Intervention au Nord-Mali: l’Algérie en état d’alerte à ses frontières

Intervention au Nord-Mali: l’Algérie en état d’alerte à ses frontières

Lundi dernier, le commandant de la gendarmerie nationale a tenu une réunion d’urgence avec les premiers responsables des wilayas du sud du pays sur la sécurité des frontières avec le Nord-Mali. Hier, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a déclaré que l’ANP a pris toutes les mesures nécessaires pour les sécuriser.

Des contingents de l’ANP renforcent les gardes frontières au sud du pays.

Alors que l’intervention militaire au Nord-Mali se précise et que le mandat du conseil de sécurité est attendu dans les jours qui viennent par Bamako et la Cédéao, l’Algérie est en état d’alerte maximale dans ses frontières sud. Plusieurs faits l’attestent.

La déclaration du Premier ministre, Abdelmalek Sellal devant le conseil de Nation où il présentait son plan d’action ce mercredi, le déplacement du général-major Ahmed Boustella dans les wilayas du sud où il a tenu une réunion d’urgence avec les walis et la forte délégation composée de généraux du MDN et de cadres du DRS ayant accompagné Abdelkader Messahel, le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines lors de sa tournée, la semaine écoulée, dans les pays dit du « champ ».

Sur cet état d’alerte aux frontières sud du pays, le Premier ministre M. Abdelmalek Sellal s’est voulu rassurant en annonçant, ce mercredi à Alger, devant le conseil de la Nation où il présentait le Plan d’action de son gouvernement, que « l’ANP a pris toutes les mesures nécessaires pour protéger les frontières sud du pays ».

Répondant à une question d’un membre du Conseil de la nation sur la situation dans le nord du Mali et ses retombées sur la sécurité et la stabilité des régions frontalières algériennes, M. Sellal a précisé que « l’ANP a pris, avec tous les autres services de sécurité, toutes les mesures nécessaires pour protéger les frontières nationales« , ajoutant que « Il y a des hommes à la hauteur qui veillent à la sécurité des frontières nationales« ,  affirmant même qu’ »il n’y aura aucun problème dans ce domaine« . De plus, le Premier ministre a fait savoir que l’Algérie veut éviter à ses frontières (du sud du pays) « un abcès de fixation d’insécurité (…) Nous ne voulons pas d’un foyer d’insécurité qui risque de perdurer« .

Mais ces déclarations, pour rassurantes qu’elles soient, ne semblent pas tenir devant la réalité sécuritaire. Le général major Ahmed Boustella, commandant de la gendarmerie nationale, a présidé lundi 15 octobre 2012 une réunion d’urgence qui a regroupé les premiers responsables des wiliyas du Sud et procédé à l’installation du nouveau commandant régional de Ouargla, le colonel Abdelhafid Abdaoui dans le nouveau siège du commandement régional de la ville. Lors de cette réunion, le chef de la gendarmerie nationale a  insisté sur l’urgence du renforcement des capacités des gardes frontières (GGF) « pour déjouer toute atteinte à l’économie et à la sécurité nationales« , en mettant l’accent sur le renseignement et le travail de proximité.

Cette mobilisation des walis des régions du sud intervient, rappelons-le, quelques jours après que l’ANP soutenant les gardes-frontières à la frontière ouest de l’extrême sud de Tin Zawatin a été confrontée à un important groupe d’Al Qaïda au Maghreb islamique qui, à bord de véhicules tout terrain, tentait une infiltration sur le territoire algérien. Quatre terroristes ont été abattus lors de cet affrontement. L’information rapportée par le journal arabophone El Khabar précise que ce groupe terroriste, dénommé « le bataillon des masqués »agit sous le contrôle d’un des chefs d’Aqmi, l’algérien Mokhtar Belmokhtar.

Ce n’est pas la première fois que le commandant de la Gendarmerie nationale se rend dans les wilayas du sud. Il y avait le déplacement quelques heures après les deux attentats à la voiture piégée ayant ciblé le groupement de gendarmerie à Tamanrasset en mars 2012  avait fait 23 blessés ((15 gendarmes, 5 éléments de la Protection civile et trois civils) et en juin de la même année, le siège du même corps sécuritaire dans la ville de Ouargla, lors duquel un gendarme a trouvé la mort. Ces attentats-suicides ont été revendiqués par le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). Le général major avait ordonné l’envoi sur place de trois sections spécialisées dans la criminologie, biologie, des enquêteurs de la police judiciaire, des gendarmes spécialisés dans les explosifs et d’autres spécialisés dans les cadavres.

Sa récente visite dans les wilayas du sud  intervient, quant à elle, sur fond d’alerte au niveau des frontières avec le nord du Mali où, selon plusieurs sites africains, se réorganisent Al Qaïda au Maghreb islamiques et les groupes qui lui sont fédérés, le Mujao et Ansar Eddine pour faire face à une éventuelle intervention des forces armées ouest africaines. La tournée du Général-major Ahmed Boustella à travers les wilayas du sud intervient également quelques jours après la visite dans les pays du « champ » du ministre délégué chargé des affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, qui était accompagné d’une forte délégation composée d’un panel d’officiers supérieurs du MDN et DRS.

Faut-il également inclure à cette présence accrue de l’armée algérienne aux frontières sud, l’organisation d’un colloque mardi dernier à Alger sur la région Sahélo-saharienne organisé par le ministère de la Défense nationale. Si ce colloque s’est voulu « scientifique » et « éloigné des approches sécuritaires », il n’en demeure pas moins que les questions sécuritaires étaient à l’ordre du jour.

La déclaration du Premier ministre Abdelmalek Sellal sur ce sujet alarmant remet en question la démarche dialoguiste d’Alger qui, à travers ces signaux d’alerte, semble plutôt se préparer à une offensive armée contre Al Qaïda au Maghreb islamique qui écument ses frontières sud depuis les récentes menaces du Mujao contre la France dont le Président, François Hollande, s’apprête à une visite d’Etat en Algérie après sa tournée africaine sous haute tension.

R.N