Le MSP risque de connaître d’autres secousses, provoquées par deux ailes qui s’affrontent.
Le Mouvement pour la société de la paix a, enfin, tranché, en décidant de ne pas prendre part au futur gouvernement. Une décision tardive, sachant que le parti, qui s’est découvert des vertus d’opposition à la veille des législatives, avait maintenu ses ministres au sein de l’équipe dirigée par Ahmed Ouyahia.
Cette décision découle-t-elle d’un choix stratégique ? Est-elle un aveu d’échec de la stratégie d’entrisme suivie par le mouvement depuis sa création ? Ou est-elle, tout simplement, une ruse de plus de la part de Abou Djerra Soltani, qui sait que, de toutes les façons, il n’aurait aucune chance de figurer dans le futur gouvernement ?
Le patron du FLN avait clairement signifié qu’il ne souhaitait pas renouveler l’expérience de l’alliance avec le MSP. D’ailleurs, Belkhadem n’a jamais été aussi virulent à l’égard des islamistes, avec à leur tête le MSP. Évidemment, l’on comprend que cette guéguerre sous-tend les calculs en prévision des présidentielles de 2014.
Pour revenir à la décision prise par le MSP, force est de constater que cela risque de compliquer davantage la situation du parti. Déjà affaibli par la scission opérée par Abdelmadjid Menasra et ses compagnons, le MSP risque de connaître d’autres secousses, provoquées par deux ailes qui s’affrontent en sourdine : d’une part, les partisans de la stratégie d’entrisme qui refusent d’abandonner les privilèges que leur octroie leur proximité avec le pouvoir.
Et, d’autre part, Amar Ghoul, l’homme qui a raflé la majorité des sièges obtenus par le MSP et sa coalition, ne compte pas quitter le gouvernement, sauf si le président Bouteflika en décide autrement. Il affirme que “l’intérêt de l’Algérie passe avant tout”, à décoder : son poste ministériel passe avant le MSP.
Il n’est pas le seul dans cette situation. Beaucoup de cadres du parti, qui ont goûté aux délices du pouvoir, ne semblent pas être prêts à abandonner cette vie de palais pour retourner dans le militantisme.
Depuis la création du parti par feu Mahfoud Nahnah, les cadres et les militants n’ont connu que la stratégie de l’entrisme qui leur a permis de s’enrichir et de côtoyer les cercles de décision. Le parti n’a jamais été dans l’opposition.
Le parti a même été écarté de la famille des “frères musulmans” à cause de positions jugées trop proches de celle du pouvoir.
Lui, qui comptait investir à fond sur l’effet contagieux du Printemps arabe, il a dû payer cash ses concessions au pouvoir, même s’il a voulu faire croire, le temps d’une élection, qu’il était passé dans l’opposition, tout en maintenant ses ministres au gouvernement.
Le fait que le MSP ne réalise pas de razzia électorale ne relève pas d’une surprise. N’en déplaise à Abou Djerra Soltani, le MSP n’est pas ce parti islamiste qui a fait des sacrifices immenses et qui n’a jamais participé au pouvoir pour que le peuple lui accorde une confiance aveugle, comme ce fut le cas en Tunisie ou en Égypte.
Mais passer dans l’opposition ne serait pas une chose aisée pour un parti habitué au pouvoir. Il est clair que Abou Djerra Soltani lorgne vers l’aile représentée par Abderrezak Mokri, qui a de tout temps refusé les “compromissions”. C’est sa seule bouée de sauvetage, s’il ne consent pas à démissionner, comme le lui conseille Abdelaziz Belkhadem. Le patron du MSP, qui ne cache plus son ambition présidentielle, sait qu’il négocie présentement son dernier virage et qu’il risque d’être éjecté du parti, que ce soit par les tenants de l’entrisme ou ceux qui prônent le retour aux valeurs des “frères musulmans”.
En prenant le parti des durs, Soltani sait qu’il risque gros, pas seulement du côté de ses anciens alliés et relais au sein du pouvoir, mais aussi au sein de la population. En fait, toute la difficulté sera de convaincre les citoyens que le parti est bel et bien passé dans l’opposition, tout en assumant sa participation aux gouvernements successifs. Un difficile exercice. Mais déjà, la tempête qui s’abat sur le parti risque de faire beaucoup de dégâts.
A B