Hôpital Mustapha-pacha, Les urgences se réorganisent face à la détresse des patients

Hôpital Mustapha-pacha, Les urgences se réorganisent face à la détresse des patients

L’administration des urgences de l’hôpital Mustapha-Pacha d’Alger a entamé, il y a trois mois, sa propre réforme. Une nouvelle politique pour la réorganisation de l’accueil et de la prise en charge des malades qui se présentent chaque jour aux services des urgences est en marche.

Une virée sur les lieux nous a permis de constater de visu les changements opérés. La réorganisation initiée en collaboration avec le groupe international américain, General Electric (GE) a pour mission d’organiser un audit, dont les résultats seront connus d’ici la fin du mois de juin prochain. Le travail de la firme permettra de faire un état des lieux et de former le personnel afin que les critiques des malades et autres blessés soient atténués à l’avenir. Lundi 6 janvier. Il est 13h00. Une ambiance tendue semble peser sur les lieux. Un jeune souffrant de douleurs insoutenables est sur un brancard attendant une prise en charge. Un parent de malade s’accroche avec la réceptionniste pour un complément de renseignements. La situation est normale dans un service censé être la première halte d’un malade ou d’un blessé lorsque les soins prodigués sur place ne sont pas suffisants.

Le DG de l’hôpital : “L’opération va se dérouler en trois étapes”

Hachemi Chaouch, directeur du CHU a indiqué que cette opération est destinée à améliorer la prise en charge “rapide et efficace” des malades en milieu hospitalier. “Nous travaillons avec General Electric pour la réorganisation des urgences. Le but de cette opération est de permettre une prise en charge rapide des malades et les blessés et de les dispatcher vers les autres services de soins appropriés dans les meilleures conditions”, a ajouté M. Chaouch.

L’opération va se dérouler en trois étapes. La première à court terme qui consistera en la mise en place d’une organisation spécifique des urgences. La seconde qui est à moyen terme a pour objectif de définir les éléments nécessaires à apporter au service, la gestion du temps et du délai d’attente, ainsi que d’assurer une meilleure qualité de soins.

La troisième qui se fera à long terme sera consacrée à la physionomie des hôpitaux qui seront construits en monobloc.

Pour le directeur de l’hôpital, la nouvelle méthode de travail commence dès la porte d’entrée. “En premier lieu, nous avons décidé de diminuer le flux des urgences”, note-t-il. “Dès l’arrivé à la porte des urgences, les agents de sécurité limite d’accès au patient et à un seul accompagnateur. À l’intérieur, la réception se charge d’orienter le patient vers le bon service et ce, après lui avoir posé une série de questions et rempli une fiche”, explique-t-il. Notre interlocuteur souligne que le service s’est doté de deux types de fiche, rose et jaune, pour distingué les malades et les orienter le plus rapidement vers le bon service dans le but de réduire le mécontentement des patients et de leurs familles.

Pour M. Chaouch, la contrariété des patients est essentiellement due à un défaut dans les moyens d’organisation. “Le personnel soignant devrait respecter davantage les malades et ce, en respectant les horaires de travail, les heures de début du service, ainsi que la présence de l’ensemble du personnel des urgences”, précise le DG du CHU. Cette nouvelle manière de faire, semble satisfaire le DG, car pour lui, la nouvelle politique des urgences a permis de “discipliner le personnel médical et le patient”.

Des patients en perpétuelles insatisfactions

Mais sur le terrain, la réalité est autre. Les malades et leurs familles semblent toujours souffrir d’une mauvaise prise en charge.

Désorientée, à la quête d’informations, une mère de famille dont le fils souffre d’anorexie mentale, se tient debout, en plein milieu de la salle d’attente des urgences du CHU Mustapha Pacha. Cela fait deux mois qu’elle se présente à l’hôpital dans l’espoir d’une hospitalisation rapide. Le jeune homme avait tenté de mettre un terme à sa vie et refuse de se nourrir depuis plusieurs mois. “Je ne sais plus à quel saint me vouer. Mon fils souffre d’anorexie mentale, il a fait plusieurs tentative de suicide, j’essaye de le faire hospitaliser depuis 2 mois mais ce n’est qu’aujourd’hui (hier, ndlr) qu’on a accepté de l’admettre”, relate la maman. Cette dernière raconte qu’elle a fait appel à toutes les instances concernées, mais sans résultat. “J’ai une décision de justice pour l’hospitalisation de mon fils. Mais ils ont refusé son admission au niveau des urgences”, s’indigne-t-elle.

Le mécontentement de la mère de famille est partagé par d’autres malades à l’image d’une veille dame âgée de 60 ans venue aux urgences pour passer une radio du thorax. Elle est perdue au milieu du service. “Il faut avoir un passe-droit pour passer. Je développe une forte allergie, si je ne la traite pas je risque de devenir asthmatique”, relate-t-elle.

Les propos des deux femmes viennent contredire ceux du coordinateur des urgences, Mohamed Tahir qui affirme que le service ne refuse aucun malade. Alors que les patients pensent que le premier arrivé doit passer avant les autres, Mohamed Tahir explique que l’ordre de passage est déterminé en fonction de l’état du patient qui se présente au service. “Nous recevons tous les patients qui se présentent. Nous commençons par les cas les plus graves avant de prendre en charge les autres”, explique le coordinateur.

Un optimisme et un aveu de lacunes

Bien que le responsable soit optimiste concernant la réussite de l’opération, il reconnaît que la gestion du service enregistre des défaillances, surtout en matière de personnel médical. “Le seul bémol est le manque des paramédicaux”, reconnaît M. Tahir. La nouvelle politique du service compte former du personnel qui sera opérationnel d’ici 2018, sachant qu’une grande partie part en retraite. Les urgences du CHU reçoivent chaque jour 1 000 patients qui sont traités par

5 équipes paramédicales.

Chaque équipe compte entre 12 et 17 personnes, soit un aide-soignant pour chaque 5 patient ce qui est en deçà des normes internationales qui préconisent 2 infirmiers et 2 aide- soignants par patient. Et pour ce qui est des médecins, le service demande régulièrement l’aide des externes pour répondre au besoin des malades, car le service compte 1 médecin pour 10 patients.

Pour sa part le chef du service des urgences, le professeur Guinik reconnaît que le service est en perpétuelle réorganisation.

Il précise que cette fois-si, les urgences se doteront d’un accompagnement en matière d’équipement consommable, non consommable et même de personnel d’hygiène. Le service sous-traite le nettoyage à une société privée. “Nous avons amélioré la prise en charge des malades même si le mécontentement est continuel”, fait-il savoir. D’après le professeur, il est presque impossible de satisfaire tous les aspects des urgences.

D. S