Ils en sont à leur 15 ème jour de grève, Les enseignants à l’école buissonnière

Ils en sont à leur 15 ème jour de grève, Les enseignants à l’école buissonnière

L’école est aujourd’hui sinistrée

Alors que les examens de fin d’année approchent à grands pas, comment faire pour récupérer toutes ces heures de cours perdues?

Tragique est l’actuelle situation de notre système éducatif. Le mot n’est pas fort. Depuis trois semaines, les enseignants font l’école buissonnière. Ni la justice, qui a décrété la grève illégale ni les appels des parents à la sagesse, encore moins l’ultimatum qui expire demain lancé par le ministère de l’Education qui vont les faire plier. 15 jours de grève et la situation ne fait que se corser. Il faut bien mettre le holà maintenant et rappeler aux enseignants que quelle que soit la nature de leurs revendications, il y a une ligne rouge à ne pas franchir.

Et surtout, il y a un moment où l’on doit convoquer l’éthique et la morale au détriment de leurs propres requêtes aussi légitimes soient-elles. Comment peuvent-ils accepter de voir des millions d’élèves à la dérive? N’est-ce pas que l’on tombe sous le coup d’abus de faiblesse, prise en otage et chantage abject? Alors que les examens de fin d’année approchent à grands pas, comment faire pour récupérer toutes ces heures de cours perdues? Déjà que ce retard est préjudiciable pour le moral des élèves et il aura un impact négatif sur la qualité de l’enseignement après la reprise des cours. «Tout retard dans la scolarité est préjudiciable pour l’élève, même s’il ne s’agit que d’une seule journée. Des études scientifiques menées par des spécialistes en chronobiologie ont démontré qu’au bout d’un certain nombre d’absences, les connaissances mémorisées par l’élève commencent à diminuer», a estimé le pédagogue Ahmed Tessa. A ce propos, il a insisté sur la dimension psychologique, laquelle doit être grandement prise en considération au moment des rattrapages, en raison de «l’impact psychologique» sur les élèves, conséquemment à cette grève. Cependant, on en est plus dans ce cas. Le ministère menace et donne demain l’ultimatum pour la reprise des cours. Les syndicats grévistes, l’Unpef, le Snapest et le Cnapest répliquent que «les mises en demeure ne vont pas nous pousser à surseoir à notre débrayage. Seuls un dialogue fructueux et une prise en charge concrète de nos revendications peuvent nous amener à reprendre le travail». On assiste donc à des échanges belliqueux, mais qui appellent à d’autres lectures encore plus dangereuses que cette grève.

Comme les lobbys sont légion depuis ces derniers temps, ces mêmes lobbys ne chercheraient-ils pas à faire fuir les parents de l’école publique. De ce fait, ils rendraient un grand service à ceux qui, justement, pensent à se débarrasser de ce boulet à problèmes. L’école privée n’est pas une nouveauté en Algérie. Elle ne fait plus peur. Pourquoi ne pas lui donner un bel essor? L’idée fait son petit bonhomme de chemin. Une autre «accusation», trop simpliste celle-là, tient au fait que les enseignants sont tout simplement instrumetalisés pour créer, avec cette grève, un climat délétère à la veille de l’élection présidentielle. Cette intrusion de la politique dans la sphère éducative va complètement achever ce qui reste encore du «cadavre» de l’école algérienne. Considérée comme l’un des grands acquis de l’indépendance, l’école est aujourd’hui sinistrée. Elle est devenue une fabrique d’exclusion, à voir le nombre effarent de déperditions. Chaque année, entre 400.000 et 500.000 élèves quittent les bancs de l’école pour rejoindre la rue sans aucune perspective. Sur 100 élèves qui entament leur scolarité au primaire, neuf seulement arrivent à décrocher le fameux sésame du baccalauréat et cinq un diplôme universitaire. La déperdition n’est pas la seule tare de cette école. La violence et la drogue ont fait également leur «rentrée» dans ce milieu jadis sain. Selon une étude élaborée en 2013 par le CLA (Conseil des lycées d’Alger), pas moins de 300 cas de violences ont été enregistrés au sein et aux alentours des établissements scolaires entre septembre et décembre 2013.

Quant à la drogue, ça fume de partout pour l’école algérienne. Selon l’enquête du même CLA, effectuée en milieu scolaire, l’enquête a concerné 14 académies dans 36 villes. Sur un échantillon de plus de 6000 élèves, 15,6% interrogés ont déclaré avoir «goûté» au cannabis, 8,4% ont consommé occasionnellement durant une année et 8,2% ont eu une consommation régulière. Des chiffres qui font peur. Il est temps d’ouvrir un débat général sur l’école algérienne pour arrêter le sinistre