Pour les deux “Nahnah boys”, le temps est venu de mettre au placard les divergences personnelles et doctrinales pour réussir l’union Djamaâ Achaml, le slogan cher aux islamistes.
“Nous aussi nous voulons gouverner ce pays.” C’est ce qu’a affirmé, avant-hier à Boumerdès, le chef du MSP, Abderrezak Makri, lors d’un regroupement de centaines de militants issus notamment du parti MSP et celui du Front du changement de Abdelmadjid Menasra. Ainsi, après leur “débarquement” la semaine dernière à Sidi-Fredj à l’occasion du 10e anniversaire de la mort du fondateur du MSP, Mahfoud Nahnah, les partis islamistes ont choisi cette fois la ville de l’ex-Rocher noir qui a abrité le siège du GPRA pour affermir davantage leur réunification en prévision de l’élection présidentielle de 2014.
Et c’est à l’hôtel Soummam qu’a eu lieu ce deuxième rassemblement en l’espace d’une semaine, même si celui-ci n’a réuni cette fois-ci que ces deux partis qui ne cessent d’afficher leur ambition à “fédérer” la mouvance islamiste. Et c’est au rythme de la chanson ô combien significative de Rabah Driassa, Yahiaou ouled bladi khaoua fi koul m’kane (que vivent les enfants de mon pays, ils sont frères là où ils sont), qu’a été entamé ce meeting, le premier du genre au niveau national.
C’est en tout cas ce qu’a déclaré M. Menasra qui a précisé que c’est pour la première fois que les militants des deux partis se retrouvent dans un même regroupement.
Le chef du FC, qui semble accueillir avec enthousiasme ces retrouvailles, a voulu rassurer son ex-frère ennemi, M. Makri, assis à côté de lui, mais aussi les autres leaders des partis islamistes absents à ce conclave. “Je n’ai aucune ambition à me présenter candidat à la prochaine élection présidentielle mais nous souhaitons avoir un seul candidat à cette élection”, a-t-il expliqué. Il se dit favorable à un consensus pour cette élection et pour l’organisation des élections législatives et locales anticipées. Menasra invite ses ex-compagnons à “mettre les divergences et les divisions de côté” pour bien lancer cette union .Un appel du pied au reste des partis islamistes hésitant encore à se joindre à cette alliance.
C’est en tout cas ce qui ressort des déclarations de l’orateur qui a avoué avoir lancé un appel aux dirigeants du parti Harakate Bina El-Ouatane (Mouvement pour l’édification nationale) de Mustapha Bel Mahdi et aux autres frères pour qu’ils s’allient à cette initiative de réconciliation. “De son vivant, Cheikh Nahnah nous avait unis ensemble, je suis sûr qu’il sera ravi, à partir de sa tombe, de nous voir réconciliés et réunis”, a-t-il expliqué. Évoquant la maladie du président de la République, il a jugé inconvenant pour le moment de demander l’application de cette disposition. Une façon de montrer encore une fois son harmonie avec M. Makri qui avait déclaré tout récemment que l’appel à l’application de l’article 88 de la Constitution “est un piège” dans lequel il “évite de tomber”. Abordant les questions d’actualité, le premier responsable du FC estime que le pays vit encore dans la terreur. “Il n’est pas normal qu’en 2013 on continue à parler de hebheb”, avant d’ajouter que la population souffre de beaucoup de privations. Lui succédant à la tribune, M. Makri a d’emblée averti que l’initiative de réconciliation et d’union n’a pas été conclue en prévision de la prochaine élection présidentielle bien que cette échéance importante nous intéresse énormément, a-t-il précisé.
Le chef du MSP a, lui aussi, prôné l’unité des rangs. “Nous ne voulons pas mourir désunis et divisés mais il faut vivre unis car l’unité fait la force et nous aussi, nous avons l’ambition de diriger le pays”, a-t-il martelé. Le nouveau chef du MSP semble faire allusion aux autres pays maghrébins qui sont dirigés par les partis islamistes. “Nous avons trop patienté et le pouvoir nous a enlevé la victoire en 1995”, a-t-il souligné. Et d’ajouter : “Notre parti a payé un lourd tribut puisque plus de 400 de nos militants ont été assassinés lors de la décennie noire, mais nous sommes toujours debout.” Ainsi, le chef du MSP, qui a reçu, la semaine dernière, la bénédiction de M. Ghannouchi pour le poste de candidat des islamistes à la présidentielle de 2014, semble avoir le vent en poupe, si l’on juge par les multiples efforts qu’ils ne cessent de déployer, ces derniers temps, pour unir les partis de la mouvance islamiste. M. Makri, qui parle déjà d’une union retrouvée bien qu’elle ne semble pas facile à mettre en œuvre, affiche clairement son ambition à s’emparer de l’investiture suprême.
La maladie du Président, le Printemps arabe, les crises que traversent les autres partis politiques, notamment le FLN et le RND, ajouté à cela les scandales de la corruption et l’ébullition que connaît le front social, ce sont là les ingrédients qui semblent galvaniser les islamistes à s’associer pour mieux bondir.
M. T.