrorisme en Algérie, interdit l’importation de véhicules japonais de type « Toyota Land Cruiser » sur tout le territoire national ; quant à l’ achat des autres types de véhicules tout terrain, celui-ci sera tributaire de conditions très strictes.
L’étude de reporter de BBC et les ambitions de Daech en Algérie
L’organisation terroriste Daech a l’appétit féroce. Son intention d’extension de ses actions est clairement affichée. L’Algérie n’est pas épargnée par la volonté de cette organisation terroriste d’étendre ses attentats criminels. Le journaliste britannique Andrew Hosken avait livré, en juin 2015, une carte des « ambitions » de Daech pour l’instauration de son « califat », sur la base de pratiques entièrement étrangères à l’Islam. Dans son livre intitulé « Empire of Fear » (L’Empire de la Peur), Andrew Hosken, reporter pour la BBC Radio 4 livre une carte des plans de Daesh pour l’instauration de son « califat ». Sur cette carte, les pays que le groupe terroriste ambitionne de conquérir, de l’Inde à l’Espagne, en passant par le Moyen-Orient, mais aussi la Grèce et la moitié nord de l’Afrique dans une période de cinq ans. L’organisation s’illustre dans son ambition par une violence inouïe. Sur la carte du journaliste Andrew Hosken, l’Afrique du Nord est clairement concernée par l’« ambition » d’extension de Daech. L’Algérie figure dans cette carte, signifiant que le pays fait partie des nations ciblées par cette organisation terroriste. Daech a tenté, sans réussir, de s’implanter en Algérie, par l’intermédiaire de « Djound El Khilafa », une organisation terroriste « dissidente » d’Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI) et qui avait annoncé son « allégeance » à Daech. L’émir de cette organisation terroriste et plusieurs de ses acolytes, qui ont revendiqué l’enlèvement et l’assassinat de l’alpiniste français Hervé Gourdel, ont été éliminés par l’Armée nationale populaire (ANP). Les différentes tentatives menées par des organisations terroristes de relancer les attentats criminels en Algérie ont reçu une riposte efficace de la part de l’ANP. Cependant, et malheureusement, des attentats ont été perpétrés par AQMI, dont celui de l’assassinat de neuf militaires dans la wilaya d’Ain Defla. Face à cette menace, l’Algérie a décidé de certaines mesures, dont le renforcement de la surveillance des frontières avec plusieurs pays, dont la Libye, la Tunisie, le Mali et le Niger où l’autre organisation terroriste Boko Haram tente de s’installer.