Il se dit surpris par l’arrestation des non-jeûneurs en Kabylie Ksentini évoque des lacunes dans la justice algérienne

Il se dit surpris par l’arrestation des non-jeûneurs en Kabylie Ksentini évoque des lacunes dans la justice algérienne
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J’ai été surpris par l’arrestation des jeunes qui n’ont pas observé le carême. Il est inopportun de faire comparaître des jeunes devant la justice pour avoir étanché leur soif en plein jour.

Le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l’Homme (CNCPPDH), Mustapha Farouk Ksentini, a dressé un bilan peu reluisant sur la justice algérienne. Intervenant hier sur les ondes de la Radio nationale, Chaîne III, maître Ksentini a estimé que la justice algérienne «n’est pas à la hauteur de ce qu’elle devrait être».

«L’urgence est de réformer le système judicaire. Il est très difficile de juger une personne que de faire une opération chirurgicale», a-t-il dit. Pour les raisons d’absence d’une justice de qualité, l’intervenant a remis en cause le niveau intellectuel des magistrats algériens. «Pour une justice de qualité, il faut former des juges de qualité.

C’est la formation des magistrats qui pose problème», a expliqué l’avocat qui laisse entendre que la réforme de la justice est devenue davantage une question de théorie que de pratique concrète. Selon lui, le phénomène de la corruption «est très mineur» dans le traitement des affaires devant les tribunaux. Mais, «il faut, dit-il, une culture générale qui accompagne la culture juridique des magistrats».

Toutefois, maître Ksentini a défendu les juges algériens, estimant que la responsabilité n’incombe pas à ces derniers mais plutôt aux systèmes d’enseignement qui a été mis en place. Le président de la CNCPPDH s’appuie sur des exemples concrets pour défendre son réquisitoire. «J’ai été surpris par l’arrestation des jeunes qui n’ont pas observé le carême. Il est inopportun de faire comparaître des jeunes devant la justice pour avoir étanché sa soif en plein jour.

Celui qui ne veut pas faire le carême il n’a qu’à manger, mais dans la discrétion totale pour respecter la conscience des autres», soutient-il. «On ne doit rien dire du moment qu’ il n’y a pas de disposition légale qui interdit de fait de ne pas observer le jeûne», ajoute l’intervenant, soulignant que «ces arrestations ne sont pas décidées au sommet de l’Etat, mais plutôt par les policiers qui agissent à leur guise».

Dans le même chapitre, l’avocat a estimé que l’Algérie n’a pas progressé dans le domaine des libertés individuelles et de conscience. Maître Ksentini n’a pas caché sa colère devant le tapage médiatique qu’a suscité cette affaire. «Il est inutile de ternir l’image de l’Algérie par des affaires pareilles. Il ne faut pas se laisser piéger», a-t-il dit.

«Le terrorisme est totalement vaincu»

S’étalant sur plusieurs questions, le président de la CNCPPDH a évoqué également la charte pour la paix et la réconciliation nationale qui en est à sa cinquième année depuis son application. Dans ce sens, l’avocat a indiqué que malgré les quelques insuffisances de cette loi, «le bilan est très positif». «Ce n’est pas facile de réconcilier tout le peuple. C’est une opération très compliquée et qui a heureusement obtenu le résultat escompté, à savoir le retour de la paix et de la sécurité», a-t-il annoncé.

«L’application de la charte a été menée laborieusement parce que l’Algérie est un pays hautement bureaucratique. Il est évident donc de rencontrer des difficultés», a soutenu l’invité de la chaîne III.

Interrogé sur la situation sécuritaire du pays, le responsable a annoncé que «le terrorisme est totalement vaincu et démobilisé sur les plans militaire et moral», soulignant que le banditisme a fait des ravages, notamment en milieu urbain. S’agissant des personnes qui ont subi des pertes matérielles durant la décennie noire, l’avocat a demandé l’indemnisation de cette catégorie, rappelant que les dégâts matériels occasionnés par le conflit armé sont estimés à 20 milliards de dollars.

La question des personnes soupçonnées de terrorisme et déportées au sud algérien est toujours en suspens. A ce sujet, maître Ksentini demande réparation au profit de ces personnes qui sont, selon ses dires, «coupables de rien» et victimes d’une situation sécuritaire imposée. Concernant les enfants nés dans les maquis, l’intervenant a indiqué que la procédure de leur intégration dans la société «n’est pas encore entamée».

«Des Algériens travaillent contre l’Algérie !»

Farouk Ksentini s’est attardé également sur le dossier épineux des disparus. Dans ce chapitre, l’avocat a déclaré que cette question «est close si on se réfère aux textes de la charte pour la paix et de la réconciliation nationale». «95% des familles des disparus ont accepté une indemnisation.

Il ne reste qu’une seule famille de 10 personnes qui fait du dossier un fonds de commerce et qui sert les ONG pour ternir l’image de l’Algérie», a asséné l’intervenant ajoutant que le dossier est «récupéré»par plusieurs parties en Algérie et à l’étranger. «Il n’y a pas une guerre propre. L’Etat était en légitime défense.

Il est malhonnête de culpabiliser l’Etat puisqu’il n’est pas responsable du terrorisme. Certains ont intérêt à perpétuer ce problème», a-t-il indiqué. L’avocat a accusé certains militants et associations de droits de l’homme installées en Algérie de donner de fausses informations aux ONG qui établissent des rapports accablants sur l’Algérie. «Nos militants ne connaissent pas les enjeux de ces organisations.

Ils travaillent contre leur pays sans le savoir. Il n’y a qu’à voir la position de ces ONG lorsqu’il s’agit de la Palestine et du Sahara occidentale pour se rendre compte de leur complicité», déplore-t-il. S’agissant de l’invitation adressée par l’Algérie aux organisations internationales de défense des droits de l’homme, maître Ksentini a indiqué que pour l’heure, ces autorisations concernent exclusivement les rapporteurs de commissions spécialisées aux Nations unies sur l’ensemble du paquet concernant les droits de l’homme dans leurs multiples volets.

L’avocat a souligné que l’Algérie est en train de «s’alphabétiser»dans le domaine des droits de l’homme rappelant «les progrès» réalisés dans la promotion des droits de l’homme et les libertés fondamentales.

Par Hocine L.