Le ministre omet, au passage, en sa qualité de responsable politique, que gouverner consiste à prévenir et non pas à justifier, a posteriori, les défaillances.
Cité dans l’affaire des Panama Papers, Abdeslem Bouchouareb peine à convaincre. En décidant de ne s’en remettre qu’au chef de l’État, il se dérobe en réalité à l’obligation de s’expliquer devant les Algériens qui sont des millions de contribuables en droit de savoir. Aussi, au-delà de ce mépris affiché envers eux, les Algériens qui, pour rappel, ont droit à une allocation touristique de 150 € une fois l’an (soit une misère qui n’assure même pas un dîner et une nuit d’hôtel convenables) doivent ravaler leur colère devant les sommes astronomiques et les acquisitions à l’étranger dont on leur fait état. Leur demande-t-on d’abdiquer devant la corruption institutionnalisée ? Quoi qu’il en soit, Bouchouareb ne leur a toujours pas révélé d’où proviennent ses capitaux placés à l’étranger.
Quelle en est leur origine ? Faut-il rappeler, une fois encore, que la simple détention de devises à l’étranger est illégale et que l’exportation de capitaux est interdite ? Passons sur l’évasion fiscale souvent accolée à la création de sociétés offshore et surtout les Panaméennes.
Quand bien même cet argent aurait été gagné le plus légalement, il devait, dans tous les cas, être déclaré au fisc algérien sachant que notre ministre est, jusqu’à preuve du contraire, résident en Algérie.
Les faits sont là. Pourtant les réponses à toutes ces questions gênantes, Bouchouareb les réservent exclusivement au président de la République, ignorant la justice de son pays qui, pour l’heure, ignore, elle-même, l’affaire, comme si elle n’était pas concernée. Le ministre qui, décidément, est convaincu qu’il n’est pas un justiciable comme les autres, omettra au passage, en sa qualité de responsable politique, que l’acte de gouverner consiste précisément à prévenir et non pas à justifier, a posteriori, les défaillances. Sur ce chapitre, il n’est nul besoin d’“instruire l’affaire” : il a bel et bien failli. Incontestablement, M. Bouchouareb, qui a créé sa société offshore au Panama alors qu’il était déjà au gouvernement, est, d’une manière ou d’une autre, en infraction vis-à-vis de la loi.
Par ailleurs, l’opacité en Algérie fait que la déclaration de patrimoine du ministre de l’Industrie et des Mines au moment de sa prise de fonction au gouvernement n’a toujours pas été rendue publique et ce, comme le stipule la loi. De plus, l’absence totale, chez Bouchouareb, de tout sentiment de culpabilité dénote du caractère autiste du régime. La situation n’étant guère à son avantage, il cherche à la retourner en sa faveur.
En s’abritant derrière “la main de l’étranger” qu’il agite épisodiquement, les voix qui volent à son secours ne veulent pas moins admettre qu’il a été pris à défaut, pour ne pas dire qu’il a été pris la main dans le sac ! Nos dirigeants ne veulent toujours pas reconnaître que la corruption a sabordé les espérances du peuple et qu’elle menace aujourd’hui la sécurité du pays.
En mal de lampistes et autres boucs émissaires, ces véritables pyromanes cherchent à “essuyer le couteau” sur le dos de la presse nationale et internationale qui, résolument, ne veut pas courber l’échine. À propos de lobbies dont le ministre se dit victime, ce dernier est plutôt considéré, en France même, comme “le pivot incontournable des milieux d’affaires français en Algérie”, autant dire des lobbies de l’ancienne puissance coloniale. Ce n’est sans doute pas un hasard si ces milieux ont, depuis quelque temps et comme jamais auparavant, pignon sur rue dans notre pays.
Certaines puissances veulent, en effet, réduire l’Algérie à un débouché naturel et exclusif pour leurs productions de biens et services. Un tel objectif suppose, au préalable, la disponibilité de supplétifs locaux, de préférence zélés. Tant pis si cela devait passer par la destruction de l’économie nationale et l’affaiblissement de l’État algérien, le but étant de cueillir un pays appauvri, déprimé, déculturé, ignorant son histoire et sa destinée.