Manquant de perspectives et souffrant du chômage, de nombreux jeunes célibataires mais aussi des pères de familles deviennent tailleurs de pierre.
Dans la wilaya de Tizi Ouzou, les régions les plus connues pour l’exercice de cette activité demeurent incontestablement les localités de Makouda, d’Azeffoun situées au nord et Azazga à l’est du chef-lieu de la wilaya. En effet, les tailleurs de pierre exercent leur métier en dehors de toute réglementation ni statut d’artisan qui puisse leur garantir une retraite. Les pouvoirs publics n’ont même pas jugé important de recenser ces travailleurs à travers le territoire de la wilaya malgré la gravité des problèmes de santé que représente cette activité. Dans la commune de Makouda (20 km au nord de Tizi Ouzou), et plus précisément dans le village de Tala Bouzrou (Fontaine de rocher), beaucoup de jeunes continuent de travailler la pierre.
Par sa nature géographique rocheuse, ce grand village constitue un gisement naturel important en la matière. Sur les lieux, les citoyens rencontrés expliquent que le nombre des tailleurs de pierre a nettement diminué ces dernières années. «Dans la fin des années 1990 et le début des années 2000, cette activité connaissait un grand engouement des jeunes, chacun avait ses raisons, je me rappelle qu’en cette période-là, les petites cabanes ou ateliers où on taillait la pierre poussaient comme des champignons», nous dit un jeune commerçant. D’après certains habitants, le désintérêt affiché par les jeunes pour ce métier n’est pas dû à la baisse de la demande sur la pierre taillée, une «marchandise» qui se vend bien même jusqu’à présent, mais plutôt à cette très redoutable maladie qu’est la silicose. Celle-ci a fait fuir des chômeurs qui n’hésitent pas à quitter ce métier qui ne mène pas à la fortune comme le prétendent certains, mais généralement à la mort.
Cependant, malgré cela ce métier existe encore à Tala Bouzrou. Car même si les gens sont conscients de sa dangerosité, certains jeunes continuent à le pratiquer dans des conditions très difficiles. «Qu’on nous crée des vrais postes de travail, j’arrêterai dès demain de tailler la pierre, mais dans l’état actuel des choses, il n’ y a rien à l’horizon pour moi, alors qui va nourrir mes enfants si j’arrête, hein ?! », s’interroge Lounès, un quinquagénaire qui compte aujourd’hui plus de 15 ans d’expérience dans le métier. Comme Lounès il y en a beaucoup d’autres qui ont fait de cette pierre leur unique source de revenus et de vie. «Si par le passé, ce métier, tel que transmis par l’histoire des civilisations anciennes, était réservé aux forçats et aux esclaves, sa pratique aujourd’hui ne suscite aucunement l’indignation. Ce qui me pousse à prendre le marteau et à exécuter la plus pénible des tâches, ce n’est pas que cela rapporte beaucoup d’argent, mais c’est la seule solution pour sortir du chômage et subvenir aux besoins de ma famille. En quelque sorte cela fait partie du combat que je mène contre la misère», conclut notre interlocuteur. Sans commentaire…
M.F