Invité aujourd’hui des matinales du Cercle algérien pour la réflexion autour de l’entreprise (CARE), Mouloud Heddir, expert en commerce a affirmé que l’Algérie ne sait pas tirer les leçons du passé ».
En allusion à la crise économique qu’a vécue le pays après l’effondrement du cours du pétrole en 1986. Avec toutes les conséquences que cela induit par la suite en termes de cessation de paiement, d’endettement, de fermeture d’entreprises et arrêt des projets, etc.
Pour cet ex-directeur du commerce extérieur au ministère du Commerce, il faut absolument renouer avec les débats. Dans les années 70, le gouvernement avait pour obligation de par la loi de présenter devant l’Assemblée nationale un bilan sur les échanges extérieurs de l’Algérie. « Cela ne se fait malheureusement plus. De fait la tradition de l’évaluation a disparu. » Il en veut pour exemple l’évaluation en 2010 de l’accord d’Association avec l’union européenne. Mais « le document qui a été présenté est celui de l’UE par du gouvernement algérien, il est d’ailleurs sur le site du partenaire de l’Algérie. »
Tout cela pour dire que l’Algérie n’a en fait pas de politique commerciale extérieure. Sinon, qu’est-ce qui l’aurait retardé à diversifier ses exportations et son commerce tout en continuant bien entendu de recourir à la manne pétrolière pour couvrir les besoins nationaux.

L’hôte de CARE a déploré que le Conseil de l’énergie et celui de la promotion des exportations n’aient pas encore été mis en place. Quant à la prospective dans laquelle faisait INESG, elle est en léthargie. Ce qui l’amènera à bifurquer sur l’OMC qui semble « intimider » les autorités. « L’OMC, ce n’est pas le libre-échange, contrairement à ce que croient beaucoup, c’est une politique d’intérêts ou chaque pays tente de protéger son économie. » Et de s’interroger : « Pourquoi redouter l’Organisation mondiale du commerce si l’on a accepté de lever toutes les barrières pour + de 50% des échanges extérieurs avec l’UE. » Il ajoutera que dans les 64 milliards de produits importés, il y a au moins 15% que nous pouvons fabriquer localement et même en exporter.
L’intervenant alertera sur une potentielle crise qui guette l’Algérie si elle n’arrive pas à diversifier son commerce. « On ne sait pas quand est-ce qu’elle interviendra, mais elle est à nos portes et faudra apprendre à la gérer. Car devant l’accroissement des besoins (salaires, réalisation des projets, etc.) nous allons vers la baisse de la rente (manne pétrolière) parce que celle-ci demandera beaucoup de moyens ». « Nous ne savons pas à quelle sauce nous allons être mangés», a-t-il ajouté.
Il achèvera son intervention en disant qu’il y a une crise de confiance entre l’administration et les exportateurs parce qu’ils sont tous considérés comme de potentiels « fugitifs fiscaux » et de transporteurs des devises de l’autre côté de la Méditerranée, en allusion à la contrainte imposée par la loi sur la monnaie et le crédit (pénalisation de l’acte de gestion)qui fait obligation à l’exportateur de rapatrier les devises dans les délais impartis sous peine de se voir poursuivi en justice et condamner à 5 ans de prison.
Faouzia Ababsa