Les déboires de l’économie américaine risquent de donner des sueurs froides aux décideurs algériens Lorsque l’économie américaine est grippée, les conséquences risquent d’être graves pour l’Algérie.
Le professeur Abderrahmane Mebtoul est un expert qui revient de nouveau sur la crise de l’endettement des Etats et notamment le risque de l’insolvabilité de l’économie américaine, première puissance économique mondiale.
Ce risque d’insolvabilité, combiné avec l’actuelle crise européenne, serait catastrophique pour l’économie mondiale et entraînerait une récession généralisée pire que celle d’octobre 2008, indique-t-il à L’Expression.
Cela a un impact sur l’économie algérienne car toute contraction de l’économie mondiale signifierait moins d’exportations d’hydrocarbures comme en 2008/2009 où les recettes ont chuté de 45%.
Autre préoccupation. Mebtoul rappelle que selon le ministre des Finances, Karim Djoudi, 80% des 157 milliards de dollars sont déposés à l’étranger en bons du Trésor dont 45% aux USA, 45% en euros, le reste en yens et livres sterling, et toute dépréciation combinée à l’inflation mondiale donnerait un rendement négatif. Selon le même analyste, il y a lieu d’être attentif «au fait que 98% de nos exportations sont libellées en dollars et 60% de nos importations en euros». Le second souci a trait au taux de rendement de ces réserves qui pourraient être moindres que si elles étaient déposées dans d’autres banques. A cette objection, la réponse est simple: l’Algérie privilégie la sécurité plutôt que le rendement immédiat.
Mais d’où viennent les déboires de l’économie américaine qui risquent tant de donner des sueurs froides aux décideurs algériens?
Explication: en 2011, la dette publique américaine dépasse les 14.000 milliards de dollars, soit plus de 95% du PIB, étant supportée par des créanciers principalement japonais, chinois, européens et les pays du Golfe. L’Algérie a déposé plus de 40% de ses réserves de change en bons du Trésor américain. Cependant, les 7000 milliards de dollars de placements américains dans le monde reçoivent plus de dividendes de leurs investissements à l’étranger que le pays ne paie d’intérêts sur leurs dettes. Les avoirs américains à l’extérieur étant essentiellement composés d’actions alors que les créances étrangères correspondent à des titres obligataires sur le Trésor américain. La différence de rendement entre des actions et des obligations explique que les États-Unis restent, en dépit de leurs déficits, des investisseurs bénéficiaires.
Les partenaires des Américains peuvent, par contre, y laisser quelques plumes même lorsque les investisseurs cherchent refuge dans les bons du Trésor US pour se prémunir contre certains risques à travers une baisse de la rémunération des placements. Le résultat en est que les Etats épargnent plus pour gagner moins. D’autres inquiétudes sont exprimées par l’expert. «On pourrait assister à une chute du dollar américain qui entraînerait une vente massive des bons du Trésor. Aussi, je suis sceptique pour les 80% des réserves de change algérien placées à l’étranger dont 45% en bons du Trésor américains et 45% en euros quant aux déclarations du gouverneur de la Banque d’Algérie, lequel affirme que le rendement de ces réserves est de l’ordre de plus de 4%, ramenant presque 5 milliards de dollars d’intérêts par an», dit-il. Le rendement est bien en deçà, affirme Mebtoul.
Mais l’Algérie n’est pas le seul pays à déposer ses réserves à l’étranger. La Chine, deuxième puissance économique mondiale, en fait de même.
Courant 2010, sur 2450 milliards de dollars de réserves de change chinois, une grande partie est libellée en dollars. A fin août 2010, la Chine détenait un total de 868,4 milliards de dollars de bons du Trésor américain, selon des chiffres officiels américains.
Le hic est que Standard and Poor’s alerte en affichant une perspective négative de l’économie américaine. Le pronostic de Mebtoul est le suivant: la situation actuelle est insupportable et dangereuse et conduira au chaos si l’on n’entreprend pas de réformes profondes. Si les Etats-Unis ne mettent pas de l’ordre dans leur budget et ne font pas davantage d’économies, ils vont au-devant de problèmes douloureux avec pour risque d’accentuer la récession mondiale, le dollar représentant en 2010, pas moins de 60% des transactions mondiales contre 27% pour l’euro.
Pour l’Europe, des pays comme la Grèce, l’Italie, le Portugal et l’Espagne seront tôt ou tard menacés d’insolvabilité et l’Union européenne redoutera tôt ou tard que ces pays ne sombrent dans un chaos semblable à celui de l’Argentine en 2002 et de l’Islande en 2008, selon la même source. Ces chocs vont bouleverser une nouvelle fois l’économie mondiale. D’où l’urgence d’une refonte du système monétaire international avec de nouvelles institutions de régulation, préconise l’expert international