Surfant sur la proposition du patronat portant sur la mise en place d’une «zone franche» dans le sud du pays, le gouvernement a décidé d’installer un port sec à Tamanrasset.
Lors de sa visite de travail à Tamanrasset, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, s’est engagé à faire de Tamanrasset une base logistique destinée à la promotion des exportations et des échanges commerciaux avec l’Afrique profonde. Cette idée, on s’en souvient très bien, a été le leitmotiv des cadres du Forum des chefs d’entreprise durant toute la période qu’a duré l’organisation du Forum africain des affaires qui s’est tenu les 1er 2 et 3 décembre derniers.
En effet, le patron du FCE, Ali Haddad, mais également le vice-président chargé des questions économiques de cette organisation patronale, n’ont raté aucune occasion d’appeler à faire de l’Algérie un «hub» pour l’exportation vers l’Afrique. «Le retour de l’Algérie sur la scène économique mondiale et africaine est possible et nous sommes prêts à consentir tous les efforts qui s’imposent pour y parvenir. Néanmoins, il est nécessaire que le gouvernement fasse de grandes annonces afin de rassurer et d’encourager les opérateurs nationaux à aller de l’avant», a déclaré Ali Haddad lors d’une conférence qu’il a tenue conjointement avec le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra, à l’hôtel El Djazaïr le 7 novembre 2016.
Et comme signes forts, le patron du FCE ne veut rien de moins que des zones franches, deux précisément. «L’ouverture de deux zones franches en Algérie est nécessaire pour faire de l’Algérie une zone attractive. Une zone franche dans le Nord, à Cherchell, à vocation industrielle pour attirer les IDE et une autre à Tamanrasset comme plate-forme commerciale transafricaine,» a-t-il proposé non sans mettre un grain d’insistance dans son propos.
Cette proposition de mise en place de deux zones franches en Algérie a, par la suite, figuré parmi les recommandations principales du Forum africain des affaires.
Entre le port sec à mettre en place annoncé par Sellal récemment et la zone franche revendiquée par le FCE, il n’y a pas qu’une petite nuance. L’écart est, au contraire, immense. Un port sec est en effet un terminal intermodal directement connecté par route ou par chemin de fer à un port maritime et fonctionnant comme un centre de transbordement de cargaisons maritimes vers des destinations à l’intérieur des terres. Il peut aussi, accessoirement, inclure des installations de stockage et de regroupement des marchandises, des centres de maintenance pour les transporteurs routiers ou ferrés et des services de dédouanement.
En gros, son rôle est quasiment technique et son impact est surtout d’ordre procédural et porte essentiellement sur le gain de temps et la facilitation des procédures administratives dans le processus de commercialisation. Son importance est, à ce titre, non négligeable. Toutefois, compte tenu de la situation de crise que traverse le pays et de la nécessité de redynamiser son économie en impliquant de nouveaux acteurs et en expérimentant d’autres démarches, cela exige du gouvernement davantage qu’une mesure de «débureaucratisation» du commerce dans le sud du pays et dans les régions frontalières. De ce point de vue, mettre en application la proposition du FCE qui, elle, est beaucoup plus pertinente dans la conjoncture actuelle,aurait été sans doute plus judicieux. Mais l’installation d’un port sec est vraisemblablement conçue comme une étape dans la démarche du gouvernement qui ne cache plus son ambition de s’ouvrir sur l’Afrique et de s’y tailler de bons marchés.
Il n’est donc pas exclu de voir, une fois le port sec installé, émerger l’idée d’une zone franche à Tamanrasset. Une zone franche, c’est une zone géographique d’un territoire dont le développement de l’activité économique a été jugé prioritaire par les autorités et c’est le cas de Tamanrasset et de tout le Sud algérien, du moins de la bouche des responsables algériens. Le principe de la zone franche est qu’elle offre des avantages fiscaux, notamment des exonérations de TVA, d’impôt sur les bénéfices ou de droits de douane dans le but d’attirer des investisseurs.
La réalisation d’un port sec à Tamanrasset vise, selon le gouvernement, à faciliter le transbordement des cargaisons maritimes vers les autres pays africains à même de développer la production nationale en réorientant nos exportations vers le continent noir. «L’objectif est aujourd’hui de faire de Tamanrasset un espace d’échanges avec l’Afrique profonde et de lui permettre d’assumer un rôle pivot dans les transports terrestre et aérien», a indiqué le Premier ministre. Naturellement, l’objectif assigné au projet est disproportionné par rapport à la taille de celui-ci. Il est donc aisé de relever qu’il en cache un autre qui sera fort probablement «la mise en place d’une zone franche» à Tamnrasset.