Insécurité, cherté du billet et difficultés pour l’obtention de visas, Tourisme : ce qui plombe la destination Algérie

Insécurité, cherté du billet et difficultés pour l’obtention de visas, Tourisme : ce qui plombe la destination Algérie

Alors que le tourisme réceptif entame un long deuil, que les touristes étrangers vont se faire de plus en plus rares, la situation de l’Algérien résident et candidat au voyage à l’étranger va davantage se compliquer.

Moins d’une semaine après l’enlèvement en Algérie du touriste, alpiniste français, Hervé Gourdel, et 72 heures après la confirmation de son lâche assassinat par les terroristes, la communauté internationale a célébré, samedi 27 septembre, la Journée mondiale du tourisme dans une conjoncture particulière.

En Algérie, le drame de Tikjda, moins de deux années après celui de Tiguentourine, le 16 janvier 2013, vient d’endeuiller la destination Algérie. Cette date ne peut être qu’une halte pour poser les vraies questions sur le devenir d’une destination toujours en quête de sa voie. Il ne sert à rien de sortir des formulesclés en main du genre que l’événement n’a aucune incidence sur le tourisme en Algérie.

S’il n’y a pas de bousculades dans nos aéroports, de touristes qui veulent écourter leurs séjours, c’est parce que, dimanche dernier et sur l’ensemble du territoire national, ils étaient très peu nombreux. La machine est déjà à l’arrêt, il y a risque qu’elle ne se refroidisse pour une longue durée ! Parmi les enseignements à tirer de la situation qui prévaut, au moins un mérite d’être cité. Si le tourisme, comme secteur, doit être porté par le département de Mme Zerhouni, il est, comme activité, un phénomène transversal.

Il est la résultante d’interventions de secteurs multiples, hétérogènes, voire en conflit d’intérêts dans certains cas. Dimanche dernier, l’hôtelier, le restaurateur et l’agent de voyages n’ont pas failli. Le fournisseur du transport aérien, de l’eau potable, de l’électricité, des soins de santé, de l’ADSL n’ont pas failli, eux non plus.

Dimanche dernier, la destination Algérie a été victime non pas d’un pafiste zélé, d’un marchand de journaux antipathique, mais d’un invité surprise : Daech. Ainsi, le tourisme est l’affaire de tous. Désormais, pour avoir une destination performante et un produit touristique compétitif, il faut que l’offre soit supportée par des économies et des institutions compétitives et performantes.

C’est certainement pour cette raison que les leaders de l’industrie touristique mondiale ne sont autres que les USA, la France, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Espagne, l’Italie… Et non des pays cartes postales.

Dur de voyager au temps de la harga et de Daech

Alors que le tourisme réceptif entame un long deuil, que les touristes étrangers vont se faire de plus en plus rares, la situation de l’Algérien résident et candidat au voyage à l’étranger va se compliquer davantage. Bien que Daech ne soit pas algérienne, Essakhta aama ou le malheur sera général, comme dit le proverbe du terroir.

Depuis le début des années 1990, l’Algérien, qui veut se déplacer hors du pays, rencontre de plus en plus d’entraves et de contraintes. Avec les derniers développements, tout laisse croire que la tendance sera maintenue, voire accentuée. En ce 27 septembre, les Algériens découvrent que, pour eux, voyager devient de plus en plus difficile. En effet, l’histoire de la taxe d’entrée instituée par la Tunisie en cette deuxième moitié de l’année 2014 a fait de l’ombre à de nouvelles restrictions introduites, plus récemment, par la Turquie et Dubaï. Si l’espace Shenguen continue à rester étanche au voyageur algérien lambda, des frontières réputées, jusqu’ici, permissives aux Algériens commencent à se refermer.

La dernière contrainte est venue de Dubaï qui a durci, mi-septembre en cours, d’un cran, ses conditions d’octroi des visas pour les Algériens en excluant ceux de moins de 40 ans. Quand on sait que la population algérienne est jeune, on mesure l’étendue de la disposition. Quelques mois auparavant, et contre toute attente, ce fut autour de la Turquie, qui plaidait jusqu’à une date récente pour la suppression du visa pour les Algériens, de revoir ses facilités à la baisse.

Désormais, le visa valable un an ne l’est que pour 6 mois et les dossiers des jeunes de moins de 25 ans sont passés au crible avec les premiers refus qui apparaissent. Bien avant, l’Égypte avait déjà durci le dispositif à travers des délais de délivrance qui peuvent atteindre les deux mois. À cause de la crise qui y prévaut, la Libye et la Syrie sont fermées de fait aux Algériens. Les seuls pays où les Algériens peuvent entrer sans visas sont le Maroc, la Malaisie et la Tunisie. Ces trois dernières années, les Algériens découvrent que même les visas d’entrée dans les Lieux saints pour accomplir la omra sont délivrés au compte-goutte. À ces contraintes de visas, s’ajoute la cherté du titre de transport aérien.

Entre l’ouverture du ciel algérien pour offrir au voyageur des sièges issus d’un marché concurrentiel et sauver l’hégémonie du pavillon national à coups d’argent du contribuable et de la rente, le choix est vite fait : sacrifier les règles basiques du marché. Du coup, les passagers des aéroports algériens sont unanimes à dénoncer la cherté du billet des compagnies qui y évoluent. Une autre contrainte devant les candidats au voyage.

Au départ, les restrictions étaient imposées par les pays récepteurs et étaient beaucoup plus liées aux dispositifs de lutte contre l’immigration, certes, pas uniquement clandestine. Puis la donne liée à la prévention contre le terrorisme, notamment à partir des années 1990 début 2000, est entrée en considération. Aujourd’hui, cette donne est la plus dominante et les restrictions ne sont plus l’apanage des seuls pays récepteurs, mais aussi des États émetteurs.

Ainsi, les derniers durcissements imposés par les consulats de Turquie sont le résultat d’une collaboration entre ce pays et les pays émetteurs dans le cadre des efforts de tarissement des sources de recrutement des djihadistes. Un pays comme le Maroc vient, semble-t-il, de demander à la Turquie de durcir les conditions d’octroi de visas à l’ensemble de ses ressortissants. Même des pays occidentaux, tels que la France, attendent d’Ankara “plus de rigueur” dans l’octroi des visas pour certaines catégories et demandeurs.

En effet, actuellement, plus de 3 000 Européens, dont la majorité a transité par Istanbul, sont dans les rangs des groupes jihadistes. Dans ce lot, le tiers est français avec près de 300 jeunes issus de souches autres que maghrébine. Alors, il n est pas facile de voyager, de connaître d’autres horizons et cultures quand on est Algérien.

M. K.