La Révolte des Parapluies gagnant jour après jour en assurance et en ampleur, qui flanchera en premier ? Et si Tiananmen 2.0 se déroule en direct sur YouTube, que devrons-nous faire ?
Ce qui a débuté comme une grève étudiante en faveur de la démocratie s’est transformé en occupation du quartier central des affaires à Hong Kong. Organisées à l’origine comme une réponse au gouvernement chinois, suite au refus de celui-ci d’autoriser les Hongkongais à élire le chef de l’exécutif, les proportions et les enjeux de ces manifestations ont désormais pris une toute autre ampleur.
Mené par le mouvement étudiant Scholarism et le seul groupe local d’Occupy un tant soit peu organisé, Occupy central, des dizaines de milliers de personnes ont passé les derniers jours à bloquer une artère majeure de la ville, au cœur de la capitale de 7 millions de personnes. Ils ont été aspergés de gaz lacrymogène ainsi que de gaz au poivre, et le leader du mouvement étudiant à l’origine des protestations, âgé de 17 ans seulement, a été arrêté et retenu en détention pendant deux jours avant d’être libéré, tout en demeurant sous la menace de poursuites plus sérieuses de la part des autorités hongkongaises.
Comme de si brutales réactions de la part d’un gouvernement contre des civils désarmés finissent parfois par augmenter l’attention portée aux protestataires plutôt que de les faire taire, le mouvement auparavant sans nom est désormais désigné sous le nom de « Révolte des Parapluies », les parapluies étant la protection utilisée par les foules afin de se protéger des toxines paralysantes utilisées contre eux.
Ainsi que le fit remarquer J.D.Tuccille plus tôt dans la journée, les manifestants sont tout à fait conscients de la visibilité de leur mouvement et prennent soin de demeurer pacifique, évitant les débordements et s’excusant même pour les vandalismes. Les étudiants, quant à eux, demeurent consciencieux et continuent de faire leurs devoirs tout en conservant leur vigilance.
Pour la plus grande part d’entre eux, ce ne sont pas des anarchistes, mais de jeunes gens travailleurs et ambitieux, demandant simplement que la promesse, « un pays, deux systèmes », faite lors de la rétrocession de Hong-Kong à la Chine par le Royaume-Uni, soit respectée.
Un grand nombre des manifestants de la Révolte des Parapluies n’étaient même pas nés en mai 1989 lorsque des milliers d’étudiants pro-démocratie ont été abattus par la police et les militaires de la place Tiananmen de Pékin, mais la crainte d’une répression sanglante demeure à l’esprit de beaucoup d’entre eux.
Il est aussi important de noter que Pékin n’a jamais connu un degré de liberté tel que celui dont jouissent les Hongkongais dès leur naissance. Un étudiant, interrogé par le Huffington Post, a déclaré ceci : « Dites au monde ce qu’il se passe à Hong-Kong et dites leurs que la Chine et Hong-Kong sont différents. Nous ne sommes pas chinois, nous sommes hongkongais. »
On pourrait faire valoir que, parce que l’importance économique de Hong Kong en 2014 éclipse celle de Pékin de 1989, toute friction entre ses citoyens et les autorités peuvent avoir un impact mondial plus important.
Le porte-parole de la Maison Blanche Josh Earnest a exprimé son soutien à l’auto-détermination de Hong Kong, mais a ajouté qu’il espérait que chacun des deux camps fasse preuve de « retenue ». C’est une étrange réponse à la violence d’un gouvernement contre la désobéissance civile pacifique de ses citoyens, et en aucun cas une défense de la démocratie.
La communauté économique internationale ne veut pas d’un blocage prolongé de l’artère principale du quartier des affaires de Hong Kong, et les quatre plus grands cabinets comptables du monde ont déclaré au mois de Juin, dans un communiqué commun : « Si Occupy Central arrive ici, les organismes commerciaux tels que les banques, les échanges et le marché boursier seront inévitablement touchés. Nous nous inquiétons de ce que les multinationales et les investisseurs puissent déplacer leurs quartiers généraux hors de Hong Kong, voire même s’en retirer totalement. »
Le Chef de l’exécutif de Hong Kong, Leung Chun-ying, a rejeté toute négociation ou rencontre avec les dirigeants des protestations, et la ligne officielle du Parti communiste chinois à cet égard est de faire confiance à leur homme à Hong Kong pour faire face à l’agitation.
De leur côté, les Hongkongais ont une tradition vivace de protestataires et de revirements notables, comme ils l’ont illustré début 2003, tenant des manifestations massives contre l’article 23, une loi « anti- subversion » qui contenait de sérieuses restrictions des libertés civiles.
Le gouvernement chinois est soucieux d’éradiquer les foyers de contestations partout dans son empire déliquescent. Au Tibet, ils ont rendu obligatoire un « festival du bonheur » ; dans la région troublée du Xinjiang, les journalistes étrangers n’ont plus le droit d’interroger les Ouïgours ; et le président de Taiwan a rejeté une proposition de réunification chinoise basée sur l’idée « un pays, deux systèmes », l’exemple d’Hong Kong montrant les difficultés à faire respecter cette proposition.