Ils sont recrutés dans le cadre du pré emploi, Des enseignants payés 15 000 DA !

Ils sont recrutés dans le cadre du pré emploi, Des enseignants payés 15 000 DA !
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Certes, «la recette» n’est pas nouvelle, mais la procédure risque de se multiplier cette année en raison du déficit d’enseignants, l’impasse faite sur le concours de recrutement et la surcharge des classes.

Chaque année, l’État recrute plusieurs milliers d’enseignants pour les écoles et les établissements de l’enseignement secondaire. Le ministère de l’Education nationale n’a pas organisé cette année le traditionnel concours de recrutement. C’est la première fois depuis plus de dix ans que cela se produit. Une situation inédite ! Ainsi, malgré le manque flagrant d’enseignants constaté dans plusieurs wilayas, le département de Benbouzid a décidé de se passer des services des enseignants contractuels. Catégorique, le ministre avait affirmé qu’il n’y aura pas de recrutement d’enseignants contractuels cette année. Les pouvoirs publics ne sont pas près de rééditer «la mauvaise expérience» de l’année dernière, où des milliers de contractuels ont investissaient chaque jour le palais présidentiel pour demander leur intégration. Que faire alors pour combler le manque d’enseignants, notamment dans les régions enclavées et le grand Sud algérien ? La tutelle semble avoir trouvé une astuce pour ne pas pénaliser les élèves et assurer «un encadrement idoine». Il s’agit du recrutement de jeunes enseignants, fraîchement sortis de l’université, dans le cadre du dispositif de création de l’emploi, l’Agence nationale de l’emploi (Anem) en l’occurrence. Ces «enseignants» sont payés 15 000 DA/mois. Certes, «la recette» n’est pas nouvelle, mais la procédure risque de se multiplier cette année, en raison du déficit d’enseignants, l’impasse faite sur le concours de recrutement et la surcharge des classes. «C’est de la pire exploitation», commente le porte-parole du Conseil des lycées d’Algérie (Cla), Idir Achour. «La tutelle a décidé de faire appel à des enseignants recrutés dans le cadre du pré-emploi, à défaut d’embaucher des contractuels et d’organiser un concours. Et cela concerne tous les paliers de l’enseignement», dénonce ce syndicaliste qui constate un «déficit» flagrant d’enseignants de langues étrangères et de mathématiques. Selon lui, les agences de l’Anem sont prises d’assaut par de nouveaux enseignants ayant eu l’avis favorable délivré des directions de l’éducation pour enseigner. Ce chiffre va crescendo, ajoute-t-il, compte tenu du nombre de diplômés qui se présentent chaque jour aux guichets de l’Anem. «Le gouvernement veut la précarisation de l’enseignant après avoir fragilisé les travailleurs d’autres secteurs. C’est la dévalorisation du métier», déplore le représentant du Cla. Même son cloche chez la Coordination nationale autonome de l’enseignement secondaire et technique (Cnapest). Son chargé de communication, Messaoud Boudiba, voit d’un mauvais œil la démarche du département de Benbouzid. «C’est la dignité de l’enseignant qui a été mise à plat. Payer un enseignant 15 000 DA est une honte à l’école algérienne», tempête-t-il. Selon lui, le rendement pédagogique d’un enseignant dépend de son statut social. «Avec un salaire aussi médiocre, l’enseignant ne peut donner le maximum de ses connaissances. Il faut protéger l’éducateur socialement afin d’améliorer la qualité de la formation», explique Boudiba, soulignant que le recours à l’Anem pour le recrutement d’enseignants «n’est pas une solution». Il préconise l’ouverture de postes budgétaires pour parer au manque d’enseignants. A ce sujet, le représentant du Cnapest signale que plusieurs établissements scolaires souffrent du déficit d’encadreurs. «D’après des échos, plusieurs élèves ont entamé la rentrée sans enseignants», dit-il. Le problème de la surcharge des classes a été également souligné par notre interlocuteur. Ainsi, l’enseignant aura à faire, dans certains établissements, à 40 et 50 élèves par classe. Pour appuyer ses propos, Boudiba donne un exemple concret d’un lycée de Birtouta (Alger) qui est en grève le premier jour de la rentrée en raison de la surcharge des classes. A noter que l’effectif global du personnel du secteur de l’éducation sera de 632 402, dont 406 285 (64,24%) pour l’encadrement pédagogique.

Par Hocine Larabi