INFORMEL, CHANGE PARALLÈLE, ROUTES BARRÉES… L’Etat a-t-il démissionné?

INFORMEL, CHANGE PARALLÈLE, ROUTES BARRÉES… L’Etat a-t-il démissionné?

Les pouvoirs publics donnent l’impression d’être impuissants devant ces «excroissances» qui vont jusqu’à remettre en cause leur propre crédibilité et battre en brèche les fondements des institutions républicaines.

La République est mise à mal. Les représentants, toutes catégories confondues de sa hiérarchie, ne réagissent pas. Impuissants à éradiquer certains phénomènes qui pourtant malmènent la crédibilité des institutions, ils ferment les yeux. Quelques clichés illustrent ce constat alarmant: mamelle du secteur de l’informel en Algérie, le square Port-Saïd s’est imposé comme la plaque tournante du marché parallèle de la devise. Son tarissement provoquerait irrémédiablement la chute des barons de la finance. Une bouffée d’oxygène pour l’économie nationale. Pour le moment et certainement pour longtemps encore, elle demeure sous leur coupe. A travers ce canal, ils siphonnent des millions d’euros, au circuit économique légal, acquis à la sueur de leur front par des contingents de travailleurs qui sont allés vendre leur force de travail en France, en particulier et à l’étranger en général. «On peut librement y acheter ou vendre des devises. Emigrés et retraités affiliés aux Caisses de retraite françaises alimentent régulièrement le marché. A chaque fin de mois, les pensions en devises sont retirées des comptes bancaires pour alimenter aussitôt les circuits parallèles. Ce marché brasse ainsi des capitaux colossaux en monnaie forte», avait révélé une enquête réalisée par le quotidien L’Expression le mois de juillet 2010. Au vu et au su de tout le monde, des milliards de dinars sont échangés contre des millions d’euros. Un créneau qui abrite des «milieux d’affaires» qui ont la mainmise sur le secteur de l’informel qui brasse 40% de la masse monétaire en circulation. A combien se chiffre un tel marché? 155 milliards de dinars de transactions illégales ont échappé au contrôle des services des impôts ces trois dernières années alors que plus de 30.000 commerces ont été fermés, avait révélé le 13 mars 2012 sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, Abdelhamid Boukahnoun, directeur général du contrôle économique et de la répression des fraudes au ministère du Commerce.

A défaut d’une estimation plus pointue, on peut aisément penser que c’est sur lui que repose l’économie parallèle, la spéculation, les pots-de-vin, la corruption…qui caractérisent le système bureaucratique algérien. Les pouvoirs publics sont à ce point impuissants devant de tels phénomènes qui vont jusqu’à remettre en cause leur propre crédibilité et battre en brèche les fondements des institutions de la République dont les prérogatives régaliennes consistent à faire régner l’ordre et appliquer la loi. L’Etat donne toutefois l’impression de préparer une contre-offensive. Le grand argentier du pays, Karim Djoudi, serait en train de mettre au point «un texte déterminant l’organisation et la gestion du fichier national des personnes et entités morales transgressant la réglementation des changes et du transfert d’argent de et vers l’Algérie», croit savoir le quotidien en ligne TSA. Pour le moment, sur le terrain, les différents acteurs officient en toute quiétude. Que dire en effet de ces nouvelles formes de contestations qui consistent à ériger des barricades sur les routes pour faire aboutir des revendications qui concernent le quotidien des citoyens! Le recours à ce type d’expression indique que le dialogue entre les populations «révoltées» des différentes régions du territoire national et ceux qui dirigent les affaires de la cité a échoué. La contestation s’est durcie sans que les pouvoirs publics n’aient apporté de début de solution aux doléances de leurs administrés. Que penser aussi de ces parkings sauvages, ces bouts de trottoirs qui relèvent du domaine public, colonisés et exploités par des bandes de jeunes qui prélèvent leur dîme sous la menace de gourdins? Les automobilistes en quête d’un endroit pour stationner sont soumis à leur diktat et quotidiennement rackettés. Les pouvoirs publics avaient pourtant promis de réagir face à ce phénomène qui porte atteinte à la force publique. «On va organiser cette situation à travers une étude qui déterminera les zones à gardiennage. Des badges seront distribués pour les gardiens de parking. Ces derniers seront, d’abord, sélectionnés par les services de police», avait promis, au mois d’octobre 2010, le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia. Des déclarations qui ne sont pas suivies d’effet. L’impunité et l’anarchie persistent Les écrits restent et les promesses s’en vont comme est chaque jour grignotée une petite parcelle de l’autorité de l’Etat.