Il présentera son libre «Les chansons de la Casbah»: Dellai à la rencontre de ses lecteurs

Il présentera son libre «Les chansons de la Casbah»: Dellai à la rencontre de ses lecteurs

Avec la participation d’architectes, d’historiens, d’écrivains, de poètes et de journalistes, la rencontre aura lieu ce samedi 23 février à l’occasion de la Journée nationale de la Casbah.

Né en 1954 à Oran, Ahmed Amine Dellaï a effectué des études de sociologie à Paris. La recherche sur le «melhoun» qui le passionnait déjà personnellement est devenue son objet d’étude principal. Parmi ses publications sur le sujet, une anthologie des textes du «melhoun» parue en 1996 ainsi que Les chants de la Casbah, paru en 2003 à l’Enag dans le cadre de «l’Année de l’Algérie en France» et Paroles graves, paroles légères (chantres de l’Ouest algérien) paru en 2005. Il codirige avec le professeur Hadj Miliani un groupe de recherche sur les cultures populaires en Algérie auprès du Crasc (Centre de recherche en anthropologie et sciences sociales).

Le chaâbi-melhoun d’Alger

Force est de reconnaître aux maîtres du chaabi algérien, le mérite d’avoir revisité avec talent et bonheur, les qacidas du patrimoine poétique arabe maghrébin, quelque peu oubliées, et, qui plus est, de les avoir choisises avec un goût très sûr. Textes marocains, pour la plupart, qu’ils ont dépoussiérés, et auxquels ils ont redonné un nouveau souffle, une nouvelle vie, et une audience plus large. La verve, le brio, parfois la truculence, et cette nervosité, cette sensibilité à fleur de peau, typiquement algériens, ont tellement habité, transfiguré ces textes, au-delà des nuances dialectales mêmes, qu’ils sont devenus, au fil du temps, une partie intégrante de l’univers poétique et musical de notre pays. Et le temps était venu, nous a-t-il semblé, de rassembler et de publier une partie, non négligeable, de ce répertoire qui a longtemps nourri les rêveries de nos parents et grands-parents. De le sauver de l’oubli, et de le rendre, matériellement et intellectuellement, aussi accessible que possible aux générations présentes et futures qui y trouveront, elles aussi, matière à enchantement et, pourquoi pas, à réflexion.

Chansons de la Casbah est le titre d’un livre élaboré par Ahmed Amine Dellai qui semble vouloir parler de toutes les casbah, celles de Constantine, de Marrakech, d’Alger ou de toute autre ville ancienne avec ses nombreux vestiges, ses odeurs, ses couleurs, ses artisans et cafetiers, ses hommes et femmes qui l’ont glorifiée dans les maisons aux patios enluminés par une mosaïque multicolore. C’est la ville arabe dans toutes ses spécificités architecturales et humaines.

Un livre, une longue histoire

En composant pour la chanson, les poètes ont aussi fait l’histoire de leur cité, mais leurs poésies ont tendance à devenir aujourd’hui anonymes; le livre d’Ahmed Amine Dellai arrive à point nommé pour susciter le désir de connaître, rappeler que derrière chaque chanson du chaâbi il y a un nom à retenir, celui d’un homme ou d’une femme qui a mis ses qualités artistiques et ses capacités d’expression au service d’une cause sacrée.

Le livre de Ahmed Amine Dellai, qui a vu le jour aux éditions Enag en 2003, apporte aux jeunes intéressés, dont des descendants de la Casbah, ce qu’ils n’ont pas le droit d’ignorer. Et si nous en parlons, c’est non pas seulement parce qu’il s’agit là d’une partie intégrante d’un pan de nos traditions culturelles, mais par souci de reconstituer une longue histoire.

La Casbah adulée par ses chanteurs

L’Algérien ou le Maghrébin qui croit encore en l’avenir du passé doit se sentir fier du patrimoine hérité des ancêtres. Ahmed Amine Dellai est de ceux qui ont contribué à la reconstitution de cet héritage, apportant par là la preuve que les mentalités vont dans le sens de la dégradation. La documentation est telle que les jeunes d’aujourd’hui attirés pour la plupart par les musiques d’ailleurs, ne se reconnaissent plus dans les productions de nos anciens qui étaient incontestablement des artisans du langage.

L’auteur est allé chercher dans le «melhoun» qui a donné naissance aux genres musicaux dits populaires, comme le chant bédouin oranais, le «ayay» des Hauts-Plateaux, le malouf constantinois, le haouzi tlemcénien, le aroubi de la région algéroise, le asri, le raï, le chaâbi dont cheikh M’hamed El Anqa et Dahmane El Harrachi restent des figures de proue.

Les chanteurs de toutes les générations ont su mettre en valeur leur musique vocale en l’adaptant aux textes poétiques du genre haoussa, melhoun, moghrabi ou a toute autre composition de paroliers, pour chanter avec un accompagnement instrumental approprié.

C’est de cette façon que de grandes qacidas classiques ont charmé des générations au points d’acquérir, au fil du temps, une grande popularité.

Ayant été désigné sous différentes appellations, comme le zajul maghrébin, le chaâbi a gagné l’estime des masses populaires pour son rythme et son contenu.

Si le public est pleinement satisfait, c’est parce que cette poésie chantée a su répondre à l’attente du public en prenant en charge l’ensemble de ses préoccupations. Comme toutes les musiques populaires du monde, le chaâbi reste indémodable et peut encore connaître de beaux jours si rien ne vient bouleverser la vie.

Le chaâbi ou genre indémodable

En dépit de son nom péjoratif, «melhoun», qui lui a été choisi par des hommes de lettres d’une certaine époque, en raison de ses écarts aux normes syntaxiques et lexicales, cette poésie garde sa valeur et sa qualité d’adaptation à la musique instrumentale.

Parlant de cette forme de chaâbi, Léon l’Africain (Description de l’Afrique), cité en introduction par l’auteur de ce livre, dit en son temps (XVIe siècle) que les poètes étaient à l’origine soumis à une sorte de compétition sur le plan de la production versifiée, qui rappelle quelque peu les joutes oratoires; chacun composait dans son coin, et le jour de la rencontre, coïncidant avec la journée du Mouloud Ennabaoui, était déclaré meilleur poète ou prince des poètes de l’année.