Importantes manifestations en Egypte. “Moubarak dégage”, scandent les manifestants*

Importantes manifestations en Egypte. “Moubarak dégage”, scandent les manifestants*

La révolte populaire en Tunisie a inspiré les manifestants égyptiens, qui sont descendus dans la rue par milliers mardi, notamment au Caire, pour réclamer le départ du président Hosni Moubarak au pouvoir depuis près de 30 ans. Des échauffourées se sont produites dans la capitale entre protestataires et policiers, déployés en grand nombre.

Les manifestations, les plus importantes depuis des années en Egypte, se déroulaient dans le cadre d’une “journée de la révolution contre la torture, la pauvreté, la corruption et le chômage”.

“Moubarak dégage”, pouvait-on notamment lire -en français, comme en hommage à la Tunisie- sur des pancartes, tandis que les manifestants scandaient des slogans hostiles au président égyptien, au pouvoir depuis 1981. “Dehors!”, hurlaient-ils notamment, en référence à la révolte qui a provoqué le départ le 14 janvier du président tunisien Zine El Abidine Ben Ali.

La manifestation au Caire a débuté dans le calme, les forces de l’ordre faisant preuve dans un premier temps d’une réserve inhabituelle. Mais la situation s’est tendue au fur et à mesure que la foule affluait sur la place Tahrir, dans le centre de la capitale, agitant des drapeaux égyptiens et tunisiens.

Des manifestants ont lancé des pierres sur les policiers, qui ont répliqué par des jets de grenades lacrymogènes, au canon à eau et en chargeant à coups de bâtons pour tenter de disperser la foule. Les policiers ont frappé plusieurs personnes, dont une journaliste, brisant ses lunettes et confisquant sa caméra.

Comme en Tunisie, de nombreux jeunes ont manifesté pour la première fois. “C’est une première pour moi, mais nous avons été une nation de lâches. Cette fois, il faut qu’on dise non”, a lancé Ismail Syed, 24 ans, qui travaille dans un hôtel pour un salaire mensuel ne dépassant pas l’équivalent de 36 euros.

Eid Attalah, un chauffeur de 50 ans, veut lui que son enfant de trois ans “grandisse dans la dignité et puisse trouver un travail, tout comme le président”. Il s’est dit surpris par l’ampleur de la mobilisation.

“Nous en avons assez. Trop c’est trop”, a de son côté souligné Saïd Abdelfatah, un fonctionnaire de 38 ans. “La révolution tunisienne m’a inspiré, mais je n’avais jamais pensé qu’on trouverait autant de monde prêt à faire la même chose ici”, a-t-il ajouté. Des milliers de manifestants ont également défilé à Alexandrie, dans le nord du pays.

Des mères accompagnées de leur bébés figuraient parmi les manifestants, scandant “Révolution jusqu’à la victoire!. “On veut du changement, comme en Tunisie”, expliquait Lamia Rayan, 24 ans.

L’appel à manifester a largement été relayé par les réseaux sociaux, avec au moins 90.000 personnes annonçant sur Facebook leur intention d’y participer. Outre les Frères musulmans et les partis d’opposition Wafd et Al-Ghad, des organisations syndicales, étudiantes, de fonctionnaires et de jeunesse avaient annoncé leur participation.

Près de la moitié des 80 millions d’Egyptiens vivent sous le seul de pauvreté de l’ONU, avec moins de deux dollars par jour (1,46 euro). La semaine dernière, plusieurs personnes se sont immolées par le feu en Egypte, comme le fit le jeune Tunisien Mohamed Bouazizi, dont le geste de désespoir déclencha la révolte.

Le rapport annuel du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) soulignait en juin dernier que les jeunes, représentant un quart de la population égyptienne, pourraient être une “formidable force de développement” si la société les “mettait en valeur” et leur offrait de vraies chances.

Mais, déplore le PNUD, la corruption des autorités, le népotisme, la fraude électorale, l’état d’urgence qui se prolonge depuis des décennies et la répression dissuade les jeunes, victimes d’une “culture de la peur”, de s’engager en politique et dans la société.