Il s’était distingué auparavant en se rendant disponible pour l’initiative du FFS, malgré la position du MSP qui milite, lui, dans le cadre de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD).
L’ancien président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Abou Djerra Soltani, ne semble pas être parvenu à digérer le retrait de son parti de l’alliance présidentielle, lequel a entraîné, du coup, son propre abandon du gouvernement.
L’engagement actif dans une perspective politique réunissant l’essentiel des segments de l’opposition l’agace tellement qu’il ne s’en cache point. À ses déclarations sur les différents plateaux de télévisions privées qu’il écume depuis plusieurs jours, à travers lesquelles il clame haut et fort son opposition à la ligne de conduite actuelle du MSP, il saisit l’opportunité de son passage au “Foutour el-Sabah” d’El Khabar pour menacer carrément de reprendre les rênes du parti si ce dernier persiste “dans l’opposition gratuite au pouvoir”.
S’il prend la précaution d’indiquer que cette “reprise” se ferait dans le respect des règles de la démocratie, il n’en demeure pas moins que la perspective, même conditionnelle, esquissée par Soltani, rapportée au magma partisan national, vaut acte préliminaire de dissidence.

Elle consigne pour le moins la
sortie du bois d’un homme que l’infortune politique a poussé à l’embuscade. L’examen du leitmotiv autour duquel Soltani articule son discours le laisse en tout cas supposer. L’ancien président du MSP et, également, longtemps ministre de la République, affirme ne pas cautionner, voire exprimer un refus catégorique de ce qu’il désigne par “une opposition gratuite au pouvoir” ainsi que “la fermeture des voies de communication avec autrui”. En d’autres termes, Soltani énumère dans ce propos les deux principaux griefs qu’il retient contre son successeur à la tête du parti.
En vérité, en portant l’estocade à Makri, qu’il ne nomme pas, faut-il le souligner, Soltani ne fait qu’enchaîner avec une indiscipline dans laquelle il s’était distingué auparavant en se rendant disponible pour l’initiative du FFS, malgré la position du parti qui milite, lui, dans le cadre de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD). Soltani ne fait donc pas cas du rappel à l’ordre qui lui a été alors signifié par la direction du parti.
Il prend même sur lui d’aggraver son cas : “Au moment où le MSP agissait seul en tant que parti, ses décisions étaient claires. Maintenant celles-ci sont diluées dans la CNLTD. Il se trouve que beaucoup de militants du MSP ne cautionnent pas les orientations de la coordination (…).” Il est clair, cela noté, que Soltani s’affiche dans une position en net déphasage avec les positions du parti. Et le fait qu’il en fasse cas publiquement le place en dissident potentiel, sinon en redresseur de trajectoire.
En effet, que déduire d’autre qu’une offre de service quand Soltani soutient qu’il est disposé à intégrer le gouvernement, pour peu que ce dernier se présente comme un Exécutif d’union nationale ?
Pour itératives qu’elles soient, les critiques que Soltani formule à l’encontre de la direction du MSP trahiraient, peut-être, une tentative de récupération du parti, anciennement allié, par le pouvoir qui se sent acculé par une opposition de mieux en mieux structurée. La conjoncture dans laquelle intervient “cette montée au front” de Soltani accrédite cette hypothèse.
En même temps que l’ancien président du MSP ferraille à récupérer, sinon à tout le moins rectifier la trajectoire politique que la nouvelle direction a dessiné pour le parti, le bal des courtisans s’est animé avec l’intention prêtée aux forces agissantes du pouvoir de faire chevaucher à nouveau à Ouyahia l’aventure du leadership partisan. Le RND, à en croire les quelques balbutiements qui échappent du sérail, vivrait prochainement un chamboulement organique notable à travers le replacement d’Ouyahia dans sa fonction de secrétaire général du parti, Abdelkader Bensalah étant jugé politiquement peu agressif.
Le pouvoir, effrayé par la résistance à l’usure de la CNLTD et du reste des regroupements de l’opposition, se rabattrait sur une vieille recette qu’il connaît bien : la manœuvre. En même temps que tenter de redonner du tonus aux partis comme le RND et le FLN, le premier étant considéré comme mou et peu entreprenant et le second englué dans ses tiraillements internes, le pouvoir essaie d’introduire le loup dans la bergerie de l’opposition. L’action d’Abou Djerra Soltani vise sinon à récupérer le MSP, ou à tout le moins l’affaiblir. Un affaiblissement qui, dans l’esprit des concepteurs du projet, entraînerait celui de la CNLTD dans laquelle active le MSP.