Il croise le fer avec les islamistes et crée la polémique dans le gouvernement, Benyounès: ange ou démon?

Il croise le fer avec les islamistes et crée la polémique dans le gouvernement, Benyounès: ange ou démon?
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Le dernier «tacle» reçu par Amara Benyounès vient de son allié de l’industrie, Abdessalem Bouchouareb qui a recadré les choses à propos du dossier Peugeot, que seul le ministre du Commerce semble ignorer l’existence.

S’il y a bien un ministre qui a fait parler de lui dans tous les gouvernements Sellal qui se sont succédé, c’est bien Amara Benyounès. L’actuel ministre du Commerce fait incontestablement les choux gras de la presse depuis qu’il a réintégré l’Exécutif en 2012. Et pour cause, ses sorties faites avec une légèreté déconcertante pour un ministre, particulièrement depuis qu’il a pris la tête du stratégique département du commerce, donnent l’impression qu’il navigue seul contre tous… Tout avait commencé avec le bras de fer qu’il avait entamé avec un enfant de sa région, à savoir le secrétaire général de l’Ugta, Abdelmadjid Sidi Saïd.

Les premiers mois de Benyounès du côté des Bananiers ont été marqués par une guerre ouverte avec la puissante Centrale syndicale. La pomme de discorde était l’adhésion de l’Algérie à l’OMC. Amara Benyounès avait dès son arrivée, déclaré avoir fait de cette question une priorité et cela sans avoir à discuter au préalable avec les partenaires sociaux. Ce qui a provoqué la colère de Sidi Saïd, mais aussi de la patronne du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune qui l’avait «torpillé» avec ses habituelles flèches empoisonnées. Cependant, c’est Sidi Saïd qui s’était montré le plus virulent.

Les islamistes ont pavoisé

LG Algérie

Connu pour son franc-parler, il était même allé jusqu’à accuser le ministre de «bluffer» et d’utiliser le nom du président de la République Abdelaziz Bouteflika comme «fonds de commerce pour faire passer la pilule». Par la suite, les deux hommes se sont réconciliés et Sidi Saïd est même devenu un soutien invétéré de Benyounès, mais ce n’était que le début de longues séries de polémiques où le ministre du Commerce est l’acteur principal…

On se souvient qu’il s’était attiré les foudres d’une bonne partie du peuple algérien lors de la campagne électorale de 2014 qu’il menait au profit du candidat Bouteflika en usant d’un vocabulaire un peu trop populaire, d’un contexte qui ne s’y prêtait pas, ce qui avait été interprété comme une insulte envers le peuple algérien avec son fameux «naâl bou li mayhabnache». Toutefois, la controverse provoquée par cette déclaration n’est rien, comparée au tollé qu’a suscité sa directive concernant l’annulation de licences pour la vente d’alcool en gros, laissant toute latitude aux walis de juger de l’opportunité de l’ouverture, mais surtout de la fermeture des débits de boissons alcoolisées.

Les lobbys de l’importation que le ministre du Commerce avait décidé entre-temps de combattre ont utilisé cette brèche pour manipuler l’opinion et faire de Benyounès l’ennemi public n° 1 et le mécréant de la République. Mais il faut reconnaître qu’encore une fois Amara Benyounès a fait preuve de frivolité pour une question aussi sensible dans notre société.

Il est coupable d’avoir ouvert la voie à ce genre de polémiques, en s’attaquant à un sujet qui n’est pas une priorité nationale alors qu’il n’arrive même pas à réguler le marché des fruits et légumes. Après plusieurs semaines passées au gril et la menace d’une marche nationale des islamistes, le Premier ministre Abdelmalek Sellal a cédé. Il a désavoué son ministre du Commerce en annulant lui-même cette instruction, sans que Benyounès le sache et surtout sans lui avoir laissé le soin de mettre les formes; en lui laissant le soin de l’annuler lui-même. Les islamistes ont pavoisé et se sont retrouvés en position de force par rapport au ministre du Commerce. Ils ne se sont pas fait prier pour le lui montrer avec des articles quotidiens sur leurs relais médiatiques où ils le descendent en flammes en l’accusant d’être derrière tous les maux du pays, par exemple de protéger les marchands de l’informel.

Malgré cela, il a réussi à sauver sa peau lors du dernier remaniement ministériel! Ce qui n’a pas plu à certains députés de l’APN! Voyant l’état dans lequel se débat notre commerce en cette situation de crise, ils lui ont fait un procès en règle à l’hémicycle, notamment le fameux député Taher Missoum.

Descente aux enfers

Très remonté contre le ministre du Commerce et sa politique qu’il juge budgétivore, il le taille en pièces devant une assistance en délire. Muni de produits destinés au bien-être des animaux, notamment les chats, ce député expose de façon satirique et moqueuse sa thèse, mettant en cause la politique d’importation adoptée par le ministre. Il est suivi par d’autres députés, comme M. Zeghad. Le spectacle n’était pas beau à voir pour ce ministre qui semblait être complètement perdu. Au passage, il faut aussi rappeler les «chamailleries» publiques à laquelle il s’adonnait avec l’ancien ministre de l’Agriculture, Abdelwahab Nouri. Les deux hommes se renvoyaient la responsabilité de la cherté des prix et des pénuries au point d’avoir presque provoqué une crise au gouvernement. Benyounès a aussi perdu la bataille face aux concessionnaires automobiles dont le cahier des charges qu’il voulait leur imposer a été vidé de sa substance.

Cette descente aux enfers de Amara Benyounès ne s’arrête pas là! Comme un malheur n’arrive jamais seul, cette fois-ci c’est son ami et allié de l’industrie, Abdessalem Bouchouareb qui le tacle dangereusement sur la question du projet d’une usine Peugeot en Algérie. Annoncé, par le président français François Hollande lors de sa visite la semaine dernière, Benyounès avec sa légèreté habituelle a fait savoir qu’il n’était pas au courant de ce dossier qui, pourtant, le concerne aussi. «Il n’a pas été traité. On ne l’a pas encore vu. Il n’est pas sur la table du gouvernement. Je ne sais pas du tout de quoi il s’agit», a t-il affirmé. Chose que Bouchouareb a démenti à peine 24 heures après. «Les discussions que je mène sous l’égide directe du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, sont à un stade très avancé», a-t-il assuré comme ce qui sonne comme une réponse à son collègue du commerce. «Le dossier a d’ailleurs été traité lors de la dernière réunion du Comité mixte économique franco-algérien (Comefa), tenue à Alger. Un projet a ensuite été déposé au ministère de l’Industrie», précise M.Bouchouareb avant de donner plus de détails sur ce projet dont tout le monde semble être au courant de son existence, sauf… Amara Benyounès! Voilà donc l’histoire d’un ministre qui semble avoir réussi à faire l’unanimité contre…lui!