De l’aube au coucher de soleil, ils tiennent leurs places défiant la chaleur et la fatigue. Armés de courage et de détermination, ils ne laissent jamais paraître des signes de fatigue ou d’ennui. Ils sont conscients de leurs responsabilités notamment leur contribution aux dépenses de la famille. Ces enfants vendent des galettes, de l’eau minérale, des bonbons ou des cigarettes pendant toute la période des grandes vacances.
Les congés, le repos et le farniente n’ont pas droit de cité chez ces bambins à l’enfance gâchée. Ils sont appelés à assumer une lourde responsabilité, celle d’aider leurs familles à pallier les besoins d’une vie quotidienne qui devient de plus en plus dure. Ils défient les risques et les aléas de Dame Nature et exercent des activités, certes, peu rentables mais ils parviennent, tant bien que mal, à gagner quelques sous.
Aux abords des autoroutes, ils exposent des galettes et du tabac. Sur les plages, ils n’arrêtent pas de «vadrouiller», proposant leurs services aux estivants. C’est le cas de Rafik qui passe sa journée au niveau de la plage de Zéralda. Vêtu d’un jean et d’un tee-shirt usés et de sandales en caoutchouc, cet enfant propose du tabac, des bonbons, du chewing-gum et du chocolat.
A douze ans, sa voix est déjà rauque, tant il ne s’arrête pas de parler pendant de longues heures. Rafik porte deux sacs lourds, se balade entre les parasols et tente d’attirer l’attention d’éventuels clients.
«Du matin au soir, je vends environ une trentaine de paquets de cigarettes et une bonne quantité de bonbons et de tablettes de chocolat. J’arrive quand même à gagner une moyenne de 400 DA par jour pour aider ma famille», confie cet enfant dont la peau est déjà brûlée par le soleil. Les petits vendeurs à la sauvette tentent de cacher leur misère et résistent à la chaleur et aux intimidations de certains gens malveillants qui les traitent de tous les noms.
Sauf qu’une fois assis pour reprendre leur souffle, ils se laissent aller à leur tristesse profonde. Tenant sa tête entre les mains, Rafik se lance dans une longue lamentation. «Aâlach Ya rebbi, aâlach maândich ez’har ? Aâyit khlass, aâyiiit !!!….» (Pourquoi je n’ai pas de chance mon Dieu, pourquoi ? Je suis exténué, je n’en peux plus !!!), sanglote Rafik. La fatigue et la faim ont eu raison de ses forces, mais quelques minutes après, il se relève et poursuit sa randonnée.
Cette catégorie d’enfants partage un seul souci : rentrer à la maison avec un sachet plein de pain, fruits et légumes. «Ma grande joie est lorsque ma mère me reçoit avec le sourire. Je lui donne une petite somme d’argent, des fruits, des légumes et du pain. Je me sens réellement un homme capable de prendre ses responsabilités», dit sur un ton de fierté, Karim, 11 ans, qui vend, lui aussi, des bonbons, des cacahuètes et du tabac sur la plage de Sidi Fredj.
Et c’est la même déclaration faite par tous les enfants. Chacun s’exprime, bien évidemment à sa manière, mais leur objectif est le même : rendre la maman heureuse en contribuant aux revenus de la famille.
M.F