C’est la victoire d’un peuple mûr
Net vainqueur des élections législatives voici deux mois, il récidive face au président sortant Moncef Marzouki, après avoir inscrit sa campagne sur le retour à l’ordre et la fin d’une période de transition se référant encore et toujours à Habib Bourguiba.
Selon les résultats préliminaires et la presse tunisienne, «Bejbouj» aurait raflé la mise, au 2e tour de la présidentielle. Comme en football, le vieux routier de la politique tunisienne a réalisé un doublé.
Béji Caïd Essebsi avait, d’ailleurs, lui-même annoncé sa victoire hier soir. Si jusqu’à 15h de l’après-midi d’hier, les différentes chaînes de télévision annonçaient encore des résultats préliminaires, le chef du parti Nidaa Tounès est sorti gagnant, avec au moins 10 points d’écart, avec son rival, Moncef Marzouki, le président sortant. Ce dernier, refusait de reconnaître sa défaite. Béji Caïd Essebsi est, sous toute réserve, le nouveau président de la Tunisie. Le chef du parti anti-islamiste Nidaa Tounès a été officiellement déclaré vainqueur, hier, de l’élection présidentielle, dont le second tour s’est déroulé dimanche. Il l’emporte avec 55,68% des voix (plus d’1,7 million de voix) contre 44,32 des suffrages (1,3 million de voix) pour son rival, Moncef Marzouki, annonce l’instance électorale (ISE). Adnen Manser, le directeur de campagne de Moncef Marzouki, a même qualifié «d’eronée la décration de BCE, car fondée sur des résultats inexistants». Il a parlé de chiffres «serrés», et évoqué des «violations» qui auraient été commises pendant la journée par les partisans de Béji Caïd Essebsi.
«L’avenir proche et lointain nous oblige à travailler ensemble pour la Tunisie», lançait dimanche soir le désormais nouveau président tunisien à l’adresse de son rival. Ce dernier avait jugé «sans fondement» la revendication de victoire de son adversaire, disant attendre les résultats officiels. De grands défis attendent, désormais, le parti de Caïd Essebsi, en particulier sur le plan économique et social.
Autre grand défi: la sécurité avec l’essor d’une mouvance djihadiste armée responsable de la mort de dizaines de soldats, notamment à la frontière algérienne, et de deux figures politiques anti-islamistes en 2013. Des militants du groupe Etat islamique ont d’ailleurs menacé la Tunisie quelques jours avant la présidentielle. Autrement dit, avec ce doublé, Nidaa Tounès doit désormais former le prochain gouvernement. Cette formation hétéroclite devra rapidement s’atteler à constituer une coalition stable, faute de majorité absolue au Parlement. Elle devra composer avec les islamistes d’Ennahda, qui restent la deuxième force politique du pays et n’avaient pas présenté de candidat à la présidentielle. Béji Caïd Essebsi, élu à 88 ans à la tête de la Tunisie, a servi tour à tour les présidents Bourguiba et Ben Ali avant de s’imposer comme le poids lourd de la Tunisie post-révolutionnaire face aux islamistes. Net vainqueur des élections législatives voici deux mois, il récidive face au président sortant Moncef Marzouki, après avoir inscrit sa campagne sur le retour à l’ordre et la fin d’une période de transition parfois chaotique, se référant encore et toujours à Habib Bourguiba, le père de l’indépendance tunisienne, dont il fut un proche collaborateur. Contrairement à tous ses prédécesseurs, il peut se targuer d’être le premier président élu au terme de la première consultation démocratique à laquelle le peuple tunisien a été convié. Cet avocat de formation a resurgi au lendemain de la chute du président Zine El Abidine Ben Ali en janvier 2011. Nommé Premier ministre provisoire en février 2011, il a su conduire, durant la phase de transition, les premières élections libres d’octobre 2011 remportées par le parti islamiste Ennahda. Accusé par Moncef Marzouki d’être un produit du système déchu cherchant à reproduire l’ancien régime, il a axé sa campagne sur la réhabilitation du système tunisien fondé sur les atouts traditionnels que sont le tourisme et la création des PME,n’hésitant pas au passage à réhabiliter au sein de sa formation, Nidaa Tounès, les transfuges de l’ancien parti au pouvoir avec Benali, le RCD. Il se défend des accusations portées contre lui par son rival aujourd’hui vaincu en arguant de sa volonté de respecter la Constitution et d’oeuvrer dans ce cadre afin d’éviter tout risque de dictature.
Marzouki félicite son adversaire pour sa victoire
Le président tunisien Moncef Marzouki a reconnu sa défaite à la présidentielle et félicité le vainqueur Béji Caïd Essebsi, a annoncé hier son directeur de campagne Adnène Mancer sur sa page Facebook officielle. «Moncef Marzouki a félicité tout à l’heure M.Béji Caïd Essebsi pour sa victoire à l’élection présidentielle», écrit l’homme de confiance du chef de l’Etat sortant.