Le modèle de construction ancestral, connu sous le nom de « Ikber », constitue un patrimoine matériel séculaire que la communauté « Imouheg » des Touareg du Tassili, wilaya d’Illizi, a savamment préservé depuis des milliers d’années.
Ce legs architectural, connu également sous l’appellation de « Zeriba » (hutte de branchages), a été depuis la nuit des temps préservé de génération en génération, en dépit des développements architecturaux modernes, chez les touaregs qui lui vouent un grand attachement.
Ce type de construction s’est, selon plusieurs sources, répandu notamment dans la région d’Ihrir, Nord de la wilaya d’Illizi, avant de se propager dans d’autres régions du Tassili N’Ajjer où les populations sédentaires et semi-sédentaires l’ont adopté, pour devenir un des aspects identitaires ancestraux de cette région dans l’extrême Sud-est du pays.
Sur ce mode d’habitat, « apanage » des Touaregs, le conservateur à la sous-direction de l’Office du parc culturel du Tassili N’ajjer à Bordj El-Haouès, Mohamed Ahad, a expliqué qu’il consiste en la réalisation d’une pièce de forme circulaire ou rectangulaire, aux parois en matériaux locaux, de pierre et toub (pisé) et d’un mélange d’argile et de plantes « Azouae » (en langue targuie), connue également sous l’appellation de « Fersig » dans différentes régions du Sud.
Sa toiture de forme conique, recouverte de palmes sèches et de branchages de « Tahri » (plante poussant aux abords des lacs et Oueds de la région d’Ihrir), est soutenue par quatre troncs de palmiers et un pilier central « Temenkeyt ».
Imprégnée des spécificités naturelles de la région, cette bâtisse de fortune, d’une hauteur d’un mètre et demi et disposant, outre une porte d’accès, de petites ouvertures pour l’éclairage et l’aération, demeure encore très prisée par les Touaregs, notamment les personnes âgées, au regard de ses caractéristiques iso-thermiques, permettant d’atténuer la rigueur du climat aussi bien en été qu’en hiver, en plus de sa résistance, de par la forme conique de sa toiture, aux mauvaises conditions climatiques, tempêtes de sable et averses.
Pour Mohamed Ahad, cette forme géométrique, prônée dans la conception des Ikbrane (pluriel d’Ikber), témoigne de la parfaite symbiose dans sa conception architecturale avec le milieu saharien. Ce responsable reconnaît aux Imouheg qu’ils détiennent encore un patrimoine matériel ancestral d’une dimension socioculturelle inestimable, reflétant ainsi l’attachement du targui à son milieu et sa volonté de pérenniser ce legs matériel dont seuls les touaregs saisissent la véritable valeur.
Des efforts pour la valorisation de ce patrimoine et son classement
Certains tentent d’introduire aux Ikbrane une touche de modernité, inspirés par la multitude de formules architecturales et les programmes de construction prévus par l’Etat, dont l’habitat rural. Toutefois, une grande proportion de la population locale rejette « vigoureusement » cette aliénation, pour préserver cet héritage architectural dans sa conception originelle et éviter qu’il ne soit altéré au fil du temps, a assuré M. Ahad.
L’Office du parc culturel du Tassili N’Ajjer s’emploie, dans l’optique de conforter les efforts de conservation de ce legs matériel, à collecter toutes informations sur l’histoire de l’édification de « l’Ikber », en vue de constituer un dossier pour son classement parmi le patrimoine mondial, a souligné M. Ahad.