Jamais une séance d’installation de nouveaux députés à l’Assemblée populaire nationale (APN) n’a été aussi tumultueuse que celle qui s’est déroulée hier lors de l’ouverture de la septième législature.
En effet, les députés de l’Alliance dite de l’Algérie verte (AAV) ont semé une grande «pagaille» dans l’hémicycle lorsqu’ils se sont levés, des petites pancartes rouges à la main, pour dénoncer et rejeter les résultats du 10 mai écoulé.
Des pancartes dans lesquelles on pouvait lire «non à la fraude». Les «mécontents» ont, de ce fait, perturbé la séance matinale qui a été consacrée à l’appel et la validation des mandats des nouveaux représentants du peuple.
Mieux encore, les élus de l’Alliance de l’Algérie verte, qui se compose, rappelons- le, du Mouvement de la société pour la paix (MSP), d’Ennahda et d’El Islah, ont quitté l’hémicycle en guise de protestation. Cependant, il faut souligner que le désormais ancien ministre des Travaux publics et néanmoins député MSP, Amar Ghoul, était le seul à ne pas «bouder» les travaux.

À ce propos, Nomane Laouar, député du Parti de Bouguerra Soltani (MSP) a souligné que «la décision de quitter l’hémicycle de l’APN a été prise à l’unanimité et les députés qui ne respectent pas ce choix sont libres de faire ce qu’ils veulent». Par ailleurs, l’ancien chef du groupe parlementaire du MSP a indiqué que l’assistance des partis de l’AAV n’est que symbolique car, a-t-il expliqué, «cette présence est une marque du respect pour les électeurs qui ont fait confiance en leurs candidats».
«Des citoyens ont donné leurs voix pour nos candidats et on doit être à la hauteur de leurs attentes», at- il rétorqué, en réponse à ceux qui demandent la démission des partis qui dénoncent la fraude qui a émaillé les législatives du 10 mai. «On est obligé d’être là aujourd’hui (à l’APN, ndlr)», a-t-il déclaré. Et de poursuivre : «Nos voix sont halal contrairement à celles des autres partis».
Le coordinateur du groupe parlementaire de l’AAV a, d’autre part, souligné que les partis de celle-ci (l’AAV) refusent le «verrouillage politique» et le «retour à l’ère du parti unique». «Nous sommes prêts à travailler et à coordonner avec tous les partis et les forces politiques qui veulent opérer un véritable changement dans le pays», a-t-il encore souligné.
DJELLOUL DJOUDI (PT) : «NOUS AVONS D’AUTRES FORMES DE CONTESTATION»
Le chargé de communication et le député du Parti des travailleurs (PT), Djelloul Djoudi, a précisé hier, en marge de la cérémonie de l’installation des nouveaux députés de l’APN, que cette formation politique va recourir à des formes de contestations autres que celle qui a été «doptée» par les partis de l’Alliance de l’Algérie verte ( AAV).
«Les partis contestataires sont libres de faire ce qu’ils veulent, mais nous au PT, on juge qu’il y a d’autres formes de contestation, et ce, sachant qu’on nous a subtilisé des voix», a déclaré Djelloul Djoudi. Selon l’orateur, le verdict du Conseil constitutionnel prouve qu’ «il y a eu une fabrication de résultats et que la fraude est bel et bien une réalité».
Plus explicite, le chargé de communication du parti de Louisa Hanoune a ajouté que cette formation politique «tablait» sur 80 sièges à l’Assemblée populaire nationale. Pour lui, les 24 sièges obtenus par le PT ne reflètent guère son poids sur la scène politique nationale.
Et de conclure : « Les partis qui contestent les résultats des législatives du 10 mai écoulé ont les mêmes objectifs, mais la façon de protestation n’est pas la même », soulignant, par la même occasion, que le Parti des travailleurs est autonome dans ses décisions.
LAKHDAR BENKHELLAF (PJD): «ON NE PEUT PAS DÉMISSIONNER ! »
Le député du Parti pour la justice et le développement (PJD- El Adala), Lakhdar Benkhellaf, a souligné que les partis appartenant au « Front politique pour la sauvegarde de la démocratie », qui conteste les résultats du scrutin du 10 mai, ne peuvent pas démissionner de la Chambre basse. « La réglementation est claire.
On ne peut pas démissionner car si on démissionne, on sera remplacé par d’autres députés », a-t-il dit, avant d’enchaîner : « Les partis du Front politique pour la sauvegarde de la démocratie ont décidé initialement de boycotter les travaux de l’APN et en attendant d’autres décisions, nous continuons notre combat au sein de la Chambre basse ».
Pour lui, « tout a été joué avant les élections et même le président de l’Assemblée a été désigné avant son installation officielle ». Le député a aussi déploré la « façon », dont le Conseil constitutionnel a prononcé le verdict concernant les recours déposés par les candidats et les représentants des différents partis ayant participé aux élections.
«Le Conseil constitutionnel n’a pas publié les rapports détaillés au niveau des circonscriptions». À en croire ses dires, «des députés ont même été renvoyé après avoir déposé leurs dossiers au niveau de l’Assemblée populaire nationale ». À rappeler, dans ce contexte, que le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Dahou Ould Kablia, a précisé, mercredi dernier, que «les partis qui ne reconnaissent pas le Parlement doivent démissionner».
SEDDIK CHIHAB (RND): «UNE PROTESTATION ORDINAIRE»
Le député et le membre du bureau national du parti du Rassemblement national démocratique (RND), Seddik Chihab, a minimisé hier l’action à laquelle les partis de l’AAV ont procédé pour exprimer leur colère et leur indignation par rapport aux résultats des précédentes législatives. «C’est une protestation tout à fait ordinaire», at- il estimé.
Selon lui, il existe plusieurs formes de contestations et les «mécontents» ont fait leur choix pour exprimer leur rejet des résultats des élections. Autrement dit, le membre du bureau national du RND estime que cet «incident » ne va pas influer sur le cours des choses.
Dans ce même contexte, Miloud Chorfi, le porteparole du parti d’Ahmed Ouyahia a souligné que «cette formation politique respecte le choix de l’AAV». «Le peuple a tranché et a librement choisi les députés qui vont les représenter à l’Assemblée populaire nationale », a-t-il dit.
ALI LASKRI (FFS) : «NOUS AVONS NOTRE PROPRE STRATÉGIE»
Le premier secrétaire du Front des forces socialistes (FFS), Ali Laskri, a souligné hier que le FFS a sa propre stratégie pour contester les résultats du scrutin du 10 mai, mais sans pour autant dévoiler «les grandes lignes» de cette stratégie. Le député de la wilaya de Boumerdès a aussi rappelé que le score réalisé par le vieux parti de l’opposition lors des échéances électorales du 10 mai passé est « satisfaisant » et que les députés du FFS vont s’investir à fond pour opérer le changement auquel aspire le peuple algérien.
SAÏD LAKHDARI (FLN): «NOUS AVONS AFFAIRE À UNE ALLIANCE ROUGE !»
Le Mouhafedh et député FLN de la wilaya de Tizi Ouzou, Saïd Lakhdari, n’a pas mâché ses mots hier pour dire que l’action des partis de l’AAV est explicable par le fait que ceux-ci ont pensé que le scénario du printemps arabe va se rééditer en Algérie. «Nous avons affaire à une alliance rouge et non une alliance verte», a-t-il tonné. «Le peuple a fait son choix et les partis perdants doivent accepter cette réalité », a-t-il ajouté, précisant que les islamistes ont «perdu la bataille».
Soufiane Dadi