Un nouveau vendredi de mobilisation attend les Algériens. Cette fois, il intervient dans une ambiance particulièrement tendue et marquée par des mesures de répression engagées à l’encontre du mouvement populaire qui, lui, maintient son caractère pacifique.
Abla Chérif – Alger (Le Soir) – L’échéance revêt, par conséquent, un caractère très particulier et devrait permettre d’être davantage fixé sur les intentions réelles des responsables à la tête du pays depuis la démission du Président Bouteflika, le 2 avril dernier.
Les jours qui se sont écoulés ont, en effet, marqué un véritable tournant dans la gestion sécuritaire des manifestations, et pas des moindres puisque des mobilisations importantes et attendues à des moments cruciaux ont été réprimées par des brigades anti-émeutes restées pourtant presque passives durant les semaines qui se sont écoulées. On le sait, instruction avait été donnée pour éviter tout acte de violence et de malmener les foules sorties réclamer l’annulation du cinquième mandat et le départ de Bouteflika, mais les ordres ont été visiblement modifiés depuis.
A l’heure où les deux Chambres parlementaires procédaient à l’activation de la seconde partie de l’article 102 qui désignait d’office Abdelkader Bensalah chef d’Etat intérimaire, des milliers d’étudiants se trouvaient dans les rues pour décrier le fait mais les CRS qui se trouvaient sur place ont réagi en utilisant les camions à eau et en tirant des gaz lacrymogènes.
Le même scénario s’est reproduit hier encore lorsqu’à l’appel des syndicats, des dizaines de milliers de personnes sont sorties crier des slogans hostiles à Bensalah. Cette fois, la police a même tenté d’empêcher les gens de se rassembler à la place Audin, symbole même de la protestation déclenchée depuis le 22 février dernier, et s’en est suivi un jeu de course-poursuite au bout duquel les manifestants ont pu s’imposer en gardant leur plus grand calme.
Ces faits ont confirmé les rumeurs qui avaient couru tout au long de la semaine au sujet de l’existence d’une nouvelle instruction visant à interdire les marches durant les jours de semaine. «L’information» avait circulé avec force sur les réseaux sociaux et cette dernière avait été mise sur le compte de Bedoui. Elle ne semble, cependant, pas avoir induit un grand effet sur les Algériens qui ont fait preuve d’une mobilisation plus importante qu’elle ne l’était durant les autres semaines.
En prévision de ce vendredi, des appels à rester pacifique mais surtout à être très nombreux ont été lancés via le net. Rodée, la rue s’apprête à sortir pour dire non à Bensalah et les autres «B» (Bélaïz et Bedoui), et réclamer une nouvelle fois le départ de tous les symboles du système. Dans ce contexte, l’attention se trouve particulièrement focalisée sur le chef d’état-major qui s’est, une nouvelle fois, exprimé ce mercredi à partir d’Oran où il se trouvait en visite de travail.
Depuis le départ de Bouteflika, Gaïd Salah est l’homme qui tient les rênes du pays et il s’est abstenu de tout commentaire ou toute référence à la répression qui s’est mise en place. Dans son discours, il a également tenté d’expliquer les raisons qui le poussent à soutenir l’option Bensalah tout en déclarant les slogans en cours «irréalisables». La rue, elle, ne l’entend pas de cette oreille. Un vendredi crucial attend les Algériens.
A. C.