Gasoil, l’offre ne répond plus à la demande
Visiblement, la politique de réforme en matière d’hydrocarbures n’est pas encore arrivée à bon port.
«Il est nécessaire de revoir la stratégie de distribution des carburants en adéquation avec les capacités réelles de production et ceci ne peut se faire qu’après l’adoption urgente d’une nouvelle politique nationale de carburants», a proposé le Pr Abderrahmane Mebtoul, expert international dans une étude récente.
En matière d’importation de carburants, il faut le dire, l’Algérie n’est pas au bout de ses peines. Déjà avec l’importation massive du gasoil et dont l’offre ne répond plus à la demande depuis le début des années 2000, arrive encore l’information liée à l’importation d’une quantité de 130.000 tonnes d’essence super sans plomb pour un montant d’environ 130 Millions de dollars. Visiblement, la politique de réforme en matière d’hydrocarbures n’est pas encore arrivée à bon port et le marché des essences risque de connaître, pour les mois à venir, une solide perturbation.

«Sur le marché des hydrocarbures, on n’a jamais investi. L’Algérie a depuis toujours exporté le pétrole à l’état brut ou semi-brut, ce qui nous donne l’impression, depuis les années 70, que l’Etat est pressé d’avoir l’argent frais», nous a expliqué Mourad Ouchichi, économiste et enseignant à l’université de Béjaïa. Cette situation avait déjà prévue par la Commission nationale de l’élaboration du programme indicatif des produits pétroliers en 2006. «En matière d’offre de gasoil, un déficit sera enregistré de 2008 à 2011», avait rapporté la commission.
Ce déficit est principalement causé par l’arrêt annuel d’un mois pour maintenance de la plus importante unité de production, à savoir le Reforming de Skikda. Un arrêt qui entre dans le cadre du programme de réhabilitation, de modernisation et d’adaptation des raffineries. Cependant, les quantités de l’essence super sans plomb seront, selon le Pr Mebtoul, de plus en plus importantes à l’importation durant les arrêts prévus pour la fin de l’année en cours pour l’unité d’Arzew et au 2e trimestre 2012 pour celle de Skikda. La Commission nationale de l’élaboration du Programme Indicatif des produits pétroliers avait toutefois annoncé que le pays connaîtra en 2014 un autre point de rupture. Même si cette dernière avait annoncé une augmentation de près de 35% de la production nationale en gasoil. Les besoins en gasoil à l’horizon 2020 avaitent été estimés à 8.966.000 tonnes contre une offre de 9.371.000 tonnes, ce qui signifie une autosuffisance en carburants.
Aucune certitude par rapport à ces chiffres surtout avec l’annulation du projet de réalisation d’une raffinerie géante à Tiaret d’une capacité de production de 15 millions de tonnes/an. D’autres experts pensent que l’importation de carburants à l’exemple du gasoil ou le sans plomb dans un pays, comme l’Algérie, un des premiers producteurs et exportateurs d’hydrocarbures en Afrique, est une anomalie. «On investit énormément, même un peu trop dans les infrastructures et beaucoup moins dans les activités économiques. C’est une erreur stratégique de nos décideurs», pense Abdelhak Laamiri, économiste.
Cependant, notre expert, souligne que cette situation doit inciter les pouvoirs publics à revoir la politique de consommation du marché en essence qui est loin d’être rationnelle. «La consommation est peu-être un peu exagérée mais pas irrationnelle. Elle est ce qu’elle est en fonction des prix. La consommation augmente lorsque les prix sont bas», dira A.Laamiri. Un avis totalement partagé par Mourad Ouchachi. «C’est comme le pain! il est tellement subventionné qu’il peut être procuré à un prix très bas et finit par être gaspillé», estime-t-il. Les trois experts concluent qu’il faut ouvrir un débat serein et sans exclusive autour de la politique des carburants, spécialement pour la conjoncture actuelle; des dossiers qui engagent la sécurité nationale autant que l’utilisation et le rendement des réserves de change, la durée de vie des réserves d’hydrocarbures ou encore la transition d’une économie de rente à une économie hors hydrocarbures.