L’ancien Premier ministre et patron du RND, pour qui l’accès à la magistrature suprême est une «rencontre entre un homme et son destin», est largement en tête des «sondages» pour être le «candidat du consensus» et jouir du soutien de nombreuses formations politiques, à commencer par le FLN lui-même.
Lorsqu’Ahmed Ouyahia avait trompé toutes les prévisions en décidant, sur un coup de tête semblait-il à l’époque, de quitter la direction de son parti, tout le monde le donnait comme fini sur le plan politique.
Seul notre journal, à cette époque, avait au contraire indiqué que cet ancien chef de gouvernement et Premier ministre, qui se plait luimême à se définir comme étant un «revenant», n’avait au contraire reculé que pour mieux sauter.
Bien avant que le président Bouteflika ne tombe malade, Ahmed Ouyahia, lors d’une conférence de presse, quand il était encore secrétaire général du RND, avait répondu en ces termes à une question relative à un quatrième mandat présidentiel alors que nous étions en pleine menace de printemps arabes : « est-ce que vous pensez que cela rendrait service à l’Algérie, ou même au chef de l’État, d’aller vers un quatrième mandat ? ».
Ouyahia, dont l’envergure politique n’est pas à faire, à qui on finit toujours par refaire appel, et qui ne laisse personne indifférent (que l’on soit ou non d’accord avec lui), ne pouvait avoir été défait par une Nouria Hafsi elle-même victime d’un mouvement de redressement au sein de l’UNFA, cette coquille vide qu’elle dirige, ou bien Yahia Guidoum, un éminent professeur, un grand professionnel certes, mais venu à la politique par « effraction » du temps où le clan de Constantine régnait sur le sommet de l’État.
Notre journal, qui ne s’était pas laissé berner, ni bercer, par ces manoeuvres de haute voltige, dont seul était capable un homme qui a survécu à plusieurs «morts politiques», revenant à chaque fois un peu plus fort et plus caparaçonné, avait su prédire qu’Ouyahia n’avait fait que reculer pour mieux sauter.
Il avait ajouté qu’Ahmed Ouyahia, parfaitement présidentiable pour des raisons qui seront détaillées plus loin dans ce texte, se devait donc de trouver prétexte des attaques qu’il essuyait de la part de Nouria Hafsi et Yahia Guidoum pour claquer la porte du RND.
En fait, ce parti, né avec des moustaches, particulièrement controversé depuis qu’il a eu autant de hauts que de bas, et qu’il a été obligé de renoncer à la doctrine éradicatrice qui avait présidé à sa naissance, était forcément devenu «trop étroit» pour un homme qui ne vise rien moins que la magistrature suprême.
Bref, Ahmed Ouyahia, qui ménage parfaitement ses images et ses sorties médiatiques, a tout simplement disparu des écrans radars et s’est improvisé muet comme une carpe, obligeant les uns à le décréter définitivement «mort» sur le plan politique, et les autres à ne l’évoquer que pour en parler au passé, ce qui revient au même.
UN CANDIDAT «CONSENSUEL» RESTE UNE OPTION TRÈS PROBABLE
Aujourd’hui, les informations de première main livrées par TSA donnent l’air de confirmer les lectures faites par notre publication. À en croire ce journal en ligne, en effet, un prochain remaniement ministériel devrait permettre à Ouyahia de prendre le poste de viceprésident, antichambre vers le Palais d’El-Mouradia.
Les pouvoirs publics, qui ont décidé de privilégier à fond la carte de la transparence, ont été très clairs en indiquant que le chef de l’État avait besoin de repos et de poursuivre sa rééducation.
Renforçant ces affirmations, le président Bouteflika nous a été montré en compagnie des plus hauts responsables du pays assis sur un fauteuil roulant. En clair, il aura forcément besoin d’un adjoint pour le seconder dans la conduite des affaires de la cité en attendant les prochaines élections présidentielles.
Or, qui mieux qu’Ouyahia, homme dont la maîtrise des dossiers est reconnue de tous, de même que ses phénoménales capacités de travail. Le choix d’Ouyahia en tant que candidat du «consensus», que même le FLN sera amené à soutenir, en dépit des manoeuvres désespérées que sont en train de déployer certains de ses actuels cadres dirigeants, repose en fait sur plusieurs éléments de poids.
L’homme, qui connaît très bien «la boîte», est digne de confiance, de même qu’il a déjà montré qu’il pouvait se révéler d’une redoutable efficacité quand il s’agit d’obtenir des résultats rapidement sur le terrain. Or, c’est de cela, surtout, qu’ont besoin les Algériens.
Ce n’est pas tout. Choisir un cadre post-indépendance serait un signe de rajeunissement du personnel dirigeant algérien, et une application rigoureuse de ce qu’a déjà dit et souhaité le chef de l’État pour qui il est enfin temps de substituer la légitimité populaire à la légitimité historique.
Cela constituerait au passage une cinglante réplique à toutes ces voix qui continuent de s’élever, désirant ardemment que «le printemps» s’installe en Algérie, avec toutes les conséquences néfastes que l’on observe par exemple en Syrie et en Libye, ou même en Égypte au bord de la guerre civile, ou bien en Tunisie où le spectre du terrorisme islamiste continue de planer très dangereusement. Ce n’est pas tout.
Ouyahia, et ce n’est pas là le moindre de ses atouts, est natif d’une région (puisque le régionalisme reste hélas ancré dans nos moeurs) à qui il arrive de se plaindre de sa «marginalisation» et dont se servent même certains aventuriers pour tenter de partitionner le pays.
L’arrivée d’Ouyahia au sommet du pouvoir couperait définitivement l’herbe sous les pieds de ces mercenaires à la solde de puissants lobbies oeuvrant à déstabiliser des pays émergeant et faisant donc très peur, comme l’Algérie…
Wassim Benrabah