Ils font le bonheur des instituts de recherche étrangers,L’Algérie perd ses « têtes »

Ils font le bonheur des instituts de recherche étrangers,L’Algérie perd ses « têtes »

Les slogans ne font pas la recherche

Elias Zerhouni, Kamel Senhadji, Noureddine Melikechi, Belkacem Haba, Kamel-Youcef Toumi… et Abdennour Abbas… pour ne citer que ces noms, ont quitté le pays pour des cieux plus cléments.

La recherche scientifique en Algérie semble se chercher, en l’absence d’une politique cohérente, adaptée à la demande et surtout mettant en valeur la base même de ce domaine, à savoir la ressource humaine. Des milliers d’universitaires, de chercheurs, de penseurs dans divers horizons de la connaissance ont quitté le pays après avoir été formés par l’Ecole et l’Université algériennes.

Elias Zerhouni, Kamel Senhadji, Noureddine Melikechi, Belkacem Haba, Kamel-Youcef Toumi… et Abdennour Abbas… pour ne citer que ces noms, ont quitté le pays pour des cieux plus cléments. Puisque la recherche scientifique est avant tout un environnement, des objectifs et une motivation, ces Algériens, mus par l’ambition d’évoluer, préfèrent offrir leurs

services à des laboratoires et autres centres de recherche étrangers, notamment français et américains. Ils sont pour la plupart spécialisés dans les technologies de pointe, la robotique, lélectronique, l’astronomie, la médecine…Leurs recherches servent à assurer la prospérité des autres.

D’ailleurs, au 1er janvier 2013, quelque 516 chercheurs algériens, établis à l’étranger et une infime minorité en Algérie, ont déposé 2891 brevets d’invention dans 21 pays, selon le site www.algerianinventors.org dédié aux chercheurs algériens. A quoi a donc servi la décision du gouvernement de recenser les cerveaux algériens à l’étranger? La réponse est évidente: à rien! La plupart des chercheurs établis, aussi bien à l’étranger, qu’en Algérie, considèrent que l’initiative du département de M.Harraoubia est inutile tant que l’Etat n’est pas prêt à fournir tous les moyens nécessaires au profit du développement de la recherche scientifique en Algérie.

Déjà que les intellectuels et autres chercheurs locaux ne sont pas pris en charge, comment peut-on songer à récupérer ceux qui sont perdus à jamais. Aussi, à quoi servirait un autre recensement, sachant que cette opération a déjà été lancée deux fois de suite, sans qu’elle n’aboutisse à un quelconque résultat?

Sur un autre chapitre, nos chercheurs établis à l’étranger depuis déjà des années, et dont la plupart ont pris la nationalité de l’Etat hôte, ne voient pas l’opportunité d’un retour dans un pays où l’environnement de la recherche est quasi inexistant. Avec les privilèges dont ils jouissent dans ces pays, les chercheurs algériens expatriés ne voient pas pourquoi ils sont appelés à revenir au pays.

Par ailleurs, mal organisée, la recherche scientifique en Algérie peine à se mettre sur pied, en dépit des énormes budgets mobilisés. Cependant, sur les 100 milliards de dinars alloués à la recherche, 35% uniquement ont été consommés pour l’exercice 2010-2014. C’est ce qu’a déploré, mercredi dernier, le secrétaire général du Syndicat national des chercheurs permanents (Sncp), le Pr Smati Zoghbi.

L’Algérie compte 2200 chercheurs permanents et 43.000 enseignants chercheurs et seulement 5000 d’entre eux s’investissent dans la recherche. Le professeur a indiqué que le manque de ressources humaines en quantité et qualité était «le talon d’Achille» du secteur, appelant, à cette occasion, à valoriser cette ressource en lui donnant tous les moyens de son épanouissement.

Comment veut-on donc, à la lumière d’une telle situation, que les chercheurs expatriés reviennent au pays? En somme, si ces derniers quittent le pays, c’est parce qu’ils sont mieux payés et considérés. La preuve: des pays à l’image des Etats-Unis essaient à tout «prix» de capter les compétences algériennes en faisant la promotion de leurs recherches.

Les exemples ne manquent pas à l’image de Belkacem Habba qui détient pas moins de 200 brevets d’invention dans le domaine de l’électronique ou encore Noureddine Melikechi qui avait dirigé l’équipe de la Nasa qui avait envoyé le robot Curiosity sur Mars.

L’hémorragie continue. Selon certains chiffres l’Algérie a perdu entre 1994 et 2006 quelque 71.500 diplômés universitaires qui ont quitté le pays. Cette fuite des cerveaux a causé à l’Algérie des pertes estimées à quelque 40 milliards de dollars, selon le même chercheur. Pour la même période, plus de 10.000 médecins ont quitté l’Algérie pour s’établir essentiellement en France.

Les universités nord-américaines, quant à elles, ont accueilli pas moins de 18 000 universitaires algériens et cadres de haut niveau, parmi lesquels figurent 3000 chercheurs. Un constat amer qui renseigne sur le fait que la politique de recherche scientifique en Algérie est loin de répondre aux attentes des chercheurs, qui pourtant n’attendent qu’un signe encourageant pour faire leurs bagages.