Hervé Renard, quelles sont les raisons de votre départ de la sélection angolaise ?
Il y a eu un projet assez important de présenté pour que je signe. Je suis venu avec mon adjoint et un directeur de formation. Il faut savoir que l’Angola était un pays en guerre jusqu’en 2002. Donc au niveau de la formation des jeunes, ce n’était pas un pays qui était hyper développé. Il y avait quelque chose à mettre en place mais au bout de six mois, toutes les détections et stages en vue de former les jeunes ont été refusés pour des raisons financières. En plus, j’avais quelques mois de salaire en retard. Il fallait prendre une décision. Le projet n’était pas possible et il valait mieux que je parte. (Amer) La CAN a rapporté beaucoup d’argents. Les poches de certains se sont bien remplies. Et il ne restait plus une seule goutte dans le robinet. C’est navrant d’autant que je m’étais très sérieusement investi. J’étais venu avec staff technique, j’avais même débauché un membre de la formation de l’AS Nancy Lorraine.
Pourquoi avez-vous choisi l’Angola alors que vous sortiez d’une CAN réussie avec la Zambie ?
J’ai considéré que l’Angola était un pays qui avait de belles ressources financières, avec de nouvelles infrastructures. Il y avait également un bon projet de formation à faire. Ça me semblait intéressant de faire la même chose qu’en Zambie mais avec des moyens supplémentaires. Finalement, ça a été une erreur de ma part. J’avais eu des propositions intéressantes mais maintenant, c’est fait. Il faut rebondir le plus rapidement possible.
Que faites-vous depuis octobre ?
C’est dur, comme tout entraîneur qui n’est pas en activité. Le premier mois, ça passe. On se régénère un peu. La suite est beaucoup plus difficile. Je cours beaucoup et récemment j’ai fait un marathon. J’ai l’impression d’aller à l’entraînement quand je fais mon footing quotidien. Le terrain me manque.
Avez-vous reçu des offres ?
Oui, j’ai reçu plusieurs offres de clubs nord-africains principalement. J’ai reçu une offre d’Al-Ittihad en Libye, d’Al-Merrikh au Soudan, d’Al-Masry en Egypte puis la dernière de Sétif en Algérie.
« Difficile de ne pas être intéressé pas une équipe qui était au Mondial 2010 »
Justement, pourquoi avez-vous refusé l’offre de Sétif ?
Ces quatre propositions ne me convenaient pas au moment où on me les a proposées. Il y a des personnes qui disent que j’ai refusé pour des raisons financières mais c’est faux. Quand j’étais entraîneur en Zambie, j’avais un salaire qui correspondait aux propositions de ces clubs. J’ai uniquement refusé pour des raisons sportives. En priorité, je voudrais venir avec mon adjoint. Si c’est impossible, ça devient déjà un peu plus compliqué de travailler correctement. J’aurais aimé aussi incorporer des joueurs Angolais ou Zambien que je connais. J’ai vu que Djabou, leur meilleur buteur en Championnat, un milieu offensif, était sur le départ. Les Championnats sont en cours et la Ligue des Champions démarre au mois de janvier. Je n’ai donc pas beaucoup de temps pour préparer une équipe sauf si c’est un très grand club qui est exempté du premier tour. On verra ce qui se passera par la suite.
Et des approches de sélections nationales africaines…
Non. Aucune n’est actuellement disponible.
Il y a pourtant la Tunisie…
Oui j’ai été proposé là bas, mais ça ne se fera pas.
Des rumeurs vous envoient à la tête de l’équipe d’Algérie. Qu’en est-il ?
Oui, bien sûr que c’est un poste qui m’intéresserait. Néanmoins, je tiens à apporter une nuance. Les journalistes et la presse algérienne ont beaucoup parlé de moi mais je n’ai jamais eu aucun contact avec la Fédération algérienne de football. On ne m’a jamais appelé.
Vous ne serez pas contre l’idée d’apporter votre contribution en cas de contact avec la FAF ?
Je pense que c’est difficile de ne pas être intéressé par une équipe qui était au Mondial 2010. Même si c’est un pays pas facile. Mais aujourd’hui dans le football, il n’y a rien qui est facile, même les petits clubs et pays veulent tout gagner. Quand on ne gagne pas, on est remis en cause. Autant aller quelque part où il y a une grande équipe.
L’Algérie est pourtant à la recherche de compétences étrangères pour renforcer son staff technique, seriez-vous prêt à rejoindre Benchikha ?
Oui, il faut voir sous quelle conditions mais ça me paraît effectivement très compliqué. Si c’est pour bosser en duo, ça pourrait m’intéresser. Les rôles doivent être clairement définis. Mais il faut être franc, c’est une alchimie qui est difficile à trouver.
Comment avez-vous analysé la prestation des Algériens en Coupe du Monde ?
Je pense qu’ils ont laissé passer leur chance lors de la première rencontre contre la Slovénie. L’expulsion de Ghezzal a fragilisé l’équipe et a précipité le reste. Ils ont fait une belle prestation contre les Anglais. Ce qui me fait dire que c’est typiquement une équipe qui doit être bien prise. Les Algériens bien pris, bien gérés, peuvent rivaliser avec tout le monde.
« L’Algérie sans Belhadj, ce n’est pas la même Algérie »
Avez-vous suivi l’après Saadane et les mauvais résultats des deux premières journées des éliminatoires CAN/Mondial 2010 ?
Oui j’ai vu ça. Je pense qu’ils ont besoin de se remobiliser et de retrouver de l’envie. Mais le plus important c’est cette confrontation à venir contre le Maroc. Les Marocains ont une belle équipe, et ils ont Eric Gerets à leur tête. Ça va être un sacré match. Je pense que ce genre de confrontation peut redonner aux joueurs algériens cet état d’esprit qui a fait leur bon parcours lors des éliminatoires CAN/Mondial 2010. Que ce soit le Maroc, c’est plutôt une bonne nouvelle. Ils ont franchi l’écueil de l’Egypte et là c’est encore un derby fratricide contre un pays voisin. Celui qui mettra le plus d’envie, passera dans ce groupe.
Le stade de Blida mette-t-il vraiment une pression sur l’adversaire ?
C’est simple. Je m’en souviens encore bien. Quand je suis rentré dans le stade, je me suis dit que c’était quelque chose de fantastique. Tous ces drapeaux, ce stade à ciel ouvert, j’avais l’impression d’être au vélodrome. Je me suis réuni avec mes joueurs au centre du terrain. Et je leur ai dis : « On fait quoi là ? On joue ou on s’en va tout de suite.» Ca a été un beau match, qu’on aurait pu gagner si notre but valable n’avait pas été signalé en hors jeu.
Belhadj a été écarté lors des deux derniers matches. Qu’en pensez-vous ? Son choix de jouer au Qatar serait une des raisons ?
L’Algérie sans Belhadj, ce n’est pas la même Algérie. Ce n’est pas parce qu’il est parti au Qatar, qu’il va perdre ses qualités du jour au lendemain. C’est un joueur de très haut niveau, et je pense qu’il restera six mois ou un an et reviendra en Europe. Personnellement, je le préfère comme milieu gauche.
Un retour en Europe est-il dans vos plans ?
En toute sincérité, l’important est de retrouver du travail et un projet sportif intéressant. Si ça peut-être en Europe, oui, pourquoi pas. J’ai commencé à me faire un nom en Afrique, c’est pour cela d’ailleurs que j’ai plus de propositions qui affluent de ce continent.
(Propos recueillis avec la collaboration de Nabil Djellit)