Cet emblème, qui a été conçu par le militant berbériste Youcef Medkour, dit Youcef Amazigh, a vu le jour le 12 janvier 1970, à l’occasion de Yennayer. Au demeurant, ce sont les mêmes nuances qu’on retrouve dans les bijoux berbères.
Un triangle avec trois bandes égales de couleurs différentes : le bleu représente la mer, le vert fait référence au Tell et au Nord de Tamazgha et le jaune illustre l’immensité du désert. Le tout barré au milieu par la lettre “Z” en tifinagh rouge sang dans une claire allusion à la liberté des Imazighen. C’est le drapeau amazigh qu’on déploie à tout bout de champ ces dernières années.
Cet emblème qui a été conçu par le militant berbériste Youcef Medkour, alias Youcef Amazigh, a vu le jour le 12 janvier 1970, à l’occasion de Yennayer. Au demeurant, ce sont les mêmes nuances qu’on retrouve dans les bijoux berbères. “On allait organiser un gala le 25 janvier 1970, mais certains militants de l’Académie étaient réticents ; ils n’avaient pas mesuré l’importance de cet emblème qui aurait pu nous rassembler”, affirme Youcef Medkour.
Parti en France en 1957, cet ouvrier de Djemaâ Saharidj en Haute Kabylie a très tôt fait de côtoyer les milieux militants dans la métropole parisienne. En 1965, Youcef Medkour rencontre le militant Mohand-Amokrane Khelifati à Paris. Déjà impliqué dans des structures associatives militantes, Khelifati crée avec Bessaoud, Rahmani, Hanouz, Bounab, Haïfi et d’autres militants l’Académie berbère.
Youcef Medkour participe à la campagne de sensibilisation, après le dépôt des statuts d’Agraw Imazighen en 1966. Le jeune militant est vite adopté par le groupe des anciens. Outre la distribution de tracts dans les cafés de la diaspora, Medkour s’emploie à confectionner le drapeau berbère vers la fin de 1969. “J’ai acheté 4 rouleaux de tissu au marché Saint-Pierre. J’ai ensuite proposé à des femmes ayant des machines à coudre de confectionner l’emblème, selon les mesures préalablement arrêtées”, raconte notre interlocuteur qui a pu ainsi confectionner un premier carton de 200 drapeaux carrés.
Medkour entreprend de sonder les militants sur ce projet de doter le mouvement d’un référent symbolique. Mouloud Mammeri, Kateb Yacine, Saïd Sadi, Hend Sadi, Ramdane Achab, le Marocain Aherdan, tous ont vu d’un bon œil une telle initiative. Le Dr Sadi a suggéré la forme rectangulaire au lieu du carré. Au demeurant, il y a beaucoup d’angles dans l’art berbère. Même proposition de la part d’Amar Neguadi (Achaoui). Quand Medkour dévoile le projet à Mohia, ce dernier a eu cette réplique qui lui est coutumière : “Ur tella ara ar le drapeau (le problème, ce n’est pas le drapeau).” Youcef Amazigh prend note des remarques des militants consultés. “Au début, j’ai confectionné entre 300 à 500 drapeaux. Au bout de quelques années, j’ai écoulé plus de mille exemplaires en Libye, plus tard au Maroc et en Tunisie”, soutient-il.
Lors d’un gala de soutien aux militants des droits de l’Homme arrêtés en 1985, Youcef Medkour est allé à la manifestation avec un manche à balai à Paris. “On pouvait être attaqué par les sbires de l’Amicale. À la tribune, Hend Sadi et Muhend u Yahia nous exhortaient de ne pas répondre aux provocations”, dit-il. Depuis la parenthèse démocratique de 1989, le drapeau amazigh s’est popularisé et a été adopté par la militance démocrate.
On le déploie non sans fierté dans des meetings politiques, des rencontres culturelles et dans les stades de football aux quatre coins de l’Afrique du Nord.
Même dans la diaspora, ce symbole est omniprésent. Déployé aux quatre vents, il témoigne et raconte l’histoire de tamazight, comme culture, langue et identité, qui ne cesse d’être là, depuis des millénaires, en dépit des ostracismes successifs.
Yahia Arkat