L’avocat et ex-député du FFS, Mustapha Bouchachi, a plaidé, hier, depuis Béjaïa, pour l’organisation d’une élection présidentielle dans les meilleurs délais afin de doter l’Etat algérien d’une institution légitime à même de gérer la période de transition démocratique, laquelle nécessitera du temps, en plus des hommes propres et intègres. Toutefois, l’invité de la communauté universitaire de Béjaïa a posé un préalable à la réussite d’une telle échéance électorale qui consiste, selon lui, en la mise en place d’une instance nationale indépendante chargée de la surveillance du scrutin.
«Bien que l’organisation d’une Assemblée constituante soit une option envisageable et porteuse de l’espoir d’un changement du système, il n’en demeure pas moins que ce projet risque de nous prendre beaucoup de temps. Ce qui profitera à coup sûr aux tenants du pouvoir en place», a-t-il estimé. Ceci dit, le conférencier a insisté sur la nécessité de donner un prolongement au mouvement populaire enclenché depuis le 22 février, appelant les Algériens à continuer leur combat pacifique dans la rue jusqu’à l’avènement de la deuxième République. «Nous devons continuer à manifester pacifiquement et maintenir la flamme jusqu’à la chute de tous les symboles du système», a-t-il martelé sous les ovations d’une assistance nombreuse.
A ce titre, il citera nommément le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, le président du Conseil constitutionnel, Tayeb Belaïz, et l’actuel Premier ministre, Noureddine Bedoui, lesquels ont été «nommés par des forces extrajudiciaires», et sont considérés comme «proches des Bouteflika». Selon lui, la rue devra maintenir la pression jusqu’au départ de ces symboles du système. «La période de transition ne devra pas être gérée par ceux qui ont cautionné le régime ou ceux qui sont choisis par celui-ci. Le peuple veut du sang neuf !», a-t-il soutenu. Revenant sur les incidents ayant émaillé les marches populaires de ce vendredi 5 avril, notamment à Béjaïa et Alger, où le Dr Saïd Sadi et Me Mokrane Aït Larbi, se sont vus empêchés de manifester aux côtés de leurs concitoyens, l’ancien président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) a tenu à dénoncer «ce discours de haine et d’exclusion qui en appellent à la violence et à l’extrémisme».
Pour le conférencier, cette révolte populaire doit être rassembleuse et pacifique. «Je suis contre l’exclusion. Excepté les dignitaires du régime, tout militant ou homme politique désirant rejoindre ce mouvement populaire, est le bienvenu. Il est vraiment inadmissible qu’un manifestant ayant marché pendant sept semaines ose chasser de la rue un militant dont le parcours est long de 40 ans !», a-t-il regretté. Lors de la séance des débats, qui a duré plus d’une heure et demie, Me Bouchachi a été assailli de questions par les membres de la communauté universitaire, mais aussi de citoyens et autres animateurs du mouvement citoyen à Béjaïa.
En réponse à un intervenant qui préconise le système fédéral comme l’une des solutions à la crise politique algérienne, l’orateur rejette d’un revers de la main cette idée qui, selon lui, pourrait conduire à la «division de l’Algérie». Bien qu’il soit favorable à la décentralisation du pouvoir décisionnel, Me Bouchachi défend l’option d’un Etat unifié tout en plaidant pour la refonte du système éducatif, la démocratisation des institutions publiques, l’ouverture du champ politique et audiovisuel, la justice sociale, le respect des droits de l’Homme et des libertés démocratiques.B. T.